Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 septembre 2014, M.A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 juillet 2014 ;
2°) d'annuler la décision précitée du 23 décembre 2010 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Rieumes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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- les autres pièces du dossier ;
- la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. M. C...A..., attaché territorial principal a été recruté en 2006 par la commune de Rieumes (Haute-Garonne), faisant fonction de directeur général des services. Il fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 juillet 2014, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 23 décembre 2010 par lequel le maire de Rieumes lui a infligé la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905: " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés dans leur avancement à l'ancienneté. ". Par ailleurs, aux termes des articles 18 et 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité... Tout fonctionnaire a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi... ", " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier... ".
3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. La décision attaquée, qui inflige une sanction disciplinaire à M.A..., ne pouvait légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été informé de son droit à communication de son dossier individuel pour connaître les raisons de la mesure envisagée. Il ressort du procès-verbal de communication du dossier, établi le 4 novembre 2010 et signé par l'intéressé, que celui-ci a pris connaissance de l'intégralité de son dossier individuel ce même jour, soit avant que la décision d'exclusion temporaire de fonctions lui ait été notifiée et qu'il en a demandé une copie, qu'il a reçue également le même jour, comme il le reconnaît par une attestation signée de sa main, par laquelle il certifie avoir reçu un double du rapport du maire et du dossier transmis au conseil de discipline. Si l'intéressé soutient que le dossier qu'il a ainsi consulté était incomplet, et ce, notamment, au motif qu'il ne contenait pas certaines pièces afférentes à des services accomplis dans d'autres communes du département de la Haute-Garonne, il n'établit ni même n'allègue que de telles pièces auraient été utiles à sa défense ou auraient entretenu un quelconque rapport avec les griefs formulés à son encontre. Par ailleurs, si M. A...fait valoir que le procès-verbal précité ne liste pas les pièces qui lui ont été communiquées, ou que ces pièces n'auraient pas été numérotées et classées sans discontinuité, conformément aux dispositions de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983, fait au demeurant non établi, cette circonstance, tout comme le précédente, n'a pas eu par elle-même pour effet de priver M. A...d'une garantie, ni n'a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de l'avis émis par le conseil de discipline. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière. Par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait méconnu le principe garantissant les droits de la défense doit également être écarté, ainsi que le moyen tiré de ce qu'il en résulterait une erreur de droit.
5. En deuxième lieu, M. A...invoque l'illégalité de la note de service du 27 mai 2010 qui a réduit ses attributions, en ce qu'étant une mesure prise en considération de sa personne, elle aurait due être précédée de la consultation de la commission administrative paritaire en vertu de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 et de la communication de son dossier. Ce moyen est cependant inopérant à l'encontre de la décision attaquée, laquelle est une décision distincte de la décision contenue dans la note de service précitée et qui ne se fonde pas sur ladite décision, qu'en tout état de cause M. A...n'a pas contesté dans le délai de recours contentieux.
6. En troisième lieu, M. A...soutient que la décision attaquée est intervenue en méconnaissance du principe " non bis in idem " au motif que l'autorité territoriale l'aurait déjà sanctionné à raison des mêmes faits en abaissant sa notation au titre de l'année 2008 par une décision en date du 17 mars 2009 et en ayant largement modifié ses attributions par la note de service du 27 mai 2010.
7. Cependant, d'une part, s'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'une lettre du maire de Rieumes au centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Haute-Garonne en date du 23 avril 2009, que la baisse de la notation de M. A...au titre de l'année 2009 était fondée, notamment, sur deux des griefs à l'origine de la décision attaquée, à savoir que l'intéressé avait nié, devant le maire, avoir convoqué un artisan pour établir un devis relatif au clocher de l'église de la commune, et qu'il n'avait pas tenu son engagement de prendre en charge une stagiaire, comme l'ont déjà relevé à juste titre les premiers juges, de tels manquements, qui peuvent justifier une sanction disciplinaire, pouvaient également avoir une influence sur la note annuelle de l'intéressé, sans que l'intéressé doive être regardé comme ayant été sanctionné deux fois pour les mêmes faits.
8. D'autre part, la mutation dans l'intérêt du service constitue une sanction déguisée dès lors qu'il est établi que l'auteur de l'acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que la décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier. En l'espèce, si la décision du 27 mai 2010 comportait une modification importante dans la nature des fonctions exercées par M. A...et ses conditions de travail, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de cette décision, comme l'ont estimé les premiers juges, qu'en l'édictant, l'autorité territoriale aurait entendu sanctionner M. A...à raison des mêmes faits que ceux qui fondent la décision attaquée.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel...".
10. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. En outre, que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'autorité à laquelle il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.
11. En l'espèce, M. A...soutient qu'il a été victime d'un " ostracisme professionnel ", qu'il a été destinataire d'ordres variables et sans consistance ainsi que d'horaires discriminatoires, qu'il a fait l'objet d'une surveillance incessante de la part de l'autorité municipale, qu'il lui a été interdit de se déplacer sans autorisation expresse de sa hiérarchie, que les missions qui lui ont été confiées à la suite de la décision du 23 décembre 2010 n'avaient plus aucun contenu, qu'il a fait l'objet d'appréciations et de notations catastrophiques en 2009 et en 2010, qu'il n'a pas été noté en 2011 et qu'il n'avait toujours pas bénéficié de son avancement d'échelon à la durée maximale au mois d'août 2012. Les premiers juges ont relevé que " toutefois, l'intéressé, qui, au demeurant, ne produit aucun document de nature à étayer ses allégations, ne conteste ni la matérialité des faits qui lui sont reprochés par l'autorité territoriale et qui fondent la décision attaquée, ni leur qualification juridique ; qu'ainsi, cette décision, qui est justifiée par les manquements aux devoirs d'obéissance et de loyauté imputables à M. A...dans l'exercice de ses fonctions, n'a pas excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et ne revêtait pas un caractère vexatoire ou abusif ; que par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée infligeant à M. A... la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois constituerait un agissement de harcèlement moral doit être écarté ". En appel, M. A...n'apportant aucun élément de nature à contredire l'appréciation ainsi portée par les premiers juges, il y a lieu d'adopter leur motif tel qu'il vient d'être rappelé.
12. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué par le requérant n'est pas établi par les pièces du dossier, dès lors que celui-ci fonde son moyen sur les faits de harcèlement moral dont il dit avoir fait l'objet, mais dont il vient d'être dit au point 11 ci-dessus qu'ils ne sont pas établis.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Rieumes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...une somme de 1 500 euros demandée par la commune de Rieumes au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : M. A...versera à la commune de Rieumes la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 15BX02797