Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juin 2021, M. A... B..., représenté par Me Aymard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 mars 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation après délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant du refus de séjour,
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il entretient depuis plusieurs années une relation avec une compatriote dont il a eu une enfant née à Bordeaux le 25 juin 2018 ;
- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français,
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français,
- elle est illégale du fait de l'illégalité des refus de titre et obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que la mesure d'éloignement du 11 octobre 2018 ne lui a pas été notifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête et renvoie à ses écritures de première instance.
Par une décision du 6 mai 2021, M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., de nationalité nigériane, est entré en France, selon ses dires, en septembre 2016 et y a sollicité l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 20 novembre 2017, confirmée le 14 juin 2018 par la Cour nationale du droit d'asile. Il a également demandé son admission en raison de son état de santé, qui lui a été refusée par un arrêté du préfet de la Gironde du 26 octobre 2017 portant refus de titre, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Par jugement n° 180 4940 du 19 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé les décisions portant obligation de quitter le territoire français et pays de renvoi au motif que, à la date à laquelle elles avaient été prises, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'avait pas encore statué sur la demande de l'intéressé.
2. Par arrêté du 11 octobre 2018, le préfet de la Gironde a, de nouveau, refusé à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour étranger malade et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours. Le 30 juillet 2019, M. A... B... a, de nouveau, sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé, et par l'arrêté litigieux du 12 octobre 2020, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Il relève appel du jugement du 31 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. M. A... B... fait valoir qu'il entretient depuis plusieurs années une relation avec une compatriote avec laquelle il a eu une enfant, née à Bordeaux le 25 juin 2018. Toutefois, il est constant qu'il ne vit pas avec la mère et l'enfant, et il n'établit pas, en se bornant à produire une attestation de son médecin généraliste du 6 avril 2021, qui affirme qu' " Il vient régulièrement au cabinet médical et accompagne sa compagne et son enfant ", ainsi qu'une attestation du même jour d'une éducatrice spécialisée, qui explique que l'intéressé " s'est occupé à plusieurs reprises de sa fille " pendant que la mère était en rendez-vous, contribuer à l'entretien et à l'éducation de cet enfant. De même, il n'établit ni même n'allègue que la vie familiale ne pourrait reprendre au Nigeria, pays dont les membres de la famille ont la nationalité. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré, par M. A... B... de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
5. En second lieu, pour les motifs qui viennent d'être rappelés, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
7. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
9. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
10. M. A... B... soutient qu'en retenant, notamment, qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement du 11 octobre 2018, le préfet aurait fait une application erronée de ces dispositions, dès lors que l'obligation de quitter le territoire français du 11 octobre 2018 ne lui a pas été notifiée, car la préfecture a omis de préciser le numéro d'appartement. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, le 3 janvier 2018, l'intéressé a communiqué à la préfecture sa nouvelle adresse, qui ne comportait pas de numéro d'appartement, et que, le 23 avril 2018, la personne qui l'héberge a adressé au préfet une attestation d'hébergement, comportant la même adresse, toujours sans numéro d'appartement. Par suite, le moyen doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 10 février 2022 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère
Rendu public par dépôt au greffe le 10 mars 2022.
La rapporteure,
Frédérique C...Le président
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX02447