Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2019, M. A... B..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 21 septembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire sont entachées d'un défaut de motivation en droit et en fait ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; la rupture de la communauté de vie en l'espèce est due au départ de son épouse et non du sien ; le motif de séparation a été totalement ignoré tant par l'administration que par les premiers juges qui ont pris en considération uniquement le fait que son ex-épouse a quitté le domicile conjugal sans rechercher les causes de ce départ ;
- il est présent en France depuis l'année 2013, il a régulièrement travaillé et subvenu à ses besoins ainsi qu'à ceux de son épouse pendant la durée de leur union ; les dispositions du h) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien prévoient la délivrance d'un certificat de résidence algérien de dix ans lorsque l'étranger justifie de cinq années de résidence régulière ininterrompue en France, ce qui est son cas ;
- le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont dépourvues de base légale en raison de l'illégalité entachant la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A... B... n'est fondé.
Par ordonnance du 29 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 octobre 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant algérien, né le 28 décembre 1987, est entré régulièrement en France le 19 août 2013 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa long séjour. Le 23 août 2016, il a sollicité le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré en qualité de conjoint d'une ressortissante française, à la suite de son mariage avec Mme E..., le 1er août 2015. Par un arrêté du 21 septembre 2018, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... B... relève appel du jugement du 30 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ". En vertu du I de l'article L. 511-1 dudit code : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ".
3. L'arrêté contesté, qui vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation de M. A... B..., mentionne notamment qu'il résulte de l'enquête menée par les services de la police nationale le 13 décembre 2016 qu'il n'entretient plus de vie commune avec son épouse, qu'en outre, celle-ci [BC1]a[MF2] déposé une main courante, le 1er septembre 2016, auprès des services de police pour coups et blessures portés par son conjoint et qu'elle déclare avoir quitté le domicile conjugal le 10 avril 2016 et entamé une procédure de divorce le 29 avril 2016 et qu'il ne saurait être admis au séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, la condition de vie commune lui étant opposable pour l'obtention d'un certificat de résidence conformément aux stipulations du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et du a) de l'article 7 bis de cet accord. L'arrêté indique en outre qu'il est entré en France récemment à l'âge de 26 ans et n'a été admis à y séjourner qu'à titre temporaire, qu'il n'est pas sans attaches familiales ni liens personnels importants en Algérie où se trouvent à minima, selon ses déclarations, sa mère et ses deux soeurs. Dès lors, et contrairement à ce que soutient l'appelant, la décision litigieuse, qui n'avait pas à reprendre de manière exhaustive tous les éléments dont il pourrait se prévaloir, est suffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article L. 211-2 du code des relations entre l'administration et le public. Il en est de même, par voie de conséquence, de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'avait pas en l'espèce à faire l'objet d'une motivation distincte, conformément au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans l'arrêté contesté ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de cet arrêté ni des autres pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne aurait négligé de procéder à un examen particulier de la situation de M. A... B... avant de prendre les décisions litigieuses.
5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre époux ". Ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Si un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour lorsque l'étranger a subi des violences conjugales et que la communauté de vie a été rompue, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressé.
6. M. A... B... fait valoir que la rupture de la communauté de vie en l'espèce est due au départ de son épouse et non du sien et que ce motif de séparation liées aux violences conjugales dont il[BC3][MF4] a été victime de la part de son épouse devaient être prises en compte dans le cadre du renouvellement de son titre de séjour. Toutefois, s'il soutient avoir subi des violences psychologiques de la part de sa femme qui aurait fait pression sur lui pour qu'il reconnaisse l'enfant qu'elle attendait dans le cadre d'une relation extra-conjugale et qui a quitté son domicile, il n'apporte à l'appui de cette allégation aucune pièce de nature à en démontrer le bien-fondé. Ainsi, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant le renouvellement de son titre de séjour, ni qu'il a méconnu l'étendue de sa compétence.
7. En quatrième lieu, et comme il vient d'être dit, M. A... B... a sollicité un titre de séjour en sa qualité de conjoint de ressortissant français. Il s'ensuit que le préfet n'était pas tenu d'examiner sa demande sur un autre fondement, et notamment au regard des stipulations du h) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. L'appelant ne peut, en conséquence, se prévaloir utilement de la méconnaissance de ces stipulations par l'arrêté litigieux.
8. En cinquième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En application de ces stipulations, il appartient à l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France d'apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
9. M. A... B... fait valoir qu'il réside sur le territoire français depuis plus de cinq ans, qu'il a noué des liens personnels avec la France notamment avec des oncles, des tantes et des cousins. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et de ce qui a été dit au point 6, que l'intéressé, dont la communauté de vie avec son épouse a été rompue, est sans charge de famille en France. S'il fait état de la présence régulière en France de ses oncles, tantes et cousins, cette circonstance ne suffit pas à faire regarder cette décision de refus de séjour comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, alors qu'il ne démontre pas entretenir de lien étroit avec les membres de sa famille présents sur le territoire, ni davantage être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu pendant vingt-cinq ans et où se trouvent à minima, selon ses déclarations, sa mère et ses deux soeurs. Enfin, les circonstances, à les supposer établies, que l'intéressé ait exercé une activité professionnelle et subvenu à ses besoins et à ceux de son ex-épouse, ne sauraient suffire à lui ouvrir droit à la délivrance d'un titre de séjour. Le refus de séjour opposé à M. A... B... n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Pour les mêmes motifs, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle.
10. En sixième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision de refus de délivrance du titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, M. A... B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme G..., présidente-assesseure,
Mme C... D..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.
Le rapporteur,
Florence D...
Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
Le greffier,
Caroline Brunier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
[BC1]En contradiction avec le 6 qui explique que c'est M. qui a été victime de violences conjugales
[MF2]Certes mais c'est la réalité et le contenu de l'arrêté
[BC3]Dans le 3, on comprend que c'est elle qui a été violentée
[MF4]Le " toutefois " qui suit explique bien qu'il dit n'importe quoi ou en tout cas qu'il ne justifie pas ce qu'il raconte
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N° 19BX02370