Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 septembre 2019, le préfet du Pas-de-Calais, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter les demandes de M. D... présentées devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 22 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille, d'une part, a annulé son arrêté du 27 mai 2019 refusant à M. D... la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour temporaire.
2. Les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énumèrent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un ressortissant étranger. Aux termes de ces dispositions, dans leur version alors applicable, l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant, au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1 du même code, en particulier lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : " (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) ".
3. Les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas obstacle, dans l'hypothèse où un étranger à qui a été refusée la reconnaissance de la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire, a également présenté une demande tendant à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour, à ce que l'autorité administrative assortisse le refus qu'elle est susceptible d'opposer à cette demande d'une obligation de quitter le territoire français fondée à la fois sur le 3° et sur le 6° du I de cet article.
4. Les dispositions du I et du I bis de l'article L. 512-1 du même code définissent deux régimes contentieux distincts applicables à la contestation par un étranger de l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français. Aux termes du I de cet article : " I. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. " Aux termes du I bis de ce même article : " I bis.- L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / La même procédure s'applique lorsque l'étranger conteste une obligation de quitter le territoire fondée sur le 6° du I dudit article L. 511-1 et une décision relative au séjour intervenue concomitamment. Dans cette hypothèse, le président du tribunal administratif ou le juge qu'il désigne à cette fin statue par une seule décision sur les deux contestations. (...) / Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou parmi les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. ".
5. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment et a fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire, alors même qu'elle a pu être prise également sur le fondement du 3° du I de cet article. Dès lors, les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 ainsi, notamment, que celles de l'article R. 776-26 du code de justice administrative sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées devant le juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.
6. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir relevé que la demande d'asile de M. D... avait été rejetée, le préfet du Pas-de-Calais a, d'une part, refusé l'admission au séjour de M. D... au titre de l'asile et, d'autre part, rejeté la demande d'admission au séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Pour prendre sa décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français, le préfet du Pas-de-Calais s'est fondé sur le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur le 3° du I de ce même article. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif était compétent pour statuer selon les modalités prévues au I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement du 22 juillet 2019 est entaché d'irrégularité au motif que les conclusions dirigées contre les décisions portant refus de titre de séjour ne pouvaient être examinées que par une formation collégiale doit être écarté.
7. Le préfet du Pas-de-Calais ne présente aucun moyen à l'appui de ses conclusions tendant au rejet de la demande de M. D... dirigée contre de l'arrêté du 27 mai 2019. Celles-ci doivent, par suite, être rejetées.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 22 juillet 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 27 mai 2019 et lui a enjoint de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire.
Sur les frais liés au procès :
9. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me B..., avocat de M. D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 800 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Pas-de-Calais est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me B... une somme de 800 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D..., à Me C... B....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.
N°19DA02178 2