Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 mai 2021, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif.
Il soutient que son arrêté n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 17 août 2021, M. B..., représenté par Me Cécile Madeline, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou réexaminer sa situation et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Il soutient que l'arrêté est entaché de vice de procédure, de vice de forme, de défaut d'examen de la situation, d'erreur manifeste d'appréciation et de violation de la circulaire Valls et des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et L. 313-11, 7° et 11°, L. 313-14, L. 511-1, III, L. 511-4, 10° et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicables.
M. B... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai du 23 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
1. M. B..., né en 1980, a vécu la majeure partie de sa vie au Nigéria. Il a déclaré être entré irrégulièrement en France en 2012. Sa demande d'asile, déposée en octobre 2012, a été définitivement rejetée en septembre 2014. Il n'a pas exécuté une obligation de quitter le territoire français de février 2015, se maintenant ainsi irrégulièrement en France pendant plus de trois ans, jusqu'au dépôt d'une demande de titre de séjour " étranger malade " en mai 2018.
2. Si M. B... souffre de troubles psychologiques, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé en juin 2020 que M. B... pourrait voyager sans risque vers son pays d'origine et qu'un défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et cette appréciation n'a pas été sérieusement démentie par les pièces produites à l'instance.
3. Si M. B... expose qu'il a fui le Nigéria en raison du risque y résultant de son orientation sexuelle, il n'a pas critiqué les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile qui ont rejeté sa demande d'asile et n'a produit à l'instance aucun élément personnalisé à l'appui de son récit.
4. Si M. B... a reconnu en novembre 2016 l'enfant né en février 2016 de sa relation avec une compatriote Mme A..., celle-ci fait aussi l'objet d'une mesure d'éloignement, la cellule familiale peut se reconstituer au Nigéria et l'enfant pourra poursuivre sa scolarité dans le pays dont il a la nationalité. En tout état de cause, M. B... ne vit pas avec son enfant qui réside avec sa mère en Bretagne et, alors que les quelques factures produites ne sont pas nominatives, le requérant ne justifie de transferts d'argent au bénéfice de Mme A... qu'en 2018.
5. Dans ces conditions, même si M. B... a bénéficié d'un dispositif d'insertion par l'activité économique au sein de l'armée du salut et a travaillé pour une société de confection à partir d'octobre 2019, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les décisions attaquées étaient entachées d'erreur manifeste d'appréciation.
6. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués en première instance et en appel par M. B....
Sur les autres moyens d'annulation invoqués par M. B... :
7. Conformément à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, l'arrêté a énoncé, dans ses considérants ou dans son dispositif, les motifs de droit et de fait qui ont fondé ses différentes décisions.
8. Si le silence gardé par la préfecture sur le recours gracieux formé par M. B... a fait naître une décision implicite de rejet, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'intéressé ait demandé au préfet, conformément à l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, les motifs de cette décision.
9. Il ressort de la motivation de l'arrêté, qui compte quatre pages d'analyse personnalisée, que son auteur a procédé, pour toutes ses décisions, à un examen sérieux et particulier des éléments relatifs à la situation de M. B... alors portés à sa connaissance.
10. Il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de ce que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été consulté manque en fait.
11. Pour les motifs exposés aux points 1 à 4 et alors que la circulaire Valls ne peut utilement être invoquée, les décisions attaquées n'ont pas violé les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et L. 313-11, 7° et 11°, L. 313-14, L. 511-1, III, L. 511-4, 10° et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicables.
12. Il résulte de ce qui précède que tous les moyens ci-dessus invoqués, par voie d'action ou d'exception, doivent être écartés.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté et la décision implicite ayant rejeté le recours gracieux formé par M. B....
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative.
Sur l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
15. La demande présentée par le requérant et son conseil, partie perdante, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 12 avril 2021 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Rouen et les conclusions qu'il présente en appel au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Me Cécile Madeline et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 1er mars 2022 à laquelle siégeaient :
M. Marc Heinis, président de chambre,
Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure,
Mme Naïla Boukheloua, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2022.
La présidente-assesseure,
Signé : C. BAES-HONORELe président-rapporteur,
Signé : M. C...
La greffière,
Signé : S. CARDOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
C. SIRE
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N° 21DA01005