Résumé de la décision
M. E..., un demandeur d'asile irakien, a contesté un arrêté du préfet du Nord qui ordonnait son transfert vers l'Allemagne, où il avait déjà présenté des demandes d'asile. Le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté le 17 mai 2018. Le préfet a fait appel de cette décision. Cependant, la cour a constaté que le délai de six mois pour le transfert, selon le règlement UE n° 604/2013, avait été interrompu par le recours de M. E..., et que la France était devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile. Par conséquent, l'appel du préfet est devenu sans objet.
Arguments pertinents
1. Interruption du délai de transfert : La cour a souligné que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif interrompt le délai de six mois pour le transfert, comme le stipule le règlement (UE) n° 604/2013. Cela signifie que le délai recommence à courir à partir de la notification du jugement au préfet, indépendamment de l'appel.
> "L'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013."
2. Responsabilité de l'État : En raison de l'expiration du délai de six mois sans exécution du transfert, la France est devenue responsable de l'examen de la demande d'asile de M. E..., ce qui a rendu l'appel du préfet sans objet.
> "A la date du présent arrêt, la France est devenue responsable de l'examen de la demande de protection de M. E...."
Interprétations et citations légales
1. Règlement (UE) n° 604/2013 : Ce règlement établit les critères pour déterminer l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. L'article 29 précise que le transfert doit être effectué dans un délai de six mois, qui peut être interrompu par un recours.
- Règlement (UE) n° 604/2013 - Article 29 : "Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée."
2. Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Les articles L. 742-3 et L. 742-4 précisent les conditions de transfert et les droits des demandeurs d'asile en cas de recours.
- Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 742-3 : "L'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre État peut faire l'objet d'un transfert vers l'État responsable de cet examen."
- Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 742-4 : "L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif."
3. Effet suspensif du recours : La décision souligne que le recours a un effet suspensif sur l'exécution de la décision de transfert, ce qui est conforme aux exigences du droit européen.
- Règlement (UE) n° 604/2013 - Article 27 : "Aux fins des recours contre des décisions de transfert ou des demandes de révision de ces décisions, les États membres prévoient les dispositions suivantes dans leur droit national : / a) le recours ou la révision confère à la personne concernée le droit de rester dans l'État membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision."
En conclusion, la décision de la cour repose sur une interprétation rigoureuse des règlements européens et des lois nationales, affirmant que le recours de M. E... a eu pour effet d'interrompre le délai de transfert, rendant ainsi l'appel du préfet sans objet.