Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 mai 2016, Mme A...B..., représentée par la SCP Bouquet, Fayein-Bourgois, Wadier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 euros par jour de retard ;
5°) de condamner l'Etat à verser à la SCP Bouquet, Fayein-Bourgois, Wadier la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le traitement approprié à son état de santé n'existant pas en République du Congo ;
- l'obligation de quitter le territoire française, se fonde sur une décision de refus de séjour illégale ;
- elle repose sur des faits inexacts ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle excipe, à l'encontre de la décision d'interdiction de retour d'un an, de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision d'interdiction de retour pendant un an est entachée d'erreur de fait ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions du septième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination se fonde sur une décision portant obligation de quitter le territoire français elle-même illégale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Mme A...B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 mai 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeB..., ressortissante congolaise entrée en France en 2007, après le rejet de ses demandes d'asile, a bénéficié à partir de 2009 de titres de séjour en qualité d'étranger malade ; qu'elle relève appel du jugement du 25 mars 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2015, confirmé le 8 octobre 2015, du préfet de l'Oise refusant de lui renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et lui a notifié une interdiction de retour d'un an ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sur la décision de refus de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces produites au dossier de première instance, en particulier d'un certificat médical en date du 2 juillet 2015, que Mme B...présente des troubles de l'humeur à expression psychotique qui ont donné lieu à plusieurs hospitalisations et que cette pathologie était traitée par des antipsychotiques et des sédatifs ; qu'il ressort d'un autre certificat médical, produit en appel, daté du 8 avril 2016, établi par le chef de service du centre hospitalier de Compiègne Noyon que l'intéressée est également traitée pour un diabète sucré de type 2 ; que le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué, dans un avis du 10 décembre 2014, confirmé le 22 septembre 2015 sur recours gracieux de l'intéressée, que ses pathologies pouvaient être prises en charge en République du Congo, pays dont elle a la nationalité ; que, pour mettre en cause cet avis, Mme B...produit un document qui aurait été établi le 27 juillet 2015 par un médecin généraliste, indiquant que les psychotropes administrés à Mme B... n'existent pas en République du Congo et qu'ils doivent être achetés en France ; que, cependant, ce document, rédigé en termes généraux et dépourvu de toute justification, n'est pas de nature à remettre en cause l'avis émis, à deux reprises, par le médecin de l'agence régionale de santé ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour est entachée d'illégalité ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté ;
6. Considérant que si la requérante soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur de fait, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour que la cour puisse en apprécier le bien-fondé ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) " ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 ;
8. Considérant que MmeB..., née en 1981 en République du Congo, de nationalité congolaise, n'est entrée en France qu'en 2007, selon ses déclarations et qu'elle a donc vécu la majorité de son existence hors de France dans son pays d'origine ; que, célibataire et sans enfant en France, elle ne justifie pas d'attache familiale sur le territoire national, en dehors de son frère qui réside à Toulouse ; que sa mère et deux de ses soeurs résident en République du Congo ; que, dans ces conditions, et en dépit de l'ancienneté de la présence en France de l'intéressée, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme B...à mener une vie privée et familiale normale ; que, par suite, en prenant cette décision, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, et nonobstant les efforts de formation de l'intéressée, le préfet n'a pas, en prenant cette décision, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;
Sur l'interdiction de retour pendant un an :
10. Considérant qu'au regard de ce qui précède, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;
11. Considérant que le moyen tiré de ce que la décision serait entachée d'erreur de fait n'est pas assorti de précisions suffisantes pour que la cour puisse en apprécier le bien-fondé ;
12. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'appelante doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 ;
13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. - L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;
14. Considérant qu'en relevant notamment que Mme B...est célibataire, sans enfant à charge, que sa présence n'est pas indispensable auprès des membres de sa famille qui seraient en France, qu'elle ne justifie pas d'une intégration notable dans la société française et que ses liens avec la France ne sont pas particulièrement anciens, intenses et stables, le préfet de l'Oise n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant interdiction de retour pendant un an est illégale ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
16. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité ;
17. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;
Sur les autres conclusions :
18. Considérant que le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme B...doivent être rejetées ;
19. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées pour Mme B...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au ministre de l'intérieur et à la SCP Bouquet, Fayein-Bourgois, Wadier.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 4 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
- M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 novembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : X. FABRELe président de la formation de jugement,
Signé : C. BERNIER
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°16DA00973 2