Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2015, M. B...D..., représenté par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification du présent arrêt ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative à compter de la décision à intervenir, sous réserve d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de titre de séjour et de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle ;
- la décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- le préfet a entaché sa décision d'éloignement d'une erreur de fait en estimant que son mariage avait été célébré moins de trois ans avant la décision en litige ;
- la mesure d'éloignement est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2015, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 janvier 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai désignant Me A...C....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la régularité du jugement :
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 613-3 du même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) " ;
2. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'instruction écrite est normalement close dans les conditions fixées par l'article R. 613-1 ou bien, à défaut d'ordonnance de clôture, dans les conditions fixées par l'article R. 613-2 de ce code ; que, toutefois, lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d'un mémoire émanant de l'une des parties à l'instance, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser ; que s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; que, dans tous les cas où il est amené à tenir compte de ce mémoire, il doit - à l'exception de l'hypothèse particulière dans laquelle il se fonde sur un moyen qu'il devait relever d'office - le soumettre au débat contradictoire, soit en suspendant l'audience pour permettre à l'autre partie d'en prendre connaissance et de préparer ses observations, soit en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... a adressé un mémoire complémentaire le 27 octobre 2014 au tribunal administratif de Lille avant l'audience publique du 20 novembre 2014 mais après la clôture de l'instruction qui avait été fixée, par une ordonnance du magistrat en charge de l'affaire, au 6 octobre 2014 ; que si ce mémoire exposait un moyen nouveau tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, il ne résulte pas de l'instruction que M. D...n'était pas en mesure d'en faire état avant la clôture de l'instruction écrite ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le tribunal qui n'était pas tenu de rouvrir l'instruction pour communiquer ce dernier mémoire, aurait entaché son jugement d'irrégularité ;
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident peut être accordée : / (...) / 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français / (...) " ;
5. Considérant que le préfet ne peut délivrer une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lorsque la communauté de vie entre les époux a cessé ;
6. Considérant qu'il est constant que la communauté de vie entre M. D...et son épouse avait cessé à la date de l'arrêté en litige ; que, par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord aurait dû lui délivrer de plein droit une carte de résident sur ce fondement ;
7. Considérant que M.D..., ressortissant marocain né le 10 septembre 1990, est entré en France le 18 mars 2011 muni d'un visa de long séjour portant la mention " conjoint de français ", à la suite de son mariage célébré le 22 octobre 2010 avec Mme D...; que son titre de séjour a été régulièrement renouvelé jusqu'au 23 février 2014 sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 6, la communauté de vie entre époux a cessé au cours de l'année 2014 ; qu'en, outre, aucun enfant n'est né de cette union ; que l'intéressé ne démontre pas l'intensité de ses liens privés ou de son insertion sociale et professionnelle en France ; qu'il a conservé des attaches familiales au Maroc où résident sa mère et plusieurs de ses frères et soeurs ; que, dans ces conditions et en dépit de la durée de son séjour, l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet du Nord n'a pas violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui opposant un refus de séjour ; que, pour les mêmes raisons, et en dépit des trois années de mariage avec son épouse ainsi que d'une volonté d'insertion dans la société française, il ne ressort pas des pièces versées au dossier qu'en refusant le séjour à l'intéressé, le préfet du Nord aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que la décision du préfet du Nord refusant un titre de séjour à M. D...n'est pas entachée d'illégalité ;
Sur la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français :
9. Considérant que la décision de refus de séjour n'étant pas illégale, M. D...n'est pas fondé à soutenir, par voie d'exception, que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait dépourvue de base légale ;
10. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision d'éloignement sur la situation de M.D..., doit être écarté ;
11. Considérant que si l'administration a estimé, à tort, que l'intéressé était marié depuis moins de trois ans à la date de la décision en litige, cette circonstance de fait n'a pas eu d'incidence sur l'appréciation qu'a portée le préfet du Nord sur l'ensemble de la situation personnelle et familiale de M.D... ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au prononcé d'une injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., au ministre de l'intérieur et à Me A...C....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 4 février 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Hadi Habchi, premier conseiller.
Lu en audience publique le 25 février 2016.
Le rapporteur,
Signé : H. HABCHILe premier vice-président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°15DA00047 6