2°) d'annuler l'arrêté du 13 mars 2019 de la préfète de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et d'enregistrer sa demande d'asile dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement d'exécution n° 118/2014 de la commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 modifié notamment par le décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019 ;
- l'arrêté du 2 octobre 2018 portant régionalisation de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile dans la région Normandie ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... B..., présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant afghan né le 29 mars 1996, s'est présenté en préfecture de la Seine-Maritime le 7 janvier 2019 pour y demander l'asile. La consultation du système " Eurodac " a fait apparaître que ses empreintes digitales avaient été relevées en Italie, le 16 décembre 2018, à l'occasion d'une précédente demande de protection internationale. Une demande de reprise en charge a été adressée aux autorités italiennes le 31 janvier 2019, sur le fondement des dispositions du paragraphe 1 sous b) de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ou apatride. Constatant leur accord implicite à la reprise en charge de M. E..., la préfète de la Seine-Maritime a, par un arrêté du 13 mars 2019, prononcé le transfert de l'intéressé vers l'Italie. M. E... interjette appel du jugement du 24 avril 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en annulation de cette décision.
Sur le moyen tiré de l'incompétence :
2. Aux termes de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version issue du décret du 23 janvier 2019 relatif aux compétences des préfets en matière d'enregistrement de la demande d'asile et de mise en oeuvre des procédures relevant du règlement du 26 juin 2013, applicable en l'espèce : " Sans préjudice du second alinéa de l'article 11-1 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004, l'autorité compétente pour renouveler l'attestation de demande d'asile en application de l'article L. 742-1, procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, assigner à résidence un demandeur d'asile en application du 1° bis du I de l'article L. 561-2 et prendre une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. / (...) ". Aux termes de l'article 11-1 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, dans sa rédaction applicable au litige : " Le préfet de département est compétent en matière d'entrée et de séjour des étrangers ainsi qu'en matière de droit d'asile. / En matière d'asile, un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'asile peut donner compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police pour exercer ces missions dans plusieurs départements ".
3. En vertu de l'arrêté du 2 octobre 2018 portant régionalisation de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile dans la région Normandie, le préfet de la Seine-Maritime est l'autorité administrative compétente pour procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen des demandes d'asile enregistrées par le préfet du département de la Seine-Maritime ainsi que celles enregistrées par un autre préfet de département concernant des demandeurs domiciliés dans un département de la région Normandie, à compter du 1er octobre 2018 ainsi que, dans ce cadre, assigner à résidence les demandeurs d'asile, et prendre les décisions de transfert en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cet arrêté a été pris pour l'application des dispositions du 3ème alinéa de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, supprimées par l'article 4 du décret du 23 janvier 2019. Toutefois, pour la période postérieure à l'entrée en vigueur du décret du 23 janvier 2019, quand bien même l'arrêté du 2 octobre 2018 a été édicté en vertu du dernier alinéa de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, supprimé par le décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019 précité, les dispositions de cet alinéa figurent à l'article 11-1 du décret du 29 avril 2004 précité auquel renvoie le nouvel article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, M. E..., qui est domicilié dans le département de l'Eure, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait dépourvu de base légale. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète de la Seine-Maritime n'était pas compétente territorialement pour prendre une décision de transfert à son encontre, doit être écarté.
Sur les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen :
4. Les moyens tirés du défaut de motivation et du défaut d'examen personnalisé de la situation du requérant peuvent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
Sur les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article 4, du paragraphe 5 de l'article 5 et du paragraphe 3 de l'article 35 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, et du paragraphe 4 de l'article 5 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 :
5. Aux termes de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 2 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable (...) ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 (...) ; d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite (...) ; / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) ".
6. Aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil susévoqué : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national (...) ". Aux termes de l'article 35 de ce règlement : " 1. Chaque État membre notifie sans délai à la Commission les autorités chargées en particulier de l'exécution des obligations découlant du présent règlement et toute modification concernant ces autorités. (...) / (...) / 3. Les autorités visées au paragraphe 1 reçoivent la formation nécessaire en ce qui concerne l'application du présent règlement / (...) ". Aux termes de l'article 1er de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale : " La présente directive a pour objet d'établir des procédures communes d'octroi et de retrait de la protection internationale en vertu de la directive 2011/95/UE ". Aux termes de l'article 4 de la même directive : " 1. Les États membres désignent pour toutes les procédures une autorité responsable de la détermination qui sera chargée de procéder à un examen approprié des demandes conformément à la présente directive. (...) / 2. Les États membres peuvent prévoir qu'une autorité autre que celle mentionnée au paragraphe 1 est responsable lorsqu'il s'agit : / a) de traiter les cas en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 (...). / 4. Lorsqu'une autorité est désignée conformément au paragraphe 2, les États membres veillent à ce que le personnel de cette autorité dispose des connaissances appropriées ou reçoive la formation nécessaire pour remplir ses obligations lors de la mise en oeuvre de la présente directive (...) ".
7. D'une part, les dispositions du paragraphe 4 de l'article 4 de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, citées au point précédent, qui se bornent à prévoir que l'autorité compétente pour traiter les cas en vertu du règlement n° 604/2013 du même jour doit disposer des connaissances appropriées ou recevoir la formation nécessaire pour remplir ses obligations, n'appellent aucune mesure de transposition en droit interne. Le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment celles de l'article R. 742-1, seraient incompatibles avec les objectifs de cette directive. Par ailleurs, dès lors que cette directive a été transposée en droit interne, il ne saurait utilement se prévaloir de ces dispositions, à les supposer même claires et inconditionnelles, à l'encontre de la décision en litige.
8. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, que M. E... s'est vu remettre les brochures prévues par les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Il ressort également des pièces du dossier que l'appelant a bénéficié d'un entretien individuel dans les locaux de la préfecture de la Seine-Maritime le 7 janvier 2019. En l'absence de tout élément de nature à faire naître un doute sérieux sur ce point, il n'est pas établi que l'agent de la préfecture qui a mené cet entretien n'aurait pas été mandaté à cet effet après avoir bénéficié d'une formation appropriée et ne serait, par suite, pas une " personne qualifiée en vertu du droit national " au sens des dispositions citées au point précédent. Le requérant ne précise d'ailleurs pas en quoi l'agent de la préfecture n'aurait pas mené cet entretien conformément aux exigences prévues par le règlement du 26 juin 2013, ni en quoi la procédure de détermination de l'Etat responsable aurait été faussée en l'espèce compte tenu des conditions dans lesquelles cet entretien s'est déroulé. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doivent être écartés.
Sur la saisine des autorités italiennes :
9. Pour pouvoir procéder au transfert d'un demandeur d'asile vers un autre Etat membre en mettant en oeuvre ces dispositions du règlement, et en l'absence de dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile organisant une procédure différente, l'autorité administrative doit obtenir l'accord de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile avant de pouvoir prendre une décision de transfert du demandeur d'asile vers cet Etat. Une telle décision de transfert ne peut donc être prise, et a fortiori être notifiée à l'intéressé, qu'après l'acceptation de la prise en charge par l'Etat requis.
10. Le règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 portant modalités d'application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, a notamment créé un réseau de transmissions électroniques entre les Etats membres de l'Union européenne ainsi que l'Islande et la Norvège, dénommé " Dublinet ", afin de faciliter les échanges d'information entre les Etats, en particulier pour le traitement des requêtes de prise en charge ou de reprise en charge des demandeurs d'asile. Selon l'article 19 de ce règlement, chaque Etat dispose d'un unique " point d'accès national ", responsable pour ce pays du traitement des données entrantes et de la transmission des données sortantes et qui délivre un accusé de réception à l'émetteur pour toute transmission entrante. Selon l'article 15 de ce règlement : " Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre Etats membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement (...). / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national (...) est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse ". Le 2 de l'article 10 du même règlement précise que : " Lorsqu'il en est prié par l'Etat membre requérant, l'Etat membre responsable est tenu de confirmer, sans tarder et par écrit, qu'il reconnaît sa responsabilité résultant du dépassement du délai de réponse ".
11. Il résulte des dispositions citées ci-dessus du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 que la production de l'accusé de réception émis, dans le cadre du réseau Dublinet, par le point d'accès national de l'Etat requis lorsqu'il reçoit une demande présentée par les autorités françaises établit l'existence et la date de cette demande et permet, en conséquence, de déterminer le point de départ du délai de deux semaines au terme duquel la demande de reprise est tenue pour implicitement acceptée. Pour autant, la production de cet accusé de réception ne constitue pas le seul moyen d'établir que les conditions mises à la reprise en charge du demandeur étaient effectivement remplies. Il appartient au juge administratif, lorsque l'accusé de réception n'est pas produit, de se prononcer au vu de l'ensemble des éléments qui ont été versés au débat contradictoire devant lui, par exemple du rapprochement des dates de consultation du fichier Eurodac et de saisine du point d'accès national français ou des éléments figurant dans une confirmation explicite par l'Etat requis de son acceptation implicite de reprise en charge.
12. Il ressort des pièces versées en première instance par la préfète de la Seine-Maritime, que la demande de reprise en charge de M. E... par les autorités italiennes a été formée le 31 janvier 2019 par le réseau de communication " DubliNet ". La préfète de la Seine-Maritime produit, pour en justifier, la copie d'un courrier électronique du 31 janvier 2019 à 9h14 constituant l'envoi de la demande de reprise en charge aux autorités italiennes par la préfecture de la Seine-Maritime au point d'accès national français ainsi que la copie de la réponse automatique du point d'accès national français, émise le même jour à 13h17. Ces deux documents portent la référence " FRDUB29930220308-750 ", qui correspond au numéro attribué à M. E... par la préfecture. La préfète de la Seine-Maritime produit, en outre, les copies d'autres courriers électroniques du 20 février 2019 constituant l'envoi du constat d'accord implicite par la préfecture au point d'accès national français et la réponse automatique du point d'accès national français et comportant le même numéro de référence. Les mentions figurant sur ces accusés de réception édités automatiquement par le réseau de communication électronique " DubliNet ", permettent d'établir, conformément aux dispositions précitées au point 10, que les autorités italiennes ont bien été saisies d'une demande de reprise en charge concernant M. E..., ainsi que la date de leur accord implicite pour cette reprise en charge. Dès lors, en l'absence de tout élément de nature à introduire un doute sérieux quant à la transmission effective de ces pièces à l'Italie via le réseau de transmissions électroniques Dublinet, le moyen tiré de ce que la demande de reprise en charge adressée aux autorités italiennes n'aurait pas été effectuée dans les conditions prévues à l'article 23 règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
Sur les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, des articles 3 et 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
13. En premier lieu, aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable ". Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
14. L'Italie étant membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime aurait à tort considéré que cette présomption était irréfragable. M. E... ne produit, en outre, que des documents généraux concernant les demandeurs d'asile en Italie, mais aucun élément propre à sa situation particulière, dont il résulterait que son dossier ne serait pas traité par les autorités italiennes dans des conditions répondant à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Enfin, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en cas de rejet de cette demande, les autorités italiennes procéderaient à son renvoi vers l'Afghanistan sans examiner au préalable s'il y serait soumis à des risques pour sa vie ou sa sécurité ou de subir des traitements inhumains ou dégradants. Par suite, en décidant de prononcer le transfert de M. E... vers l'Italie, la préfète de la Seine-Maritime n'a méconnu ni les dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, enfin, celles de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne.
Sur les autres moyens :
15. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". La faculté qu'ont les autorités françaises d'examiner une demande d'asile présentée par un ressortissant d'un Etat tiers, alors même que cet examen ne leur incombe pas, relève de l'entier pouvoir discrétionnaire du préfet, et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.
16. M. E... n'apporte aucun élément nouveau en appel sur sa situation familiale et personnelle en France alors qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige que la préfète de la Seine-Maritime, qui a notamment relevé que l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant la situation du requérant ne relevait pas des dérogations prévues par l'article 17 du règlement précité, a effectivement pris en compte la possibilité que la France examine la demande d'asile de l'intéressé alors même qu'elle n'en était pas responsable. Dès lors, en ne mettant pas en oeuvre la procédure dérogatoire prévue par les dispositions précitées de l'article 17 du règlement (UE) du 26 juin 2013 précité, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais liés au litige doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
rticle 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie adressée au préfet de la Seine-Maritime.
N°19DA01153 2