Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 juillet 2021, Mme D..., représentée par Me Antoine Tourbier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté de la préfète de la Somme du 8 janvier 2021 ;
2°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 500 euros à verser à son conseil qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... D..., ressortissante marocaine née le 31 décembre 1960, est entrée en France le 3 juin 2001, munie d'un visa de court séjour. Le 12 novembre 2019, elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour pour soins auprès de la préfecture de la Somme. Par un arrêté du 8 janvier 2021, la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D... relève appel du jugement du 9 juin 2021 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. Aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors en vigueur : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ". Aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour composée : / a) D'un maire ou de son suppléant désignés par le président de l'association des maires du département ou, lorsqu'il y a plusieurs associations de maires dans le département, par le préfet en concertation avec celles-ci et, à Paris, du maire, d'un maire d'arrondissement ou d'un conseiller d'arrondissement ou de leur suppléant désigné par le Conseil de Paris ; / b) De deux personnalités qualifiées désignées par le préfet ou, à Paris, le préfet de police. / Le président de la commission du titre de séjour est désigné, parmi ses membres, par le préfet ou, à Paris, le préfet de police. (...) ".
3. Mme D... réitère en appel le moyen tiré du vice de procédure en ce que l'avis de la commission du titre de séjour réunie le 30 novembre 2020 n'est signé que de son président et que ladite commission serait irrégulièrement composée. Toutefois, elle ne produit aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ce moyen qu'elle ne précise pas davantage. Par suite, il y a lieu de l'écarter en ces deux branches par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges aux points 3 à 6 du jugement attaqué.
4. S'il ressort des pièces du dossier que Mme D... souffre d'un syndrome de Sheehan qui nécessite un traitement hormonal régulier, les documents médicaux qu'elle produits, qui établissent seulement la pathologie dont elle est atteinte et le traitement administré, ne donnent aucune indication quant à l'impossibilité d'en bénéficier au Maroc, notamment quant à la disponibilité des médicaments qui lui sont prescrits. D'autre part, la commission du titre de séjour en date du 30 novembre 2020 a émis un avis défavorable à son admission au séjour notamment en ce que l'intéressée, qui se déclare présente en France depuis dix-neuf ans, ne justifie pas de son intégration. Il n'est pas contesté à cet égard que lors d'un entretien d'assimilation linguistique le 30 juin 2020 au bureau des étrangers à la préfecture de la Somme, il est apparu qu'elle ne comprend pas et ne parle pas le français. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Somme a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Mme D... soutient qu'elle est entrée en France en 2001, vit depuis chez le frère de son ex-époux, M. A... B... et qu'elle est très proche des petits-enfants de ce dernier dont elle indique s'occuper au quotidien comme une grand-mère. Toutefois, Mme D..., qui est célibataire et sans enfant, ne justifie pas de la nécessité de sa présence à leurs côtés, alors qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales au Maroc où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans. Dans ces circonstances, et alors que Mme D..., qui ne parle pas le français, n'apporte aucun élément quant à son insertion dans la société française, la préfète de la Somme n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la mesure a été prise.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., au ministre de l'intérieur et à Me Antoine Tourbier.
Copie sera adressée à la préfète de la Somme.
N°21DA01591 2