Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 juin 2015, la SARL Pierre Lelong Service, représentée par Me A...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 23 avril 2015 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le contrat de location d'une coupeuse transversale conclu le 23 juin 1998 avec la société Loxxia Multibail constitue un contrat de location financière car il ne comporte aucune promesse unilatérale de vente et prévoit à la fin de la location sa restitution ; la circonstance que la valeur résiduelle de ce bien de 5 % ait été mentionnée dans un courrier du 19 juin 1998 ne permet pas d'en déduire qu'il existait une option d'achat à la fin du contrat de location ;
- le contrat en cause n'étant pas un contrat de crédit-bail, le prix de revient du bien concerné à inclure dans l'assiette de la taxe professionnelle doit être déterminé à partir de sa valeur inscrite à l'actif du bilan de l'entreprise, soit la somme de 24 245 euros.
Par un mémoire, enregistré le 23 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- il s'agit d'un contrat de crédit-bail et de location financière car le locataire a la possibilité d'acquérir ce bien moyennant un prix convenu tenant compte, pour partie, des versements effectués à titre de loyer, comme cela ressort d'un courrier du 19 juin 1998 antérieur à la signature du contrat ; dès lors, le prix de revient du bien concerné à inclure dans l'assiette de la taxe professionnelle est celui mentionné dans le contrat de location, soit la somme de 482 937 euros et non le prix d'achat figurant à l'actif du bilan de l'entreprise.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code monétaire et financier ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère,
- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.
1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 de la SARL Pierre Lelong Service, qui exerce une activité de commerce en gros de papier, l'administration a mis à la charge de la SARL précitée des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre des années 2008 et 2009 ; que la SARL Pierre Lelong Service relève appel du jugement du 23 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions contestées ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier : " Les opérations de crédit-bail mentionnées par la présente sous-section sont : 1. Les opérations de location de biens d'équipement ou de matériel d'outillage achetés en vue de cette location par des entreprises qui en demeurent propriétaires, lorsque ces opérations, quelle que soit leur qualification, donnent au locataire la possibilité d'acquérir tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers)(... " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " La taxe professionnelle a pour base : / 1° (...) a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A, 1518 A bis et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence (...) " ; qu'aux termes des dispositions, alors en vigueur, de l'article 1469 du même code : " La valeur locative est déterminée comme suit : / 3° Pour les autres biens, lorsqu'ils appartiennent au redevable, lui sont concédés ou font l'objet d'un contrat de crédit-bail mobilier, la valeur locative est égale à 16 % du prix de revient ; / Lorsque ces biens sont pris en location, la valeur locative est égale au montant du loyer au cours de l'exercice sans pouvoir différer de plus de 20 % de celle résultant des règles fixées au premier alinéa ; les biens donnés en location sont imposés au nom du propriétaire lorsque la période de location est inférieure à six mois ; il en est de même si le locataire n'est pas passible de la taxe professionnelle ou n'a pas la disposition exclusive des biens loués (...) " ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un contrat conclu le 23 juin 1998, la société Loxxia Multibail a consenti à la SARL Pierre Lelong Service la location d'une coupeuse à carton, pour une durée de soixante mois ; qu'à l'issue de cette période de location, la SARL Pierre Lelong Service a procédé à l'acquisition de ce matériel pour un prix correspondant à sa valeur résiduelle, égale à 5 % du prix de revient initial ; que si ce contrat prévoyait, en son article 8, la restitution du matériel loué en fin de période de location, ces seules conditions générales ne permettent toutefois pas d'établir que la SARL requérante était tenue par une obligation en ce sens ; que d'ailleurs, le contrat souscrit par la SARL Pierre Lelong Service, bien que ne comportant pas de clause expresse d'option d'achat, a prévu la possibilité d'acquérir ce matériel en fin de période de location moyennant un montant qui tient compte des versements effectués à titre de loyers pendant cette période, comme cela ressort de la lettre du 19 juin 1998 de la société Loxxia Multibail adressée à la SARL Pierre Lelong Service, se référant au dernier entretien téléphonique des futurs co-contractants, qui précise les termes du contrat et fixe en particulier la valeur résiduelle finale du bien en cause à 5 % ; que la commune intention des parties a ainsi été, quelques jours avant la signature du contrat, de permettre au locataire, sous la seule condition du prix convenu, de se porter acquéreur du matériel loué ; que l'opération en litige, quelle que soit la qualification donnée par les parties au contrat, constituait une opération de crédit-bail mobilier au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier ; que par suite, l'administration était fondée à inclure dans l'assiette de la taxe professionnelle, le prix de revient du bien concerné mentionné dans le contrat ainsi conclu, soit la somme de 482 937 euros et non le prix d'achat figurant à l'actif du bilan de l'entreprise pour un montant de 24 245 euros, conformément aux dispositions combinées des articles 1467 et 1469 du code général des impôts précités ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Pierre Lelong Service n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Pierre Lelong Service est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Pierre Lelong Service et au ministre de l'économie et des finances.
Copie sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction de contrôle fiscal Ile-de-France.
Délibéré après l'audience publique du 14 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Muriel Milard, première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 mars 2017.
Le rapporteur,
Signé : M. C...Le président-assesseur,
Signé : M. D...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA01077