Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2014, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300015 du 22 avril 2014 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;
2°) de rejeter la demande présentée par le B...de développement des archipels et la Polynésie française devant le Tribunal administratif de la Polynésie française.
Il soutient que :
- le B...de développement des archipels, qui tenait sa qualification d'établissement public et commercial d'un acte réglementaire, était en réalité un établissement public à caractère administratif, compte tenu de son activité principale et de la part des subventions publiques dans ses ressources, de sorte que le Tribunal administratif de la Polynésie française était compétent pour connaître du litige, qui concerne des agents publics contractuels ;
- la convention du 27 août 2008 stipule que la trésorerie générale de la Polynésie française est exonérée du remboursement de la rémunération des agents mis à sa disposition, ce qui fait obstacle aux prétentions du B...de développement des archipels et de la Polynésie française ;
- à titre subsidiaire, il entend opposer la prescription quadriennale à la créance du B...de développement des archipels, s'agissant des années 2008 et 2009.
Par un mémoire, enregistré le 29 avril 2016, la Polynésie française, venant aux droits et obligations du B...de développement des archipels, représentée par MeD..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300015 du 22 avril 2014 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 12 763 500 F CFP correspondant aux salaires nets payés à Mme A...entre le 28 juillet 2009 et le 3 octobre 2012 majorés des charges sociales supportées par l'employeur et la somme globale de 25 285 912 F CFP correspondant aux salaires nets payés à Mme C...entre le 1er juillet 2008 et le 3 octobre 2012 majorés des charges sociales supportées par l'employeur ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le Tribunal des conflits ayant jugé que le B...de développement des archipels était un établissement public à caractère administratif et le litige opposant deux personnes publiques, la juridiction administrative est compétente pour en connaître ;
- le tribunal du travail ayant jugé que Mme C...et Mme A...étaient liées à la trésorerie générale de Polynésie française par un contrat à durée indéterminée, il appartient à l'Etat de lui rembourser la rémunération payée à ces agents.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française et la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jardin,
- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public.
1. Considérant que le B...de développement des archipels, établissement public initialement créé par la délibération n° 84-41 de l'assemblée territoriale de la Polynésie française sous le nom de B...d'entraide aux îles, a recruté comme aides comptables Mme C..., par un contrat à durée indéterminée signé le 1er mars 2004, et MmeA..., par un contrat à durée indéterminée signé le 27 décembre 2006 ; qu'après la nomination à compter du 1er janvier 2008 du trésorier des établissements publics en qualité d'agent comptable du B...de développement des archipels, cet établissement public a conclu le 27 août 2008 avec la Trésorerie générale de Polynésie française une convention de mise à disposition à compter du 1er juillet 2008 de deux de ses agents, parmi lesquels MmeC... ; qu'un avenant n° 1 à cette convention, signé le 11 août 2009, a mis Mme A...à disposition de la Trésorerie générale de Polynésie française à compter du 28 juillet 2009 ; que le tribunal du travail de Papeete, par deux jugements du 3 octobre 2012, a fait droit aux demandes de Mme C...et de Mme A...tendant à ce que soit reconnue l'existence d'un contrat à durée indéterminée les liant à la Trésorerie générale de Polynésie française à compter de la date de leur mise à disposition ; qu'à la suite de ces jugements, le B...de développement des archipels, alors en liquidation, par un courrier daté du 26 décembre 2012 reçu le 7 janvier 2013, a vainement demandé à la Trésorerie générale de Polynésie française de lui rembourser les salaires versés à ces deux agents depuis leur mise à disposition, majorés des charges sociales supportées par l'employeur ; qu'au cours de l'instance introduite par l'établissement public devant le Tribunal administratif de la Polynésie française pour obtenir le remboursement des ces sommes, la Polynésie française, se présentant comme venant aux droits et obligations de ce dernier, est intervenue pour soumettre les mêmes prétentions à la juridiction ; que le Tribunal administratif de la Polynésie française, par le jugement que conteste le ministre des finances et des comptes publics, a décliné la compétence de la juridiction administrative ;
2. Considérant que le B...de développement des archipels, en dépit de sa qualification d'établissement public industriel et commercial par ses statuts, avait la qualité d'établissement public administratif compte tenu des missions, des ressources et de l'organisation qui étaient, en réalité, les siennes, comme l'a d'ailleurs jugé le Tribunal des conflits, dans ses deux décisions n° 4003 et n° 4005 du 9 mars 20015, annulant les deux déclinatoires de compétence du haut-commissaire de la République en Polynésie française transmis à la Cour d'appel de Papeete dans les litiges dont elle avait été saisie par l'agent judiciaire de l'Etat à la suite des deux jugements du 3 octobre 2012 du tribunal du travail et comme ne le conteste au demeurant pas la Polynésie française en appel ; que Mme C...et Mme A...étaient par suite des agents publics non titulaires relevant d'un statut de droit public et le sont restées, dans leur relation avec l'établissement public, même après leur mise à disposition ; que le litige concernant la charge définitive de leur rémunération, opposant un établissement public administratif à l'Etat, relevait dès lors de la compétence de la juridiction administrative, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif de la Polynésie française ; que le ministre des finances et des comptes publics est ainsi fondé à demander à la Cour d'annuler ce jugement ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la Polynésie française, venant aux droits et obligations du B...de développement des archipels, dont les opérations de liquidation n'ont pas été prolongées au-delà du 30 septembre 2013 ;
4. Considérant qu'en vertu de l'article 2 de la convention de mise à disposition du 27 août 1988, dont les stipulations demeurent... ; que, par suite, la Polynésie n'est pas fondée à demander à la Cour de condamner l'Etat à lui verser les sommes qu'elle réclame ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que celles du B...de développement des archipels ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1300015 du 22 avril 2014 du Tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le B...de développement des archipels et par la Polynésie française devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ainsi que les conclusions d'appel de la Polynésie française présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et au gouvernement de la Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 mars 2017.
L'assesseur le plus ancien,
D. DALLELe président-rapporteur
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA03311