Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 mars 2018, le préfet du Nord, représenté par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Lille.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., ressortissant afghan, qui déclare être entré en France en 2017, a été reçu par le centre d'examen de situation administrative de la préfecture de police de Paris et a déposé en septembre 2017 auprès du préfet du Nord une demande d'asile. La consultation du fichier " Eurodac " a révélé que les empreintes digitales de l'intéressé avaient été enregistrées en Autriche en tant que demandeur d'asile. Le préfet du Nord a saisi les autorités autrichiennes d'une demande de reprise en charge, en application de l'article 18.1. b) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 19 janvier 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 8 janvier 2018 ordonnant le transfert de M. D...aux autorités autrichiennes et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".
3. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur le motif d'annulation retenu par le premier juge :
4. Aux termes de l'article 26 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Lorsque l'Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'Etat membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'Etat membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale... ". Pour pouvoir procéder au transfert d'un demandeur d'asile vers un autre Etat membre en mettant en oeuvre le 1 de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, et en l'absence de dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile organisant une procédure différente, l'autorité administrative doit obtenir l'accord de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile avant de pouvoir prendre une décision de transfert du demandeur d'asile vers cet Etat.
5. Pour annuler la décision de transfert en litige, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille s'est fondé sur le fait que la décision contestée fait mention d'un accord des autorités autrichiennes du 29 septembre 2017, lequel n'était pas produit en première instance. Il a relevé également que M. D...produisait, quant à lui, un refus des autorités autrichiennes de reprise en charge daté du 24 octobre 2017 faisant état d'une précédente réponse explicite du 29 septembre 2017 à la requête des autorités françaises, dont le sens n'était toutefois pas précisé. En cause d'appel, si le préfet justifie de l'accord explicite donné par les autorités autrichiennes le 11 août 2017 à une demande de reprise en charge que leur avait adressé le préfet de police de Paris, il ne produit toujours pas la réponse du 29 septembre 2017 donnée par les autorités autrichiennes à sa propre demande de reprise en charge et se borne à soutenir, sans le justifier, que les autorités autrichiennes auraient seulement indiqué, à cette date, qu'un premier accord avait déjà été transmis à la préfecture de police le 11 août 2017. Il n'établit donc pas que le refus de reprise en charge du 24 octobre 2017 serait uniquement motivé par l'existence d'un accord déjà donné le 11 août 2017. Dans ces conditions, le préfet du Nord n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté au motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 26 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 8 janvier 2018.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : M. D...est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : La requête du préfet du Nord est rejetée.
Article 3 : L'Etat versera à Me B...E..., conseil de M.D..., sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat, la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...D... , au ministre de l'intérieur et à Me B...E....
Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.
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N°18DA00575
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N°"Numéro"