Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 juin 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 31 mars 2015 du tribunal administratif de Lille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 août 2013 du préfet du Nord ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros à verser à Me B...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il soutient que :
- la décision de refus d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de fait ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation du préfet au regard notamment des prescriptions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;
- l'illégalité de la décision de refus de séjour a pour conséquence l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire a pour conséquence l'illégalité de la décision fixant le pays de destination.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2015, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi, fait à Rabat le 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain, relève appel du jugement du 31 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 août 2013 du préfet du Nord rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, comme l'a relevé le préfet dans la décision contestée, M. C...ne justifiait pas d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes en méconnaissance de la règle posée à l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 précité ; que le préfet du Nord pouvait se fonder uniquement sur ce motif pour prendre la décision contestée ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était uniquement fondé sur ce motif ; que, dès lors, le motif surabondant et erroné en fait que constitue l'absence de justification par l'intéressé d'une période d'emploi d'au moins huit mois sur les douze derniers mois doit être neutralisé ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait du préfet du Nord doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, par suite, le moyen de M. C...tiré de ce que le préfet aurait méconnu l'article L. 313-14 de ce code en y ajoutant une condition tirée de la production d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, et alors qu'il ne ressort pas de l'arrêté contesté que le préfet se serait fondé sur un tel fondement, est inopérant ;
5. Considérant que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation au profit d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ; qu'en l'occurrence et en dépit de la justification par M.C..., d'une période d'emploi de deux années allant de janvier 2011 à décembre 2012, d'une demande d'autorisation de travail souscrite par la société Facefood, rejetée après instruction par le service compétent, de trois années de présence en France à la date de l'arrêté contesté, ainsi que la présence en France d'une soeur, d'un oncle et d'une cousine, sans pour autant justifier être isolé dans son pays d'origine, le préfet du Nord n'a pas entaché la décision contestée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que M. C...ne peut en outre, en tout état de cause, se prévaloir utilement des orientations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui, destinées seulement à éclairer les préfets dans la mise en oeuvre de leur pouvoir discrétionnaire de régularisation, ne sont pas invocables à l'appui du recours dirigé contre un refus de titre de séjour ;
Sur les décisions faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :
6. Considérant que compte tenu de ce qui a été dit au point 3 et au point 5, M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire et celle fixant le pays de destination de cette mesure seraient illégales en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus d'un titre de séjour ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 28 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 11 février 2016.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : J.-J. GAUTHELe président de chambre,
président rapporteur,
Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,
Signé : B. LEFORT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Béatrice Lefort
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N°15DA00988
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