Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 mai 2016 et le 18 janvier 2017, M. A..., représenté par Me A... -H...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 15 mars 2016 ;
2°) de condamner la commune de Pecquencourt à lui verser les sommes de 45 032,20 euros, à titre de réparation du préjudice représentatif de la perte de traitement qu'il a subie, et de 6 000 euros, à titre de réparation de son préjudice moral, ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2013 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Pecquencourt la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 ;
- le décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de M.A..., ainsi que celles de Me D...G..., substituant Me C...F..., représentant la commune de Pecquencourt.
1. Considérant que le maire de la commune de Pecquencourt (Nord) a souhaité recruter M.A..., par ailleurs maire de Neuville-sur-Escaut, afin d'exercer, à compter du 1er février 2009, des fonctions de collaborateur de cabinet ; que, le conseil municipal de Pecquencourt ayant toutefois refusé, par une délibération du 23 septembre 2008, la création d'un tel poste, le maire a cependant recruté M. A...en tant que stagiaire, par un arrêté du 10 février 2009, sur un poste d'adjoint administratif de 2ème classe laissé vacant par la mutation de son titulaire au centre communal d'action sociale, M. A...s'étant, toutefois, vu octroyer, non l'indice brut 297 alors attribué aux adjoints administratifs de 2ème classe relevant du premier échelon de leur grade, en application de l'article 8 du décret statutaire du 22 décembre 2006, mais un indice brut de 479, comme en témoignent les bulletins de paie versés à l'instruction ; que, toutefois, à la suite de la démission de plus d'un tiers du conseil municipal à l'été 2009, des élections ont été organisées les 27 septembre et 4 octobre 2009 et ont abouti à l'installation d'une nouvelle équipe municipale ; que, le maire nouvellement élu ayant estimé n'avoir pas disposé d'un délai suffisant pour apprécier des aptitudes de M. A...à exercer ses fonctions, il a décidé de proroger son stage d'une durée de six mois supplémentaires, courant du 1er février 2010, date de fin initialement prévue, au 31 juillet 2010 ; qu'il est, dans le même temps, apparu au conseil municipal qu'eu égard à la taille de la commune et compte-tenu des moyens financiers dont elle disposait, le maintien de l'emploi de collaborateur de cabinet occupé par M. A...ne se justifiait pas ; qu'ainsi, après avoir recueilli l'avis du comité technique paritaire compétent, le conseil municipal a décidé, par une délibération du 22 juillet 2010, de supprimer cet emploi ; que M. A... a, en conséquence, été licencié au 1er août 2010, par un arrêté du maire de Pecquencourt du 26 juillet 2010, qui a été annulé, à sa demande, par un jugement du tribunal administratif de Lille du 4 décembre 2012, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 4 février 2014 ; que M.A..., qui a recherché depuis lors la responsabilité de la commune de Pecquencourt, relève appel du jugement du 15 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande, tendant à la condamnation de cette commune à réparer, par le versement d'une somme totale de 51 032,10 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2013, le préjudices qu'il indique avoir subis à la suite de son licenciement illégal ;
2. Considérant qu'en principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité ; qu'il en est notamment ainsi lorsque le juge de l'excès de pouvoir a annulé, pour un motif de légalité interne, une décision de l'administration ; qu'il en va toutefois autrement lorsque l'administration aurait pu prendre la même décision si elle n'avait pas commis l'illégalité censurée par le juge de l'excès de pouvoir ; qu'en outre, la responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment ;
3. Considérant que, pour annuler l'arrêté du 26 juillet 2010 par lequel le maire de Pecquencourt a décidé de licencier M.A..., en raison de la suppression du poste qu'il occupait, la cour administrative d'appel de Douai s'est, par son arrêt du 4 février 2014, fondée sur le motif tiré de ce qu'il ne ressortait pas des pièces versées au dossier qu'il n'existait pas, au sein des services de la commune, d'autre emploi d'adjoint administratif de 2ème classe susceptible d'accueillir l'intéressé ;
4. Considérant que l'autorité absolue de chose jugée attaché à l'arrêt cité au point précédent ne fait pas obstacle à ce que, dans le cadre de son office, le juge de plein contentieux saisi d'une demande indemnitaire apprécie, au vu des éléments versés à l'instruction, l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre l'illégalité fautive censurée par cet arrêt et les préjudices dont M. A...demande la réparation ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de plusieurs tableaux produits par la commune de Pecquencourt devant les premiers juges, qui présentent un état de son personnel au 1er janvier 2010, ainsi que l'évolution des effectifs de ses agents du 1er janvier 2009 au 1er janvier 2013, qu'à la date du 22 juillet 2010, à laquelle le conseil municipal a délibéré sur la suppression du poste occupé par M.A..., les effectif communaux comptaient quatre emplois budgétaires d'adjoint administratif de 2ème classe et que l'ensemble de ces postes était pourvu ; qu'il ressort, en outre, des mêmes documents, que la suppression du poste sur lequel M. A...avait été recruté a conduit à ramener à trois le nombre de ces emplois budgétaires et qu'aucun autre emploi d'adjoint administratif de 2ème classe n'a, par la suite, été créé ; qu'il suit de là qu'alors même que la commune de Pecquencourt n'en avait pas justifié devant le juge de l'excès de pouvoir, il est apparu, au cours de l'instruction conduite dans le cadre du présent litige indemnitaire, que M. A...n'aurait pu bénéficier effectivement, à la date de son licenciement, d'un reclassement au sein des effectifs de la commune de Pecquencourt ; qu'au demeurant, il ne résulte d'aucune disposition ni d'aucun principe que les fonctionnaires stagiaires, qui se trouvent dans une situation probatoire et provisoire, pourraient se prévaloir d'un droit à être reclassés dans l'attente d'une titularisation en cas de suppression de leur emploi ; qu'ainsi, les préjudices dont M. A...demande la réparation et dont la réalité n'est d'ailleurs pas établie, ne trouvent pas leur origine directe et certaine dans l'illégalité censurée par l'arrêt mentionné au point 3 ; qu'au surplus, l'intéressé, qui a nécessairement contribué à son recrutement illégal par l'ancien maire de Pecquencourt, dans les conditions précisées au point 1, ne peut sérieusement rechercher la responsabilité de la commune pour avoir pris des mesures propres à remédier à cette illégalité ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'il présente au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.A..., sur le fondement des mêmes dispositions, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Pecquencourt et non compris dans les dépens ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros " ; qu'en l'espèce, la requête de M. A...présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu de condamner M. A...à payer une amende de 3 000 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : M. A...est condamné à payer une amende de 3 000 euros.
Article 3 : M. A...versera à la commune de Pecquencourt la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...A..., à la commune de Pecquencourt et au directeur départemental des finances publiques du Nord.
Copie en sera adressée, pour information, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Douai et au procureur financier près la Chambre régionale des comptes des Hauts-de-France.
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