Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 mars 2018 et le 28 mai 2018, le préfet de l'Eure demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 février 2018 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) de rejeter la demande de MmeC... ;
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante de la république démocratique du Congo, née le 8 octobre 1989, est entrée irrégulièrement en France le 3 novembre 2013. Par un arrêté notifié le 22 août 2017, le préfet de l'Eure lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour d'un an délivré sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Le préfet de l'Eure relève appel du jugement du 22 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté notifié le 22 août 2017 et lui a enjoint de délivrer à Mme C...une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Mme C...a vu ses demandes d'asile rejetées le 28 novembre 2014 par l'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA) et le 8 décembre 2015 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Elle a bénéficié le 13 janvier 2016 d'un titre de séjour d'un an " étranger malade ", suite à un avis favorable du 19 février 2016 du médecin de l'agence régionale de santé, alors compétent. Elle a suivi, du 5 décembre 2016 au 31 mars 2017, une formation d'assistante de vie aux familles et a travaillé douze jours à temps plein en juin 2017 et puis à temps partiel en juillet et août 2017. MmeC..., mère d'une enfant de nationalité congolaise, née en France le 21 août 2014, n'établit toutefois ni la réalité de liens stables, anciens et intenses en France, ni être isolée dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans. Elle affirme ne pas entretenir de relations avec le père de l'enfant dont le pays de résidence n'est pas connu. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de MmeC..., l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet de l'Eure est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a, pour ce motif, annulé son arrêté notifié le 22 août 2018.
3. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de Mme C...devant la juridiction administrative.
Sur le moyen commun aux décisions contestées :
4. Les décisions contestées visent les textes dont il est fait application et comportent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent. Elles sont, ainsi, suffisamment motivées.
Sur le refus de titre de séjour :
5. Le préfet de l'Eure a produit devant le tribunal administratif l'avis du 7 juillet 2017 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a estimé que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont elle est originaire, celle-ci peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Le moyen tiré de l'illégalité de la procédure suivie doit être écarté.
6. La circonstance que la fille de Mme C...soit scolarisée en France en école maternelle ne constitue pas un motif d'admission exceptionnelle au séjour. En dépit d'une erreur en ce qui concerne l'activité professionnelle de l'intimée, activité limitée à douze jours à temps plein, en juin 2017, puis à temps partiel en juillet et août 2017, ainsi qu'il a été dit au point 2, le préfet de l'Eure n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation, au regard de l'ensemble de la situation de MmeC..., en lui refusant une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention de l'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité
8. Ainsi qu'il a été dit au point 5, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que celle-ci peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. L'intimée ne produit aucun élément, médical ou autre, de nature à contredire l'avis précité du collège des médecins de l'OFII et à démonter l'erreur d'appréciation qu'aurait commis le préfet de l'Eure. Ainsi, en refusant de délivrer à Mme C...le titre de séjour sollicité, cette autorité n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
9. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la décision contestée du préfet de l'Eure n'a pas n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.
Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
10. Il résulte de ce qui précède que Mme C...ne peut soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
11. Ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 8, le préfet a produit l'avis du 7 juillet 2017 du collège des médecins de l'OFII qui établit que l'état de santé de Mme C...lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Le moyen tiré du défaut de saisine de ce collège et de l'impossibilité de voyager pour l'intimée doit être écarté.
12. Ainsi qu'il a été dit aux point 2 et 9, la décision contestée du préfet de l'Eure n'a pas n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.
Sur la décision fixant le pays de destination :
13. Mme C...ne produit aucun élément au soutien de ses allégations quant aux risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine. Elle ne démontre pas la réalité de risques personnels, directs et certains. Au demeurant, ainsi qu'il a été dit au point 2, sa demande d'asile a été rejetée le 28 novembre 2014 par l'OFPRA et le 8 décembre 2015 par la CNDA. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Eure est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté notifié le 22 août 2017. Par voie de conséquence, les conclusions de Mme C...à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 22 février 2018 du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme D...et à Me A...B....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de l'Eure.
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N°18DA00623
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