Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 août et 24 septembre 2018, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 juin 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Lille.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 26 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant algérien né le 13 mars 1991, serait rentré sur le territoire français au cours de l'année 2015. Par un arrêté du 15 juin 2018, le préfet du Pas-de Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un second arrêté du même jour, le préfet du Pas-de-Calais l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 22 juin 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé ces arrêtés du 15 juin 2018.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., de nationalité algérienne, entré sur le territoire français en 2015 selon ses déclarations, muni d'un passeport revêtu d'un visa de tourisme délivré par les autorités maltaises valable quinze jours entre le 23 juillet 2015 et le 21 août 2015, n'a effectué, avant l'intervention de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, aucune démarche en vue de régulariser sa situation administrative. Le préfet du Pas-de-Calais n'a appris le caractère irrégulier de son séjour en France que le 15 juin 2018 à la suite de son audition par les services de police sur réquisition du parquet d'Arras dans le cadre d'une enquête réalisée à la suite d'un signalement effectué en mai 2018 par le maire de la commune d'Arras sur le fondement de l'article 175-2 du code civil. Si le mariage de M. B... avec une ressortissante française était initialement prévu pour le 16 juin 2018, il ressort des pièces du dossier que le procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Arras avait informé cette ressortissante, par lettre du 1er juin 2018, qu'il décidait de surseoir à la célébration de ce mariage et de diligenter une enquête. M. B...a donc été entendu par les services de police dans la matinée du 15 juin 2018 sur son mariage, puis à propos de la régularité de son séjour. Il ressort des pièces du dossier que la décision du procureur de la République de s'opposer au mariage n'avait pas encore été prise, celle-ci n'étant intervenue que le 29 juin 2018. La décision obligeant M. B...à quitter le territoire français doit ainsi être regardée non comme ayant eu pour motif déterminant de s'opposer à l'union projetée, mais comme ayant pour objet de mettre un terme à la présence irrégulière de l'intéressé sur le territoire national. Par suite, le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé, comme entaché d'un détournement de pouvoir, la décision obligeant M. B...à quitter le territoire et, par voie de conséquence, les décisions subséquentes ainsi que l'arrêté l'assignant à résidence.
3. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant la juridiction administrative.
Sur le moyen commun aux décisions contenues dans les deux arrêtés du 15 juin 2018 :
4. Par un arrêté du 18 décembre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 121 du même jour, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation à M. D... C..., chef du bureau du contentieux du droit des étrangers, à l'effet de signer, notamment, des obligations de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, des décisions fixant les pays de destination, les interdictions de retour sur le territoire français ainsi que les décisions d'assignation à résidence. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées doit être écarté.
Sur la légalité de la décision obligeant à quitter le territoire :
5. M. B...déclare résider en France depuis 2015 et vivre en concubinage, depuis décembre 2017, avec une ressortissante française qu'il souhaite épouser. Toutefois, à supposer même que la relation avec cette dernière soit réelle, celle-ci est en tout état de cause très récente à la date de la décision en litige. M. B...ne justifie par ailleurs d'aucune insertion sociale ou professionnelle. Par suite, compte tenu des conditions de son séjour en France et de sa durée, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant.
6. Il résulte de ce qui a été dit du point 2 à 5 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
7. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
9. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la décision d'assignation à résidence :
10. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé ses arrêtés du 15 juin 2018.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 22 juin 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....
Copie en sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.
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N°18DA01635