Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 octobre 2018, M. B...D..., représenté par Me C...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 9 janvier 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un certificat de résidence algérien en qualité d'étranger malade d'une durée d'un an dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation par ledit conseil au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...D..., ressortissant algérien né le 22 janvier 1976, serait selon ses déclarations entré en France le 4 janvier 2011, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa type C, délivré le 27 décembre 2010 par le consulat d'Espagne en Algérie, valable trente jours du 27 décembre 2010 au 26 janvier 2011. Le 21 mars 2011, il a sollicité l'asile politique et les autorités espagnoles ont accepté sa reprise en charge qui a fait l'objet d'un rejet de sa demande d'asile le 6 juin 2011. Il a ensuite fait l'objet d'une mesure d'éloignement, après son interpellation le 24 février 2012. Le 14 juin 2013, il a sollicité un titre de séjour en tant qu'accompagnant de sa soeur malade. Par un arrêté du 26 juin 2014, il a encore fait l'objet d'une mesure d'éloignement. Le 31 janvier 2017, il a de nouveau sollicité un titre de séjour, en faisant valoir que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale en France. Par un arrêté du 9 janvier 2018, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. D...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des informations fournies par le préfet du Nord, que l'avis du 21 mars 2017 concernant la situation médicale de M. D...a été rendu par trois médecins, dont le nom est indiqué, qui ont été désignés pour participer au collège de médecins à compétence nationale par une décision du directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 17 janvier 2017. Le préfet produit en outre au dossier une attestation de la directrice générale adjointe de l'OFII du 18 janvier 2019 indiquant le nom du médecin qui a établi le rapport médical sur la situation du requérant, dont il ressort qu'il ne s'agissait pas d'un des trois membres du collège de l'OFII. Par suite, l'avis n'a pas été rendu en méconnaissance des dispositions de l'article R. 313-22 et de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile rappelées au point 2.
4. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français, doit être écarté.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. M. D...fait valoir qu'il réside en France depuis 2011 et qu'il y bénéficie de la présence de ses deux parents et d'une de ses soeurs en France, en situation régulière. Il soutient aussi que sa présence est primordiale pour sa soeur malade, initialement prise en charge par son époux mais qui est maintenant en procédure de divorce. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dans l'impossibilité de recourir à l'assistance d'une tierce personne voire même aux services d'assistance sociale, pour l'aider dans les activités de la vie quotidienne. En outre, M. D...est célibataire, et il n'est pas dépourvu de toute attache familiale en Algérie où résident les autres membres de sa fratrie et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans. Dans les circonstances de l'espèce, et eu égard aux conditions de son séjour sur le territoire national, la décision de refus de titre de séjour prise par le préfet du Nord n'a pas porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.
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N°18DA02056
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