Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2019, M.B..., représenté par Me C... A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre les décisions l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, et ce dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MB..., ressortissant turc né le 6 septembre 1992, est entré régulièrement en France le 21 octobre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour, en qualité de conjoint de français. Il a été mis en possession d'un titre de séjour valable du 16 septembre 2015 au 16 septembre 2016, renouvelé une fois. Séparé de son épouse, il a ensuite sollicité, en janvier 2018, un titre de séjour en qualité de salarié ainsi qu'au titre de l'admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 6 septembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé, à son encontre, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Par un arrêté du même jour, la préfète de la Seine-Maritime a également prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. B... relève appel du jugement du 12 septembre 2018 en tant seulement que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de sa requête dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire et celles fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
2. Il résulte des pièces du dossier que M.B..., entendu le 6 septembre 2018 par un agent de police judiciaire de la police aux frontières, a été mis à même de présenter des observations sur la perspective de son éloignement. Le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne relatif au droit d'être entendu doit donc être écarté.
3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ". Il ressort des pièces du dossier que pour refuser l'admission exceptionnelle au séjour de M.B..., la préfète de la Seine-Maritime a relevé que celui-ci, entré en France le 21 octobre 2015, est séparé de son épouse française et n'a pas d'enfant, qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches en Turquie et que l'emploi de salarié polyvalent dans la restauration qui lui était offert ne connaît pas de difficultés particulières de recrutement. Compte tenu de ces éléments, qui ne sont pas sérieusement contestés, elle n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou la mention " salarié " sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire.
4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime se serait estimée en situation de compétence liée pour prononcer à l'encontre de M. B...une décision l'obligeant à quitter le territoire français.
5. La circonstance que la préfète n'ait pas répondu à la demande du 24 juin 2018 de M. B... tendant à obtenir la communication des motifs pour lesquels cette dernière avait implicitement refusé de faire droit à sa demande de changement de statut en tant que salarié, avant l'intervention de la mesure contestée et son interpellation, n'est pas de nature à démontrer que la décision en litige serait entachée d'un détournement de procédure ou de pouvoir.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B...résidait en France depuis moins de trois ans à la date de la décision contestée. Il est séparé de son épouse et aucun enfant n'est né de leur union. Il n'établit pas non plus être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et bien qu'il ait occupé un poste d'employé polyvalent, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas porté, au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressé.
7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 6 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. La décision contestée vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 513-2, précise la nationalité de M. B...et indique qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
9. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
10. M. B...soutient que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, l'intéressé n'établit ni même n'allègue être exposé à des risques actuels et personnels en cas de retour en Turquie.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions d'annulation dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire et celle fixant le pays de destination. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., au ministre de l'intérieur et à Me C...A....
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.
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N°19DA00082
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