2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 mai 2018 du préfet de la Somme ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, né le 11 janvier 1989, de nationalité algérienne, est entré sur le territoire français le 30 mai 2014 au moyen d'un visa de court séjour. Le 27 février 2018, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 28 mai 2018, le préfet de la Somme a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 16 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements. Un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. L'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte.
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".
4. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative de se prononcer sur la demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade au vu de l'avis émis par un collège de médecins nommés par le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Préalablement à l'avis rendu par ce collège d'experts, un rapport médical, relatif à l'état de santé de l'intéressé et établi par un médecin instructeur, doit lui être transmis. Le médecin instructeur à l'origine de ce rapport médical ne doit pas siéger au sein du collège de médecins qui rend l'avis transmis au préfet.
6. En faisant valoir qu'en méconnaissance de l'obligation rappelée au point 4 de faire figurer tous les éléments de procédure sur l'avis rendu par le collège de médecins, l'avis du collège de médecins du 16 mai 2018 ne mentionne pas le nom du médecin qui a établi le rapport médical au vu duquel il a été émis, M. B... doit être regardé comme assortissant d'allégations sérieuses son moyen tiré de ce que l'avis a été rendu selon une procédure entachée d'irrégularité. En effet, faute de mention sur l'avis, il n'est pas établi que le médecin ayant rédigé le rapport médical ne siégeait pas au sein du collège qui a rendu l'avis. Or, la préfète de la Somme, qui seule détient les éléments probants de nature à établir l'identité du médecin ayant établi le rapport médical, s'est abstenue de produire de tels éléments en réponse aux allégations du requérant, même après y avoir été invitée par courrier du 9 septembre 2019. Dans ces conditions, il y a lieu de tenir le vice allégué pour établi. Ce vice de procédure a privé M. B... d'une garantie consistant en l'examen de sa situation médicale par un collège de trois médecins distincts du médecin instructeur à l'origine du rapport médical. Il y a donc lieu d'accueillir le moyen tiré de ce que, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a rédigé le rapport médical a siégé au sein du collège des trois médecins ayant rendu l'avis.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mai 2018 du préfet de la Somme.
8. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement que la préfète de la Somme procède à un nouvel examen de la situation de M. B.... Il y a dès lors lieu de lui enjoindre d'y procéder et de statuer dans un délai de deux mois.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 16 octobre 2018 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 28 mai 2018 du préfet de la Somme est annulé.
Article 3 : Il est enjoint à la préfète de la Somme de procéder à un nouvel examen de la situation de M. B..., dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la préfète de la Somme et au ministre de l'intérieur.
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N°19DA01024 2