Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 février 2019, la ministre de la transition écologique et solidaire et la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé la décision du 23 août 2016 et a enjoint au préfet de la région Hauts-de-France de verser à M. A... la somme indûment prélevée sur son salaire du mois d'octobre 2016 ;
2°) de rejeter les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif d'Amiens.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 61-825 du 29 juillet 1961 modifiée ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... est agent d'exploitation spécialisé des travaux publics de l'Etat, affecté au centre d'exploitation et d'intervention de la direction interdépartementale des routes Nord de Clermont de l'Oise. Le directeur interdépartemental des routes, par une décision du 23 août 2016, a procédé à une retenue du trentième sur sa paie d'octobre 2016, pour absence de service fait le 3 mai 2016. Saisi par M. A..., le tribunal administratif d'Amiens a annulé, par un jugement du 30 novembre 2018, la décision du directeur interdépartemental des routes du 23 août 2016, a enjoint au préfet de la région Hauts-de-France de verser à M. A... la somme indûment prélevée sur son salaire du mois d'octobre 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de M. A.... Les ministres de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision du 23 août 2016 et a enjoint au préfet de la région Hauts-de-France de verser à M. A... la somme indûment prélevée sur son salaire du mois d'octobre 2016.
2. Pour annuler la décision du 23 août 2016, le tribunal administratif d'Amiens a considéré que M. A... avait été mis dans l'impossibilité de rejoindre son lieu de travail, ne pouvant disposer des clés du véhicule de covoiturage mis à sa disposition par l'administration.
3. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. Les indemnités peuvent tenir compte des fonctions et des résultats professionnels des agents ainsi que de la performance collective des services... ". Aux termes de l'article 4 de la loi de finances rectificatives pour 1961 tel que modifié par la loi du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d'ordre social : " Le traitement exigible après service fait, conformément à l'article 22 (premier alinéa) de l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires est liquidé selon les modalités édictées par la réglementation sur la comptabilité publique. / L'absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappée d'indivisibilité en vertu de la réglementation prévue à l'alinéa précédent. / Il n'y a pas service fait : / 1°) Lorsque l'agent s'abstient d'effectuer tout ou partie de ses heures de services ; / 2°) Lorsque l'agent, bien qu'effectuant ses heures de service, n'exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s'attachent à sa fonction telles qu'elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l'autorité compétente dans le cadre des lois et règlements. / Les dispositions qui précèdent sont applicables au personnel de chaque administration ou service doté d'un statut particulier ainsi qu'à tous bénéficiaires d'un traitement qui se liquide par mois. ".
4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que par une décision du 30 juillet 2013, M. A... était affecté depuis le 28 février 2013, au centre d'exploitation de Clermont. Il devait donc rejoindre ce centre à chacune de ses prises de service. Si l'administration a mis à disposition des agents anciennement affectés sur le site de Choisy-au-Bac, un véhicule pour assurer leur covoiturage depuis ce site jusqu'au centre de Clermont, il ne s'agit aucunement d'une obligation, et l'absence d'une telle facilité ne pouvait justifier qu'un agent ne rejoigne pas son service. D'ailleurs, ce trajet dans un véhicule administratif n'était pas décompté dans le temps de travail. Le site de Choisy-au-Bac ayant été définitivement fermé, le véhicule de covoiturage restait à la disposition des agents sur le site de Clairoix, distant de moins de trois kilomètres du site de Choisy-au-Bac. La veille du 3 mai 2016, les deux agents utilisant ce véhicule ont refusé d'en prendre la clé, alors que le chef de centre indiquait qu'il ne pouvait la déposer à Clairoix, pour des raisons de sécurité. Cette circonstance ne dispensait pas M. A..., qui s'était d'ailleurs rendu à Clairoix avec son véhicule personnel, de rejoindre son lieu d'affectation à Choisy-au-Bac. Le chef de centre lui a, en outre, rappelé par téléphone comme le reconnait M. A..., cette obligation, dans la matinée du 3 mai 2016, lui ordonnant de rejoindre le centre avec son véhicule personnel. En s'abstenant de rejoindre son poste, M. A... n'a donc pas respecté ses obligations de service pour la journée du 3 mai 2016.
5. Par ailleurs, si M. A... a spontanément rejoint une équipe affectée au balayage du viaduc de Compiègne, il ressort du planning produit en première instance qu'il devait au moins pour l'après-midi du 3 mai, être sur le viaduc de Frocourt. Même s'il a accompli ses heures de service, M. A... n'a donc pas respecté le planning de travail et doit être regardé comme n'ayant pas exécuté ses obligations de service dans leurs modalités définies par l'autorité compétente, au sens de l'article 4 précité de la loi de finances rectificatives pour 1961. Le prélèvement d'un trentième pour la journée du 3 mai 2016 sur la paie de M. A... était donc justifié. Les ministres de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sont donc fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a annulé pour excès de pouvoir pour ce motif la décision du 23 août 2016. Il appartient toutefois à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... en première instance.
6. M. A... soutient que la décision du 23 août 2016 serait tardive par rapport à la date des faits. Toutefois, la retenue sur traitement qui ne constitue pas une sanction, n'est soumise à aucune procédure particulière. Au surplus, la décision est intervenue moins de quatre mois après les faits, ce délai n'apparaît donc pas disproportionné. Le moyen tiré d'un vice de procédure ne peut donc, en tout état de cause, qu'être écarté.
7. La décision contestée indique que M. A... a refusé de se rendre au dépôt de Choisy-au-Bac, alors que ce site était fermé précisément à compter du 3 mai 2016. Cette erreur matérielle est sans incidence sur la légalité de la décision dès lors qu'il n'est pas contesté que M. A... devait rejoindre son lieu d'affectation le centre de Clermont depuis le 28 février 2013, comme le mentionne d'ailleurs la décision du 23 août 2016 et qu'il ne l'a pas fait. Le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
8. M. A... soutenait en première instance que la défense de l'Etat était irrecevable. Mais, il critiquait en fait le bien fondé des arguments de l'administration et l'exactitude de ses écritures. Au surplus, l'irrecevabilité de la défense est sans incidence sur la légalité de la décision contestée.
9. Il résulte de tout ce qui précède que les ministres de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sont fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du directeur interdépartemental des routes Nord du 23 août 2016 ordonnant le prélèvement d'un trentième sur la paie de M. A.... Par suite les demandes de M. A... devant le tribunal administratif d'Amiens ne peuvent qu'être rejetées, y compris ses conclusions à fins d'injonction et ses conclusions indemnitaires fondées sur l'illégalité fautive de la décision du 23 août 2016, celles-ci n'ayant au surplus pas été précédées d'une demande préalable, ainsi que l'ont jugé les premiers juges.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 30 novembre 2018 sont annulés.
Article 2 : Les demandes de M. A... devant le tribunal administratif d'Amiens sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ainsi qu'à M. B... A....
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N°19DA00275
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