Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 mars 2019, la commune de Saint-Etienne du Rouvray, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 14 janvier 2019 ;
2°) de rejeter la demande de Mme A....
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., recrutée le 1er avril 2003 en qualité d'agent contractuel d'entretien au sein de la commune de Saint-Etienne du Rouvray, a été titularisée le 1er avril 2005. Elle a été placée en congé de maladie ordinaire à plusieurs reprises au cours de l'année 2010. Dans sa séance du 25 novembre 2010, la commission de réforme a émis un avis défavorable à la prise en charge de l'épicondylite droite du coude dont souffre Mme A... au titre de la maladie professionnelle, avis qu'elle a maintenu à la suite de la contre-expertise réalisée le 10 février 2011. Après avoir repris ses fonctions le 14 décembre 2010 sur un poste aménagé, Mme A... a fait l'objet de nouveaux arrêts de travail au cours des années 2011 et 2012. La commission de réforme a émis un nouvel avis défavorable à la prise en charge des arrêts de travail intervenus en 2012 au titre de la maladie professionnelle lors de sa séance du 22 octobre 2012. Mme A..., qui a été placée en position de disponibilité d'office à compter du 10 janvier 2014, a ensuite sollicité sa mise en retraite pour invalidité le 6 octobre 2014, puis a décidé de renoncer à cette demande. Le comité médical départemental de Seine-Maritime a conclu, le 11 mars 2015, à l'inaptitude absolue et définitive de l'intéressée aux missions de son grade ainsi qu'à toute fonction dans la fonction publique territoriale. Par un avis du 22 septembre 2016, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales a émis un avis défavorable à la mise à la retraite pour invalidité de Mme A... par anticipation et à la reconnaissance d'un droit à pension d'invalidité. Par une lettre du 26 décembre 2016, le maire de Saint-Etienne du Rouvray l'a informée de l'impossibilité, pour lui, de prolonger sa disponibilité d'office au-delà du 9 janvier 2017 et de son licenciement pour inaptitude physique. Par un arrêté du 6 janvier 2017, il a licencié Mme A... pour inaptitude définitive et absolue à l'exercice de toute fonction. La commune de Saint-Etienne du Rouvray relève appel du jugement du 14 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté du 6 janvier 2017 et a enjoint à la commune de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement. Par la voie de l'appel incident, Mme A... demande à ce que la cour enjoigne à la commune de Saint-Etienne du Rouvray de prononcer sa réintégration en qualité d'adjointe technique territoriale.
2. Aux termes de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. " Aux termes de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985 susvisé : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984. ".
3. Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l'intéressé dans un autre emploi. La mise en oeuvre de ce principe implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement.
4. Il ressort des pièces du dossier que le docteur Gouel, médecin agréé sollicité par la commune de Saint-Etienne du Rouvray pour faire le point sur la situation médico-administrative de Mme A... a estimé, le 31 mai 2012, d'une part, comme le médecin du travail, que l'intéressée ne devait " pas être placée sur un poste comportant des gestes répétitifs du membre supérieur droit, sans port de charge de dix kilos, pas d'utilisation d'engin vibrant " et, d'autre part, que celle-ci n'était pas inapte à sa fonction et qu'elle pouvait effectuer des tâches d'entretien " à condition qu'elles soient limitées dans le temps et que la charge de travail sur cet aspect-là ne soit pas intense ". Après avoir notamment constaté que Mme A... avait de nouveau fait l'objet d'arrêts de travail et que celle-ci avait, par courrier en date du 9 novembre 2012, demandé à ne plus faire la vaisselle au sein de l'école primaire où elle était affectée, la commune a, de nouveau, sollicité l'avis du médecin agréé. Le docteur Gouel a ainsi estimé, le 29 novembre 2012, que " Mme A... doit être considérée maintenant comme inapte absolue et définitive à la fonction et à tous métiers du grade " et préconisait la réalisation d'un bilan de compétences. Après avoir réalisé un bilan de compétences, en juin 2013, Mme A... a bénéficié d'une formation de cinq jours consacrée aux logiciels de bureautique et à l'environnement informatique. Le rapport d'évaluation établi le 1er octobre 2014 relève que cette formation " n'a pas permis, en l'état, d'acquérir les connaissances nécessaires pour une pratique professionnelle quotidienne " et qu'il n'est pas possible de " s'engager sur le fait que cet objectif est atteignable ". Une nouvelle fois sollicité par la commune de Saint-Etienne du Rouvray, le docteur Gouel a estimé, le 18 décembre 2014, que " force est de constater l'inaptitude absolue et définitive à la fonction et tout métier d'adjoint technique " ainsi que " l'inaptitude absolue à tout emploi dans la fonction publique ", ce qu'il a d'ailleurs confirmé dans son avis rendu le 20 mai 2015. Le comité médical départemental de Seine-Maritime a, le 11 mars 2015, rendu un avis favorable à l'inaptitude absolue et définitive aux missions du grade ainsi qu'à toute fonction dans la fonction publique territoriale concernant Mme A.... Après avoir envisagé une mise à la retraite pour invalidité qui n'a pas abouti, le maire de Saint-Etienne du Rouvray a, par l'arrêté du 6 janvier 2017 en litige, prononcé le licenciement de Mme A... à compter du 10 janvier 2017 pour inaptitude définitive et absolue à l'exercice de toutes fonctions dans la fonction publique. Si Mme A... se prévaut du courrier en date du 22 septembre 2016 dans lequel la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales a refusé de lui reconnaître un droit à pension d'invalidité en se fondant sur l'avis du docteur Doucet-Biras du 1er juin 2016 qui a considéré qu'elle n'était pas dans l'incapacité définitive d'exercer ses fonctions, cet élément est insuffisant, à lui seul, pour remettre en cause les constats d'inaptitude effectués jusqu'alors. Dans ces conditions, dès lors que Mme A... était inapte à l'exercice de toutes fonctions et que son reclassement était donc impossible, c'est à bon droit que le maire de Saint-Etienne-du-Rouvray a pu, par l'arrêté contesté, prononcer son licenciement.
5. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé dans la requête, la commune de Saint-Etienne du Rouvray est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 6 janvier 2017 par lequel le maire de Saint-Etienne du Rouvray a licencié pour inaptitude physique Mme A.... Par voie de conséquence et en l'absence de tout autre moyen soulevé par Mme A... devant le tribunal administratif de Rouen, ses demandes tant devant les premiers juges que devant la cour doivent être rejetées, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Etienne du Rouvray.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 14 janvier 2019 du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Rouen par Mme A... et ses conclusions présentées devant la cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Etienne du Rouvray et à Mme B... A....
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N°19DA00652
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