Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 29 mars 2021, 4 janvier et 4 février 2022, la société Vitse, représentée par Me Ducrocq, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner Pas-de-Calais Habitat à lui verser les sommes de 128 335,80 euros toutes taxes comprises correspondant au solde du lot n° 1 " désamiantage " du marché de démolition de logements collectifs dans la commune de Carvin et de 186 436,28 euros au titre des frais qu'elle a supportés du fait de retards imputables au maître d'ouvrage et de travaux supplémentaires, ces sommes étant assorties des intérêts à compter du mémoire en réclamation et de la capitalisation de ces intérêts, ainsi que de la décharger du paiement des pénalités mises à sa charge et de condamner Pas-de-Calais Habitat à lui verser la somme de 50 000 euros pour comportement abusif et rupture dans l'égalité de traitement entre entreprises ;
3°) de mettre à la charge de Pas-de-Calais Habitat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a droit au paiement de la somme de 128 335,80 euros toutes taxes comprises correspondant au solde du prix global et forfaitaire de ce marché ;
- c'est à tort que des pénalités pour un montant de 106 546,50 euros ont été mises à sa charge dès lors que le calcul de celles-ci est erroné et qu'en tout état de cause les retards ne lui sont pas imputables ; ces pénalités devraient, a minima, faire l'objet d'une modulation ;
- elle sollicite le paiement de la somme de 53 206,28 euros au titre des charges qu'elle a supportées du fait de retards imputables à Pas-de-Calais Habitat en raison de l'impréparation du chantier, de la coupure tardive des réseaux d'électricité et de gaz ainsi que de la présence de nids d'hirondelles sur le chantier ;
- elle sollicite également le paiement de la somme de 133 230 euros au titre de travaux supplémentaires qui lui ont été demandés pour la démolition des bouchements en parpaings des fenêtres situées au rez-de-chaussée, de surcoûts des travaux de désamiantage et des coûts liés au vide sanitaire de l'une des deux résidences ;
- elle sollicite enfin le paiement de la somme de 50 000 euros pour comportement abusif du maître d'ouvrage et rupture dans l'égalité de traitement entre entreprises.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 novembre 2021, 2 février 2022 et 9 février 2022, Pas-de-Calais Habitat, représenté par Me Le Rioux, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Vitse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les demandes tendant au paiement du solde du marché et à la décharge des pénalités infligées sont irrecevables en l'absence de contestation par la société Vitse de ceux-ci dans son mémoire en réclamation au sens de l'article 50.1 du cahier des clauses administratives générales applicables à ce marché ;
- c'est à bon droit que le tribunal administratif de Lille a retenu l'irrecevabilité de la demande de la société Vitse tendant au paiement de la somme de 17 500 euros au titre de travaux supplémentaires relatifs au vide sanitaire ;
- les conclusions tendant à sa condamnation à hauteur de 50 000 euros pour comportement abusif et rupture dans l'égalité de traitement entre entreprises sont irrecevables car nouvelles en appel et non motivées ;
- en tout état de cause, les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 février 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 21 février 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me Houlmann pour Pas-de-Calais Habitat.
Considérant ce qui suit :
1. Par un acte d'engagement du 23 octobre 2015, l'office public de l'habitat du département du Pas-de-Calais, dénommé Pas-de-Calais Habitat, a confié à la société Vitse le lot n° 1 " désamiantage " d'un marché de démolition de deux résidences de logements collectifs dans la commune de Carvin pour un montant de 473 540 euros hors taxes, soit 568 248 euros toutes taxes comprises. L'ordre de service, en vue du démarrage des travaux, a été notifié à la société Vitse le 19 janvier 2016. Les travaux ont été réceptionnés le 3 octobre 2016. La société Vitse a remis son projet de décompte final le 31 janvier 2017. Par un ordre de service n° 2 du 9 novembre 2017, Pas-de-Calais Habitat lui a notifié le décompte général qu'elle a contesté par un courrier du 7 décembre 2017. La société Vitse relève appel du jugement du 29 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant au paiement de diverses sommes afférentes à l'exécution de ce marché.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article 13.3.1. du cahier des clauses administratives générales applicable au présent marché : " Après l'achèvement des travaux, le titulaire établit le projet de décompte final, concurremment avec le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d'exécution des prestations ou à la place de ce dernier. (...) Le titulaire est lié par les indications figurant au projet de décompte final ".
3. Il résulte de jugement attaqué que le tribunal administratif de Lille a estimé, ainsi que l'opposait Pas-de-Calais Habitat, que la demande de la société Vitse tendant au paiement de la somme de 17 500 euros, au titre des travaux qu'elle avait dû engager concernant le vide sanitaire de l'une des deux résidences sur lesquelles elle intervenait, était irrecevable à défaut d'avoir été mentionnée dans son projet de décompte final présenté le 31 janvier 2017. Il résulte de ce projet de décompte que cette somme n'y figurait pas, de sorte que le titulaire du marché ne pouvait plus, conformément à l'article 13.3.1 du cahier des clauses administratives générales applicable au présent marché, la mentionner dans son mémoire en réclamation. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la demande de la société Vitse était, dans cette mesure, irrecevable.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les difficultés rencontrées dans l'exécution du marché :
4. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.
S'agissant de la préparation du chantier :
5. Aux termes de l'article 1.06 du cahier des clauses techniques particulières : " Les travaux de désamiantage intègrent : - le plan de retrait d'amiante dans les délais impartis (...) ". Aux termes de l'article 1.16 du même cahier : " Le plan de retrait amiante devra être établi et fourni à qui de droit dès la notification du marché à charge du présent lot n° 1 désamiantage (...) [notamment] à l'inspection du travail (...) ".
6. Il résulte de l'instruction que, par un ordre de service n° 1 du 15 janvier 2016 réceptionné le 19 janvier suivant par la société Vitse, le début des travaux du lot n° 1 dont elle est titulaire a été fixé au 1er février 2016. Si la société appelante soutient que des tables de jardin et des meubles étaient demeurés dans les résidences alors que les bâtiments devaient, en vertu de l'article 1.01 du cahier des clauses techniques particulières, être vides avant le commencement des travaux, il résulte de l'instruction, et notamment du compte-rendu d'entretien de réunion de chantier du 3 mai 2016, que seuls quelques mobiliers restaient à évacuer par Pas-de-Calais Habitat mais que rien ne s'opposait au démarrage des travaux. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que l'intervention avec retard de la société Vitse lui est exclusivement imputable dès lors qu'informée par le maitre d'œuvre, par courriel du 8 janvier 2016, de la réunion de préparation du chantier prévue le 21 janvier 2016, elle ne s'y est pas rendue, sans qu'elle puisse utilement se prévaloir du fait que ce courriel n'aurait pas été identifié par ses services. En outre, le maître d'œuvre a constaté, notamment dans son courriel du 29 mars 2016, l'absence d'installation du chantier par la société Vitse et que celle-ci n'avait effectué l'inspection commune préalable à son intervention que le 2 mai 2016, soit plus de trois mois après la date de démarrage des travaux. Enfin, si la société appelante soutient que Pas-de-Calais Habitat n'a pas réalisé le diagnostic " amiante " manquant pour communication à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, il résulte des stipulations précitées des articles 1.06 et 1.16 du cahier des clauses techniques particulières qu'il appartenait à la société Vitse elle-même de réaliser et transmettre à l'inspection du travail le plan de retrait d'amiante. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le maître d'ouvrage a commis une faute au titre de la préparation du chantier. Sa demande d'indemnisation à ce titre doit ainsi être rejetée.
S'agissant de coupure des réseaux d'électricité et de gaz :
7. L'article 1.19 cahier des clauses techniques particulières prévoit qu'il appartient à l'entrepreneur d'adresser une déclaration de commencement des travaux aux exploitants de certains ouvrages notamment de transport et de distribution de gaz. L'article 2.11 du même cahier prévoit qu'il appartient à l'entrepreneur de s'assurer de l'arrêt effectif de toutes les alimentations en fluides notamment auprès des gestionnaires de réseaux ERDF et GRDF.
8. Il résulte des stipulations précitées qu'il appartenait à la société Vitse de s'assurer de l'arrêt effectif des réseaux notamment de gaz et d'électricité, de sorte qu'elle ne saurait imputer au maître d'ouvrage la réception qu'elle estime tardive, le 11 février 2016, du certificat de coupure de GRDF et, le 3 mai 2016, du certificat de coupure d'ERDF. En outre et en tout état de cause, il résulte de l'instruction que le préjudice dont se prévaut la société Vitse résulte principalement de l'accident de chantier qui a eu lieu le 10 mai 2016 alors qu'une pelle mécanique qu'elle utilisait a heurté une canalisation, lequel accident ne saurait résulter d'une faute du maître d'ouvrage. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le maître d'ouvrage a commis une faute à ce titre qui lui ouvrirait droit à une indemnisation.
S'agissant de la présence de nids d'hirondelles :
9. Il résulte de l'instruction, notamment du compte-rendu de la réunion de chantier du 19 juillet 2016, que deux nids d'hirondelles, situés sous un linteau de l'un des deux bâtiments concernés par les travaux, ont été identifiés à cette date. Toutefois, d'une part, la société Vitse n'établit pas que le maître d'ouvrage aurait commis une faute en n'identifiant pas plus tôt la présence de ces nids d'hirondelles alors qu'elle était elle-même responsable du chantier depuis le 1er février 2016, date à laquelle elle devait débuter les travaux, soit antérieurement à la période de nidification des hirondelles intervenant à compter du mois d'avril. D'autre part, elle n'établit pas les préjudices financiers dont elle se prévaut liés notamment au matériel qu'elle aurait immobilisé jusqu'au retrait de ces nids, intervenu au mois d'août 2016, dès lors qu'il résulte de l'instruction que les travaux se poursuivaient, à cette date, sur le second bâtiment. Dans ces conditions, la société Vitse n'établit pas la faute du maître d'ouvrage ni le préjudice dont elle se prévaut. Par suite, sa demande à ce titre doit être rejetée.
En ce qui concerne les travaux supplémentaires :
10. Aux termes de l'article 3 du cahier des clauses administratives particulières : " Les ouvrages ou prestations faisant l'objet du marché seront réglés par un prix global forfaitaire pour chacun des lots selon les stipulations de l'acte d'engagement ".
11. L'entrepreneur ayant effectué des prestations non prévues au marché et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage a droit à être rémunéré de ces prestations, nonobstant le caractère forfaitaire du prix fixé par le marché, si elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, ou si l'entrepreneur a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat.
S'agissant des coûts liés à la démolition des bouchements en parpaings des fenêtres situées au rez-de-chaussée :
12. Si la société Vitse soutient qu'elle a procédé à la démolition des bouchements en parpaings des fenêtres situées au rez-de-chaussée du bâtiment alors que la dépose d'un ouvrage ne comprenant pas d'amiante ne faisait pas partie des travaux prévus par le lot n° 1 " désamiantage " dont elle est titulaire, et notamment les stipulations de l'article 1.06 " objet des travaux " du cahier des clauses techniques particulières, elle n'établit pas, alors que Pas-de-Calais Habitat le conteste, que la réalisation de ces travaux supplémentaires lui aurait été demandée par le maître d'œuvre, comme elle l'allègue, ni que ces travaux auraient été indispensables à la réalisation de sa mission de désamiantage selon les règles de l'art. Par suite, elle n'est pas fondée à demander le paiement de ces travaux.
S'agissant des surcoûts liés au désamiantage :
13. Aux termes de l'article 1.11 cahier des clauses techniques particulières : " Avant d'établir sa soumission, l'entrepreneur est tenu de reconnaître les lieux où sont implantés les constructions et où seront exécutés les travaux de désamiantage, de déconstructions, démolitions, de remblais et de réfections des abords afin de tenir compte de toutes les sujétions visibles et/ou prévisibles. (...) L'entrepreneur est réputé avoir, avant remise de son offre, pris connaissance complète et entière des lieux et de leurs abords, effectué toutes enquêtes nécessaires afin de se rendre compte des sujétions particulières à la nature de l'opération et avoir, s'il le jugeait utile, sollicité auprès du maître d'œuvre ou du maître d'ouvrage tous renseignements utiles ".
14. En se bornant à indiquer que le diagnostic " amiante " était incorrect sur la quantité, la dureté et l'épaisseur de l'enduit, la conduisant à modifier sa technique et renchérissant le coût des travaux prévus au marché, la société Vitse n'établit pas, alors qu'elle a été retenue du fait de ses qualifications professionnelles en matière de désamiantage, que cette circonstance serait exceptionnelle et imprévisible et constituerait ainsi une sujétion imprévue ni, en tout état de cause, qu'une telle circonstance, dont elle chiffre le surcoût à la somme de 70 500 euros, aurait eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat. Par suite, elle n'est pas fondée à demander une indemnisation sur ce fondement.
15. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la société Vitse n'a pas procédé à une visite intégrale des lieux qui lui aurait permis, le cas échéant, d'identifier des difficultés auxquelles elle aurait pu être confrontée dans l'exécution des travaux ou de solliciter des informations complémentaires auprès du maître d'œuvre et du maître d'ouvrage ainsi que le prévoient les stipulations précitées de l'article 1.11 du cahier des clauses techniques particulières. En particulier, si elle soutient que cette faculté lui a été interdite par Pas-de-Calais Habitat, elle ne l'établit pas. Par suite et alors que le marché faisait l'objet d'un prix global forfaitaire, sa demande tendant à l'indemnisation des surcoûts que lui auraient occasionnés les travaux de désamiantage doit être rejetée.
En ce qui concerne les pénalités et le solde du marché :
16. Aux termes de l'article 6.1 du cahier des clauses administratives particulières : " Le délai d'exécution de l'ensemble des travaux est stipulé à l'acte d'engagement. (...) Le délai imparti à chaque titulaire s'inscrit dans le planning d'exécution signé par chaque entreprise lors de la première réunion de chantier et est conforme à celui éventuellement proposé par l'entreprise à l'acte d'engagement (...) ". Aux termes de l'article 6.3 du même cahier : " (...) Les pénalités de retard commencent à courir dès le 1er jour de dépassement de délai et seront calculées sur la base de la formule suivante : (Dc - Dn) / Dr x P x 0,15 où Dc est le délai réel constaté de réalisation des travaux, Dn est le délai sur lequel le candidat s'est engagé, Dr est le délai de référence inscrit au planning d'exécution et P est le prix global total hors taxes du marché. Elles sont applicables dès la fin du délai contractuel (...) ".
17. Il résulte de l'instruction que du montant global et forfaitaire du marché de 473 540 euros hors taxes, Pas-de-Calais Habitat a déduit la somme de 106 546,50 euros hors taxes au titre de pénalités de retard qu'elle a infligées à la société Vitse, de sorte que cette dernière n'a obtenu le paiement, au titre de ce marché, que de la somme de 366 593,50 euros hors taxes, soit 439 912,20 euros toutes taxes comprises.
18. En premier lieu, la société Vitse conteste la somme de 106 546,50 euros qui lui a été infligée par Pas-de-Calais Habitat au titre de pénalités de retard dans l'exécution des travaux alors qu'elle indique avoir respecté le délai de sept mois qui lui avait été imparti. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de l'acte d'engagement qu'elle a signé, qu'elle s'est engagée sur un délai de deux mois et demi pour la réalisation des travaux. Si l'ordre de service n° 1 du 15 janvier 2016, qu'elle a réceptionné le 19 janvier suivant, mentionne un début des travaux au 1er février 2016 et un délai global de six mois, outre un mois de préparation, il renvoie également au planning d'exécution des travaux, lequel précise qu'un délai de trois mois est imparti respectivement au titulaire du lot n°1 " désamiantage " et au titulaire du lot n° 2 " déconstruction ", le délai global du marché étant ainsi de six mois. Si la société appelante soutient ne pas avoir signé le planning définitif d'exécution des travaux, il est constant qu'elle n'a pas assisté à la première réunion de chantier au cours de laquelle cette signature devait intervenir, conformément à l'article 6.1. du cahier des clauses administratives particulières. Les travaux ayant été achevés le 3 octobre 2016, ainsi que le retient le procès-verbal de réception des travaux du même jour, c'est à bon droit que Pas-de-Calais Habitat a estimé que la société Vitse avait mis un délai de sept mois pour exécuter les travaux, le mois de février 2016 devant être consacré à la préparation du chantier. Ainsi, au regard de la formule de calcul des pénalités mentionnée à l'article 6.3 du cahier des clauses administratives particulières, Pas-de-Calais Habitat a pu retenir un délai réel constaté de réalisation des travaux de sept mois alors que le délai sur lequel la société Vitse s'était engagée était de deux mois et demi et que le délai de référence inscrit au planning d'exécution était de trois mois. Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le calcul des pénalités est erroné.
19. En deuxième lieu, si la société Vitse soutient que le délai d'exécution des travaux aurait dû être prolongé eu égard aux retards imputables au maître d'ouvrage ou au maître d'œuvre, il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 15 qu'en l'absence d'une telle faute, elle n'est pas fondée à se prévaloir de la prolongation de ce délai.
20. En dernier lieu, et alors que la société Vitse n'apporte aucun élément relatif notamment aux pratiques observées pour des marchés comparables ou aux caractéristiques particulières du marché en litige, de nature à établir dans quelle mesure les pénalités mises à sa charge présenteraient un caractère manifestement excessif, il n'y a pas lieu de prononcer la réduction des pénalités en litige.
21. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par Pas-de-Calais Habitat, la société Vitse n'est pas fondée à demander la décharge des pénalités mises à sa charge ni, par voie de conséquence, le versement de la somme de 128 335,80 euros toutes taxes comprises au titre du solde du marché qu'elle sollicite et qui correspond au montant des pénalités mises à sa charge.
En ce qui concerne le comportement reproché à Pas-de-Calais Habitat :
22. Il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il a été dit précédemment, que Pas-de-Calais Habitat aurait eu un comportement fautif à l'endroit de la société Vitse. Par ailleurs, cette dernière n'établit pas la rupture d'égalité de traitement entre entreprises qu'elle invoque. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par Pas-de-Calais Habitat, la demande de la société Vitse tendant à la condamnation de Pas-de-Calais Habitat à ce titre doit, en tout état de cause, être rejetée.
En ce qui concerne les intérêts moratoires et leur capitalisation :
23. Le présent arrêt rejetant les demandes indemnitaires présentées par la société appelante, il n'y a pas lieu, par voie de conséquence, de faire droit aux demandes tendant à ce que les sommes sollicitées soient assorties des intérêts moratoires et de leur capitalisation.
24. Il résulte de tout ce qui précède que la société Vitse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant au versement de diverses sommes en exécution du lot n° 1 " désamiantage " du marché de démolition de deux résidences de logements collectifs dans la commune de Carvin.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Pas-de-Calais Habitat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante au titre des frais exposés par la société Vitse et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Vitse, la somme de 2 000 euros à verser à Pas-de-Calais Habitat au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Vitse est rejetée.
Article 2 : La société Vitse versera la somme de 2 000 euros à Pas-de-Calais Habitat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Vitse et à Pas-de-Calais Habitat.
Délibéré après l'audience publique du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2022.
Le rapporteur,
Signé : N. Carpentier-Daubresse
La présidente de chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Chloé Huls-Carlier
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N°21DA00719
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N°"Numéro"