Par une requête, enregistrée le 7 juin 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 janvier 2019 du préfet de l'Oise ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A..., ressortissant nigérian né le 18 mars 1981 à Lagos (Nigeria), est entré en France le 19 mars 2014, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa multi-entrées en cours de validité. Il a formé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision du 30 septembre 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 29 avril 2016 par la Cour nationale du droit d'asile. Faisant valoir son état de santé, il a obtenu la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", valable d'octobre 2017 à août 2018. S'il n'a pas sollicité le renouvellement de ce titre, il a présenté, le 27 juillet 2018, une demande de titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 17 janvier 2019, le préfet de l'Oise a refusé de lui accorder ce titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A... relève appel du jugement du 26 mars 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté.
Sur la décision de refus de séjour :
2. Il ressort des motifs mêmes de l'arrêté contesté que ceux-ci, qui ne se bornent pas à reproduire des formes préétablies, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la décision refusant de délivrer à M. A... le titre de séjour qu'il sollicitait et permettent d'établir que cette décision a été prise au terme d'un examen particulier de la situation de l'intéressé. Ces motifs ont, par suite, mis M. A... à même de comprendre les raisons pour lesquelles ce refus lui était opposé et de les contester utilement. Ils constituent une motivation suffisante au regard de l'exigence posée par les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, alors même qu'ils ne détaillent pas l'ensemble des éléments relatifs à la situation professionnelle de l'intéressé, ni ne font, en particulier, mention de son admission au statut de travailleur handicapé. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... est insuffisamment motivée doit être écarté.
3. Eu égard notamment à ce qui a été dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Oise n'aurait pas procédé à un examen particulier et suffisamment approfondi de la situation de M. A... avant de lui refuser la délivrance du titre de séjour sollicité, alors même que les motifs de l'arrêté contesté ne font pas état de sa qualité de travailleur handicapé, laquelle, en l'absence notamment de précision sur le taux d'invalidité qui lui a été reconnu, n'apparaît pas, au vu des pièces versées au dossier, en particulier des contrats de travail et des bulletins de salaire qui lui ont été délivrés dans le cadre de l'exercice des fonctions d'agent d'entretien, restreindre d'une manière significative son aptitude au travail. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. A... doit être écarté.
4. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, du formulaire de demande de titre de séjour complété par M. A... et produit par le préfet de l'Oise que l'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le seul fondement des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant, il ressort des motifs de l'arrêté contesté que le préfet de l'Oise, quoique n'y étant pas tenu, a examiné d'office si cette demande pouvait être accueillie dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré par M. A... de ce que le préfet de l'Oise se serait mépris sur l'objet de sa demande en ne s'estimant pas saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
5. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté que le préfet de l'Oise ne s'est pas limité, pour rejeter, sur le terrain de l'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la demande de M. A... tendant à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", à prendre en considération l'avis défavorable émis, le 7 janvier 2019, par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, ainsi que la circonstance que l'intéressé n'était pas en possession d'une autorisation de travail ni d'un contrat de travail visé par l'autorité compétente, mais qu'il a estimé en outre, au terme d'une appréciation de la situation de l'étranger, que M. A... ne justifiait pas de motifs exceptionnels de nature à permettre une admission au séjour au titre du travail. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet de l'Oise en s'estimant lié par l'avis défavorable du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et par l'absence de possession par M. A... d'une autorisation de travail et d'un contrat de travail visé par l'autorité compétente, doit être écarté comme manquant en fait.
6. Ainsi qu'il a été dit au point 5, la demande de titre de séjour formulée par M. A... était présentée sur le seul fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé, s'il a bénéficié d'un premier titre de séjour en raison de son état de santé, aurait sollicité le renouvellement de ce titre. Par suite, M. A... ne peut utilement soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé aurait été pris en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui fixent les conditions dans lesquelles un étranger est susceptible d'être admis de plein droit au séjour pour raisons médicales.
7. M. A... soutient qu'il est parfaitement intégré, tant professionnellement que personnellement, sur le territoire français, en ce qu'il a exercé plusieurs activités professionnelles en France, a suivi des formations, notamment en vue de faciliter son intégration, et qu'il ne trouble pas l'ordre public. Il se prévaut, notamment, de la signature d'un contrat de travail à durée indéterminée, le 13 mars 2018, avec une entreprise exerçant son activité dans le secteur du nettoyage industriel et qui l'a recruté en tant qu'agent d'entretien. Toutefois, si M. A... est présent en France depuis 2014, celui-ci n'apporte aucun élément en ce qui concerne les liens d'ordre personnel ou familial qu'il aurait pu tisser sur le territoire français. A cet égard, s'il a indiqué, dans sa demande de titre de séjour, être marié à une compatriote, titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, il n'a apporté aucun élément de nature à justifier de la réalité de cette situation. Dans ces conditions, les diverses factures relatives au logement et charges courantes ainsi que les certificats médicaux versés au dossier ne suffisent pas à établir que M. A... a construit le centre de ses intérêts privés et familiaux en France. Enfin, M. A... n'établit, ni même n'allègue, qu'il serait dépourvu d'attaches familiales au Nigeria, alors en particulier qu'il a mentionné, dans sa demande de titre de séjour, être père d'un enfant résidant à l'étranger. Il s'ensuit que le requérant, qui ne peut d'ailleurs utilement invoquer les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa demande de titre était uniquement fondée sur les dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du même code, n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le préfet de l'Oise, en prenant cette décision, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, si la décision faisant obligation à un étranger de quitter le territoire français doit être motivée, elle n'a pas à faire l'objet, lorsqu'elle est adossée à une décision de refus de séjour, d'une motivation distincte de celle de ce refus. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la décision de refus de séjour prononcée par l'arrêté contesté est suffisamment motivée. Par suite, la décision, contenue dans le même arrêté, faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français est, elle-même, suffisamment motivée au regard de l'exigence posée tant par les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que par celles de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 7 que la décision de refus de titre de séjour prise à l'égard de M. A... n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de ce refus de séjour doit être écarté.
10. M. A... soutient que son état de santé fait obstacle à son éloignement vers le Nigeria. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, des prescriptions médicales et certificats médicaux produits que le requérant est atteint d'une hépatite B chronique, traitée par l'administration d'un antiviral " Viread ", dont la prise en charge rend nécessaire un suivi médical régulier reposant sur des contrôles semestriels et des bilans sanguins mensuels. Toutefois, ces éléments ne suffisent pas à créer un doute suffisant sur les points de savoir si M. A... pourrait être exposé, à défaut de prise en charge médicale de la pathologie dont il est atteint, à des conséquences d'une exceptionnelle gravité et s'il pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait été, à la date de l'arrêté contesté, au nombre des étrangers visés par les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne peuvent légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en raison de leur état de santé. Dès lors, en édictant à l'égard de l'intéressé une mesure d'éloignement, le préfet de l'Oise, qui ne disposait pas d'éléments suffisamment sérieux pour justifier une saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, n'a pas méconnu ces dispositions.
11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, en ce qu'il est soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
12. Compte-tenu de ce qui a été dit au point précédent ainsi qu'aux points 7 et 10, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Oise, pour faire obligation à M. A... de quitter le territoire français, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Oise.
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N°19DA01329