Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 juin 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 30 novembre 2018 de la préfète de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire et, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né le 15 octobre 1989, est entré régulièrement sur le territoire français, le 15 septembre 2015, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa de long séjour en cours de validité, afin d'y rejoindre son épouse, une ressortissante française avec laquelle il s'était marié au Maroc le 23 octobre 2014. La vie commune entre les époux ayant cessé au cours de l'année 2017, M. A... a sollicité, le 18 mai 2017, la délivrance d'une carte de séjour temporaire, dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, au titre du travail. Par un arrêté du 30 novembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A... relève appel du jugement du 19 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté.
Sur la décision de refus de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 313-12 de ce code : " Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé (...). Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale". / (...) ".
3. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A..., la préfète de la Seine-Maritime ne s'est pas limitée à apprécier l'opportunité de le faire bénéficier, conformément à sa demande, de l'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail, mais a aussi examiné, d'office, si M. A... pouvait se voir délivrer un titre de séjour en tant que conjoint d'une ressortissante française, sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A..., qui soutient que la rupture de la vie commune avec son épouse résulterait des violences conjugales que cette dernière lui aurait fait subir, doit, ce faisant, être regardé comme invoquant le moyen tiré de l'erreur commise par la préfète de la Seine-Maritime dans l'appréciation de sa situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la délivrance de plein droit, au conjoint d'un ressortissant français victime de violences conjugales, d'une carte de séjour temporaire en dépit de la rupture de la vie commune.
4. M. A... a versé au dossier trois attestations, concordantes, établies à des dates antérieures à celle de l'arrêté contesté, par lesquelles des proches déclarent avoir aperçu l'épouse de celui-ci jeter ses affaires personnelles dans des sacs poubelle. Toutefois, à supposer même établie la réalité de ce comportement, d'ailleurs confirmé par deux attestations postérieures à l'arrêté contesté, une telle circonstance ne peut suffire à prouver l'existence des violences conjugales invoquées par M. A..., ni même à corroborer les allégations du requérant selon lesquelles il aurait été chassé de son domicile par son épouse. Dans ces conditions, la préfète de la Seine-Maritime, en estimant que, du fait de la rupture de la vie commune avec son épouse française, M. A... ne pouvait obtenir la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions précitées du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en ne le faisant pas bénéficier des dispositions précitées de l'article L. 313-12 de ce code, ne s'est pas méprise dans l'appréciation de la situation de l'intéressé au regard de ces dispositions.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. M. A... a la possibilité soit de se faire représenter par un conseil dans le cadre de la procédure juridictionnelle en divorce qu'il indique avoir engagée, soit d'obtenir auprès des autorités consulaires françaises en poste au Maroc un visa de court séjour, dans l'hypothèse où, après avoir quitté le territoire français en l'absence de droit au séjour, il devrait comparaître personnellement à une audience à la demande de la juridiction statuant sur le fond. En conséquence, la décision par laquelle la préfète de la Seine-Maritime lui a fait obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance des garanties relatives au droit à un procès équitable résultant des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, en prenant cette décision, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressé.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles que son conseil présente sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Seine-Maritime.
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N°19DA01380