Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2018, et un mémoire en réplique, enregistré le 2 mars 2020, la société immobilière des Alpes, représentée par la SELARL CDMF-Avocats Affaires Publiques, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 octobre 2018 ;
2°) d'annuler la délibération du 8 février 2016 ;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la commune de Seyssinet-Pariset au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération attaquée fait grief et est susceptible de faire l'objet d'un recours ;
- cette délibération, qui doit être regardée comme une décision défavorable pour les copropriétaires du centre commercial de la Fauconnière, n'est pas motivée ; elle ne permet pas de déterminer la nature de l'opération d'aménagement que la commune entend peut-être mener sur le secteur ;
- cette délibération est entachée d'incompétence, dès lors que l'intérêt métropolitain de l'opération, à vocation économique, est établi ; en tout état de cause, l'aménagement et la gestion des zones d'activités relève de plein droit, sans avoir à justifier de l'existence de tout intérêt communautaire, de la compétence de la métropole ;
- cette délibération n'est pas justifiée par un objectif préalable d'aménagement du secteur ; aucune étude n'a été menée antérieurement à la délibération litigieuse.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 18 juin 2019 et 17 mars 2020, la commune de Seyssinet-Pariset, représentée par la SCP Fessler-Jorquera et Associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable pour être dirigée contre un acte préparatoire insusceptible de faire l'objet d'un recours contentieux ;
- le moyen tiré du défaut de motivation, s'agissant d'un acte de nature règlementaire, est inopérant ; en tout état de cause, il est infondé ;
- les autres moyens soulevés sont infondés.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 mai 2020 par une ordonnance du 28 avril 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... C..., premier conseiller ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
- les observations de Me B... pour la société immoblière des Alpes ainsi que celles de Me A... pour la commune de Seyssinet-Pariset ;
Considérant ce qui suit :
1. La société immobilière des Alpes relève appel du jugement du 11 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Seyssinet-Pariset du 8 février 2016 prenant en considération, sur le fondement de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme, l'opération d'aménagement du secteur de " la Fauconnière " et de ses abords.
Sur la légalité de la délibération du 8 février 2016 :
2. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales : " I.- La métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : / 1° En matière de développement et d'aménagement économique, social et culturel : a) Création, aménagement et gestion des zones d'activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire ; (...) 2° En matière d'aménagement de l'espace métropolitain : a) (...) définition, création et réalisation d'opérations d'aménagement d'intérêt métropolitain mentionnées à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme (...) / Lorsque l'exercice des compétences mentionnées au présent I est subordonné à la reconnaissance de leur intérêt métropolitain, celui-ci est déterminé à la majorité des deux tiers du conseil de la métropole. Il est défini au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur du décret prononçant la création de la métropole. A défaut, la métropole exerce l'intégralité des compétences transférées ".
3. Si l'opération d'aménagement du secteur de " la Fauconnière " et de ses abords vise notamment à redynamiser le centre commercial de la Fauconnière créé en 1982 dans la zone aménagement concerté (ZAC) à vocation mixte des Iles, cette ZAC est achevée depuis le 4 juillet 1989 ainsi qu'il résulte du procès-verbal des délibérations du conseil municipal du 29 juin 1989, de sorte que le projet ne rentre pas dans le champ des compétences dévolues de plein droit à Grenoble Alpes Métropole en application du 1° du I de l'article L. 5217-2 cité au point précédent. L'opération en litige prévoyant en outre la réalisation de logements en accession à la propriété et de logements sociaux et le développement de trames de circulations douces dans le secteur de la Fauconnière ne peut davantage, compte tenu de son objet, être regardée comme relevant des d'opérations d'aménagement d'intérêt métropolitain au sens du 2° du I de ce même article. Elle ne relève d'ailleurs pas de celles listées dans la délibération du conseil métropolitain de Grenoble Alpes Métropole du 3 novembre 2016. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du conseil municipal doit être écarté.
4. En deuxième lieu, le moyen tiré du défaut de motivation de la délibération attaquée doit être écarté par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. ". Aux termes de l'article L. 424-1 du même code : " Il peut également être sursis à statuer : / (...) / 3° Lorsque des travaux, constructions ou installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d'une opération d'aménagement, dès lors que le projet d'aménagement a été pris en considération par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités. ".
6. Selon les termes de la délibération attaquée, la commune a engagé une réflexion pour développer sur le secteur de la Fauconnière " un urbanisme maîtrisé et répondant aux objectifs fixés par le schéma de cohérence territoriale de la région urbaine grenobloise (SCoT) et le plan local de l'habitat 2010-2016 (PLH) tant en terme de rééquilibrage et de polarisation de l'offre commerciale, que de production de logements en accession et sociaux ". Elle a décidé de confier une étude de structuration urbaine à un cabinet d'architecture et d'urbanisme, visant " notamment à établir le potentiel urbain (évolution envisageable du bâti, volumétrie, programmation, phasage dans le temps ...) mais aussi de trame viaire et de circulation douces à y développer en accompagnement des programmes bâtis ". Dans ces conditions, le projet de renouvellement urbain poursuivi, qui entre dans le champ de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, était suffisamment défini à la date de la délibération en litige pour que sa mise à l'étude puisse être prise en considération. La société immobilière des Alpes n'est, à cet égard, pas fondée à soutenir que la commune devrait justifier d'une étude menée préalablement.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Seyssinet-Pariset, que la société immobilière des Alpes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société immobilière des Alpes, partie perdante, tendant au remboursement des frais qu'elle a exposés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par de la commune de Seyssinet-Pariset.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société immobilière des Alpes est rejetée.
Article 2 : La société immobilière des Alpes versera la somme de 2 000 euros à la commune de Seyssinet-Pariset au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société immobilière des Alpes et à la commune de Seyssinet-Pariset.
Délibéré après l'audience du 22 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Thierry Besse, président ;
Mme F... D..., première conseillère ;
Mme E... C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.
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N° 18LY04396
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