Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 3 décembre 2019, et un mémoire complémentaire enregistré le 23 septembre 2020, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la SCI Le Moulin des meuniers, représentée par la société Vedesi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 octobre 2019 ;
2°) d'annuler cette délibération du 28 septembre 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Annecy la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération du 8 décembre 2014 prescrivant la révision générale du plan d'occupation des sols et sa transformation en plan local d'urbanisme (PLU) est illégale en ce qu'elle définit insuffisamment les objectifs poursuivis ;
- les orientations du projet d'aménagement et de développement durables différant fortement des objectifs définis par la délibération du 8 décembre 2014, les participants à la concertation n'ont pu utilement y participer, ce qui a vicié la procédure ;
- les modalités de concertation définies par la délibération du 8 décembre 2014 n'ont pas été respectées, s'agissant de l'information donnée dans les bulletins municipaux ;
- le débat sur le projet d'aménagement et de développement durables est irrégulier, s'étant tenu en quatre séances ;
- les modifications apportées au projet après enquête publique ont modifié son économie générale, de sorte qu'une nouvelle enquête publique aurait dû être organisée ;
- le commissaire enquêteur n'a pas rendu de conclusions motivées ;
- la communauté d'agglomération du Grand Annecy n'était pas compétente pour approuver le PLU, dès lors qu'à la date de convocation des élus, la commune de Menthon Saint-Bernard n'avait pas donné son accord pour l'achèvement de la procédure ; l'information des élus a de ce fait été méconnue ;
- le PLU, qui ne comprend pas de zone d'urbanisation future, méconnaît de ce fait les articles L. 101-1 et L. 101-2 du code de l'urbanisme, ainsi que les dispositions de l'article R. 151-17 de ce code ;
- la fixation d'un coefficient d'espace vert élevé dans la zone UH ne permet pas de respecter l'objectif de densification de l'habitat ; le PLU est de ce fait incompatible avec le schéma de cohérence territoriale du bassin annécien ; la fixation d'un coefficient minimum laisse place à l'arbitraire dans l'instruction des autorisations d'urbanisme ;
- l'orientation d'aménagement et de programmation n° 2, qui renvoie au règlement sur certains points, comprend ainsi des règles impératives, en méconnaissance des principes s'appliquant à de telles orientations ;
- l'urbanisation envisagée du secteur des Pénoz méconnaît les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ; le classement en zone U de ce secteur est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'institution de l'emplacement réservé n° 31 est incompatible avec l'exercice d'une activité agricole et méconnaît par suite les dispositions de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée AB 587 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'institution de l'emplacement réservé n° 25 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 29 juin 2020, la communauté d'agglomération du Grand Annecy, représentée par la SELARL Racine, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 24 septembre 2020, par une ordonnance en date du 1er septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme, et notamment le VI de son article 12 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me A... pour la communauté d'agglomération du Grand Annecy ;
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 28 septembre 2017, le conseil communautaire de la communauté du Grand Annecy a approuvé le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Menthon-Saint-Bernard. La SCI Le Moulin des meuniers relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.
Sur la légalité de la délibération du 28 septembre 2017 :
En ce qui concerne la procédure d'adoption du PLU :
2. En premier lieu, la SCI Le Moulin des meuniers réitère en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, ses moyens tirés de l'illégalité, par la voie de l'exception, de la délibération du 8 décembre 2014 prescrivant la révision générale du plan d'occupation des sols, du non-respect des modalités de concertation, de l'irrégularité du débat sur le projet d'aménagement et de développement durables, de ce qu'une nouvelle enquête publique aurait dû être organisée compte tenu des modifications apportées au projet, de ce que le commissaire enquêteur n'a pas rendu de conclusions personnelles et motivées. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, la circonstance que les orientations du projet d'aménagement et de développement durables différeraient, pour certaines d'entre elles, des objectifs définis par la délibération du 8 décembre 2014, dont la requérante ne peut utilement exciper de l'illégalité, ne saurait en elle-même, à la supposer établie, établir que la participation de la population à la procédure de concertation n'aurait pas été utile et que celle-ci s'en serait trouvée viciée.
4. En troisième lieu, aux termes du I de l'article L. 153-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " L'établissement public de coopération intercommunale mentionné au 1° de l'article L. 153-8 peut achever toute procédure d'élaboration ou d'évolution d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, engagée avant la date de sa création, y compris lorsqu'elle est issue d'une fusion ou du transfert de cette compétence. Lorsque la procédure a été engagée par une commune, l'accord de celle-ci est requis. L'établissement public de coopération intercommunale se substitue de plein droit à la commune ou à l'ancien établissement public de coopération intercommunale dans tous les actes et délibérations afférents à la procédure engagée avant la date de sa création, de sa fusion, de la modification de son périmètre ou du transfert de la compétence. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, par délibération du 13 février 2017, le conseil municipal de Menthon-Saint-Bernard a donné son accord à la poursuite de la procédure d'élaboration du PLU par la communauté d'agglomération du Grand Annecy, laquelle a été créée à compter du 1er janvier 2017. Par suite, et alors que cette délibération est antérieure à la délibération du 16 février 2017 par laquelle le conseil communautaire de la communauté du Grand Annecy a décidé la poursuite de la procédure, le moyen tiré de ce que la communauté d'agglomération du Grand Annecy n'aurait pas eu compétence pour achever la procédure ne peut qu'être écarté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. "
7. Il ressort des pièces du dossier que les élus communautaires ont été informés, par la note de synthèse jointe à la convocation pour la séance du 16 février 2017, de l'état de la procédure d'élaboration du PLU de Menthon-Saint-Bernard et de ce que le conseil municipal devait donner son accord à la poursuite de la procédure le 13 février 2017. Quoique cette délibération n'était pas intervenue à la date d'envoi de la convocation, les élus ont ainsi été mis à même de délibérer, postérieurement à son intervention, de manière éclairée et d'exercer, le cas échéant, la faculté dont ils disposent de solliciter des documents et renseignements complémentaires. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de la délibération :
8. En premier lieu, et contrairement à ce que soutient la requérante, les dispositions de l'article R. 151-17 du code de l'urbanisme, aux termes desquelles " Le règlement délimite, sur le ou les documents graphiques, les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles, les zones naturelles et forestières. Il fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues par la présente section. " n'imposent pas aux auteurs d'un PLU de délimiter, sur le territoire de la commune, des zones correspondant à chacune de celles énumérées à l'article.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-1 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme respecte les principes énoncés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ". L'article L. 101-2 dispose : " Dans le respect des objectifs de développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L'équilibre entre : a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux, la lutte contre l'étalement urbain ; c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; d) La sauvegarde des ensembles urbains et la protection, la conservation et la restauration du patrimoine culturel ; e) Les besoins en matière de mobilité ; 2° La qualité urbaine, architecturale et paysagère, notamment des entrées de ville ; 3° La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l'habitat, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs de l'ensemble des modes d'habitat, d'activités économiques, touristiques, sportives, culturelles et d'intérêt général ainsi que d'équipements publics et d'équipement commercial, en tenant compte en particulier des objectifs de répartition géographiquement équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services, d'amélioration des performances énergétiques, de développement des communications électroniques, de diminution des obligations de déplacements motorisés et de développement des transports alternatifs à l'usage individuel de l'automobile (...). "
10. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du PLU ont entendu fixer des règles d'urbanisme à un horizon d'une dizaine d'années, choix d'opportunité que ne peut utilement contester la requérante. A cette échéance, et conformément aux orientations du schéma de cohérence territoriale du bassin annécien, qui précise que le potentiel de construction de logements de la commune est de 80 à l'horizon de vingt ans, et à l'objectif de préservation de l'environnement et des espaces agricoles, ils ont limité les zones d'extension de l'urbanisation en concentrant la capacité d'accueil en logements du PLU, estimée à environ 45 logements, sur deux sites situés à proximité du centre-bourg. La circonstance que le PLU ne prévoit aucune zone d'urbanisation future, justifiée par les objectifs des auteurs du PLU, ne saurait en elle-même caractériser une méconnaissance du principe d'équilibre, ni une incompatibilité du PLU avec les orientations du schéma de cohérence territoriale du bassin annécien.
11. En troisième lieu, la fixation d'un coefficient minimum d'espaces verts en zone UH, si elle a pour effet de limiter la densification des espaces déjà urbanisés de la commune, ne s'applique pas aux deux secteurs UHv oap1 et UHV oap2 retenus par la commune pour accueillir les opérations devant permettre 90% des constructions nouvelles de la commune, conformément aux orientations du schéma de cohérence territoriale du bassin annécien. Dans ces conditions, et alors que l'incompatibilité d'un PLU à un schéma de cohérence territoriale ne saurait résulter de la seule inadéquation entre une règle du PLU et une orientation de ce schéma, la compatibilité s'appréciant dans le cadre d'une analyse globale à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert et en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, le moyen tiré de l'incompatibilité sur ce point du PLU de la commune de Menthon-Saint-Bernard avec le schéma de cohérence territoriale du bassin annécien doit être écarté. Par ailleurs, cette règle, énoncée à l'article 13.UH du règlement du PLU, est suffisamment précise.
12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports et les déplacements. " L'article L. 151-7 du même code dispose : " Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : 1° Définir les actions et opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, notamment les continuités écologiques, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine, lutter contre l'insalubrité, permettre le renouvellement urbain et assurer le développement de la commune ; 2° Favoriser la mixité fonctionnelle en prévoyant qu'en cas de réalisation d'opérations d'aménagement, de construction ou de réhabilitation un pourcentage de ces opérations est destiné à la réalisation de commerces ; 3° Comporter un échéancier prévisionnel de l'ouverture à l'urbanisation des zones à urbaniser et de la réalisation des équipements correspondants ; 4° Porter sur des quartiers ou des secteurs à mettre en valeur, réhabiliter, restructurer ou aménager ; 5° Prendre la forme de schémas d'aménagement et préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics; 6° Adapter la délimitation des périmètres, en fonction de la qualité de la desserte (...) ".
13. En matière d'aménagement, une orientation d'aménagement et de programmation (OAP) implique un ensemble d'orientations définissant des actions ou opérations visant, dans un souci de cohérence à l'échelle du périmètre qu'elle couvre, à mettre en valeur des éléments de l'environnement naturel ou urbain, ou à réhabiliter, restructurer ou aménager un quartier ou un secteur. Si les OAP peuvent, en vertu de l'article L. 151-7 du code de l'urbanisme, prendre la forme de schémas d'aménagement, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre aux auteurs du PLU, qui peuvent y préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics, de fixer précisément, au sein de telles orientations, les caractéristiques des constructions susceptibles d'être réalisées.
14. Il ressort des pièces du dossier que l'OAP n°2 " Abords de la Poste " précise, dans ses principes d'aménagement, les caractéristiques de l'implantation du bâti, le gabarit des constructions, leur aspect extérieur, ainsi que la part de logements sociaux devant être réalisés en fonction de la superficie de surface de plancher. Toutefois, s'agissant des caractéristiques des constructions susceptibles d'être réalisées, l'OAP ne fait que reprendre les dispositions applicables au secteur des articles 2.UH, 10.UH et 11.UH du règlement du PLU, lesquelles s'imposent aux constructions devant être édifiées sur la zone, de sorte que ce rappel par l'OAP n'est, en lui-même, pas prescriptif. Si l'OAP précise par ailleurs que l'opération doit permettre la réalisation de logements en mixité possible avec des services, une telle indication, qui n'est pas impérative, n'entre en contradiction avec aucune disposition du règlement de la zone. Par suite, le moyen tiré du caractère illégalement prescriptif de l'OAP ne peut qu'être écarté.
15. En cinquième lieu, aux termes de l'article de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; (...). " L'article L. 131-7 du code dispose : " En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme, les documents en tenant lieu et les cartes communales sont compatibles, s'il y a lieu, avec les documents énumérés aux 1° à 10° de l'article L. 131-1 et prennent en compte les documents énumérés à l'article L. 131-2. ". Aux termes de l'article L. 121-8 du même code : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ".
16. S'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, il résulte des dispositions citées au point précédent que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme, il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire concerné est couvert par un SCOT, cette compatibilité s'apprécie en tenant compte des dispositions de ce document relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sans pouvoir en exclure certaines au motif qu'elles seraient insuffisamment précises, sous la seule réserve de leur propre compatibilité avec ces dernières.
17. Il ressort des pièces du dossier que le secteur des Pénoz, dont la requérante conteste le classement en zone Uh*, compte une dizaine de constructions regroupées, séparées par la route départementale d'une vingtaine de constructions également regroupées situées sur le territoire de la commune voisine de Bluffy, et à proximité d'une vingtaine de constructions, qui ont été classées en zone Uhp par les auteurs du PLU. Cet ensemble de constructions est identifié comme un secteur urbanisé par le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du bassin annécien. Dans ces conditions, compte tenu des orientations retenues par le schéma de cohérence territoriale, dont il n'est pas allégué qu'elles seraient incompatibles avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, le moyen tiré de l'incompatibilité du zonage retenu pour le secteur des Pénoz avec les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme doit être écarté.
18. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Les zones agricoles sont dites " Zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. "
19. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'occupation et d'utilisation des sols, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait fondée sur des faits matériellement inexacts ou entachée d'une erreur manifeste.
20. La SCI Le Moulin des meuniers conteste le classement de la parcelle cadastrée AB 587, située au lieu-dit " Clos Saint-Clair ", en zone Ao, correspondant aux secteurs agricoles " ordinaires " présentant un caractère moins stratégique pour l'agriculture, situés en enclave au sein de l'espace urbanisé. Cette parcelle non bâtie, d'une vaste superficie d'environ 12 000 m2, est enherbée et n'est pas dépourvue de tout potentiel agricole, même si elle ne fait l'objet d'aucune exploitation. Si elle est située dans un secteur d'urbanisation aérée et est bordée de plusieurs parcelles bâties, elle ouvre au sud sur d'autres parcelles non bâties, également classées en zone agricole, formant un ensemble de plus de quatre hectares. Son classement en zone agricole, en dépit du fait qu'elle ne présente pas d'enjeux agricoles majeurs, se justifie également par la volonté des auteurs du PLU, telle qu'elle ressort du projet d'aménagement et de développement durables et du rapport de présentation, de limiter l'extension de l'urbanisation en optant pour un mode de développement regroupé et structuré, à proximité du centre-village, dont est éloignée la parcelle litigieuse. Dès lors, et sans qu'aient d'incidence le classement antérieur de la parcelle ou le fait que le terrain est desservi par les réseaux, son classement en zone agricole, qui répond également à l'objectif de préservation des espaces agricoles et de la qualité paysagère du territoire, ne procède d'aucune erreur manifeste d'appréciation. Dans ces conditions, il ne porte pas non plus d'atteinte illégale au principe d'égalité, alors au demeurant que les parcelles identifiées par la requérante ne se trouvent pas dans une situation identique.
21. En septième lieu, aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : 1° des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; 2° Des emplacements réservés aux installations d'intérêt général à créer ou à modifier ; (...) ". L'article L. 151-11 du même code dispose : " Dans les zones agricoles, naturelles ou forestières, le règlement peut : 1° Autoriser les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière du terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ; (...) ".
22. La requérante conteste l'instauration, en zone agricole, de l'emplacement réservé n° 31 destiné à la création d'un réservoir d'eau intersyndical. Toutefois, la création d'un tel emplacement réservé a pour seul effet d'empêcher le propriétaire du terrain concerné de rendre le terrain incompatible avec la destination envisagée. Dans ces conditions, l'instauration de cet emplacement réservé n'est en elle-même pas de nature à empêcher l'exploitation de ces terrains agricoles. Au demeurant, et en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme n'interdisent pas par principe les constructions nécessaires à des équipements collectifs en zone agricole. Par suite, les moyens selon lesquels la création de l'emplacement réservé n° 31 méconnaît les dispositions de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
23. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'emplacement réservé n° 25, sur la parcelle cadastrée AB 587, a pour objet la réalisation d'un belvédère, en cohérence avec l'objectif de préservation des paysages et des vues sur le lac. Il ne ressort d'aucune disposition que le rapport de préservation devrait justifier du périmètre et de l'emprise retenus des emplacements réservés. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier, alors que la collectivité n'a pas à justifier d'un projet précis, que l'intention de la commune serait dépourvue de réalité. Dans ces conditions, et malgré l'erreur matérielle affectant le rapport de présentation s'agissant de la dénomination de la voie longeant le terrain, l'instauration de cet emplacement réservé sur ce terrain, offrant une vue sur le lac d'Annecy, n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.
24. Il résulte de ce qui précède que la SCI Le Moulin des meuniers n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté d'agglomération du Grand Annecy, qui n'est pas partie perdante, verse à la SCI Le Moulin des meuniers la somme qu'elle demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Le Moulin des meuniers la somme de 2 000 euros à verser à la communauté d'agglomération du Grand Annecy au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Le Moulin des meuniers est rejetée.
Article 2 : La SCI Le Moulin des meuniers versera à la communauté d'agglomération du Grand Annecy la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Le Moulin des meuniers et à la communauté d'agglomération du Grand Annecy.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Daniel Josserand-Jaillet, président de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme C... B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2020.
N° 19LY04423
fp