Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2020, Mme C... et M. E..., représentés par Me Dachary, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 novembre 2020 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Rhône du 27 décembre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de leur délivrer un titre de séjour ou de procéder au réexamen de leur situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- en opposant l'absence de considérations humanitaires pour leur refuser un titre de séjour salarié, alors qu'ils ont présenté une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée accompagnée du CERFA de demande d'autorisation de travail pour ressortissant étranger, le préfet a insuffisamment motivé ses décisions et entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier ;
- les refus de titre de séjour méconnaissent le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de leur fort degré d'insertion, de leur intégration professionnelle au regard de leur expérience en qualité de bénévoles au sein de l'association Oasis d'Amour ;
- les refus de titre de séjour sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les refus de titre de séjour violent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les obligations de quitter le territoire français sont privées de base légale du fait de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour ;
- ces décisions violent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions fixant le pays de destination sont privées de base légale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.
Par une décision du 10 février 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme C... et M. E....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A..., présidente-rapporteure,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E... et Mme C..., ressortissants de nationalité malgache entrés en France le 8 novembre 2013 sous couvert de visas de court séjour, relèvent appel du jugement du 6 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet du Rhône du 27 décembre 2019 refusant de leur délivrer un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.
Sur la légalité des arrêtés du 27 décembre 2019 :
En ce qui concerne les refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, M. E... et Mme C... sont entrés régulièrement en France le 8 novembre 2013. La prolongation de leur visa de court séjour leur a été refusée par le préfet du Rhône le 30 janvier 2014. Ils se sont maintenus irrégulièrement sur le territoire national après cette date et conservent de fortes attaches dans leur pays d'origine où ils ont vécu la majeure partie de leur existence. Compte tenu de ces éléments, leur engagement associatif et la promesse d'embauche dont ils se prévalent ne suffisent pas à faire regarder les décisions leur refusant la délivrance d'un titre de séjour comme portant à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elles poursuivent. Les refus de titre de séjour ne méconnaissent ainsi ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantissent à toute personne un tel droit.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".
4. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui n'est pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire". Dans cette hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont il ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
5. D'une part, la circonstance dont se prévalent M. E... et Mme C... qu'ils résident habituellement en France depuis le 8 novembre 2013 ne constitue pas en elle-même un motif exceptionnel d'admission au séjour, d'autant que les requérants se maintiennent irrégulièrement en France depuis le refus de renouvellement de leur visa de court séjour opposé par le préfet du Rhône le 30 janvier 2014. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 2, le préfet du Rhône n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant la régularisation de la situation des requérants par la délivrance à titre exceptionnel d'une carte portant la mention "vie privée et familiale".
6. D'autre part, si les requérants font valoir qu'ils bénéficient de promesses d'embauche, respectivement en qualité de chargé de mise en rayons et de vendeuse en cosmétologie, puériculture et habillement, signées par l'association Oasis d'Amour, les périodes de travail effectuées antérieurement pour le compte de cette association, ne peuvent être regardées comme constitutives d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. En l'absence d'autres éléments portés à la connaissance du préfet quant à une qualification professionnelle antérieure ou des diplômes en rapport avec les emplois pour lesquels ils postulent, en indiquant que leur situation ne répond pas à des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant une admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " salarié " ou travailleur temporaire au titre de l'article L. 313-14, le préfet du Rhône n'a ni insuffisamment motivé ses décisions, ni manqué à son obligation de procéder à un examen particulier de leur situation, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.
En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. E... et Mme C... ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les obligations de quitter le territoire français.
8. En second lieu, pour les motifs exposés au point 2, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'un éloignement sur la situation personnelle des requérants doivent être écartés.
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :
9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination devraient être annulées en conséquence de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Leur requête doit, dès lors, être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. E... et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
M. Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.
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N° 20LY03818