Par une requête enregistrée le 15 février 2021 et un mémoire en réplique enregistré le 16 décembre 2021, qui n'a pas été communiqué, la SCI les clos de la Noue, représentée par la SELARL CDMF avocats affaires publiques, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 décembre 2020, en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande ;
2°) d'annuler cette délibération du 13 décembre 2017, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Morte la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'identification d'une zone inconstructible sur son terrain en raison d'aléas de risques naturels est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le classement en zone agricole des parcelles cadastrées section AE n° 129 et 249 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2021, la commune de La Morte, représentée par la SCP Fessler Jorquera et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête d'appel ne sont pas fondés.
La clôture d'instruction a été fixée au 17 décembre 2021, par une ordonnance en date du 25 novembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Métier pour la SCl les clos de la Noue ainsi que celles de Me Barnier, substituant Me Fessler, pour la commune de La Morte ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 13 décembre 2017, le conseil municipal de La Morte a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. Après le rejet de son recours gracieux, la SCl les clos de la Noue a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de cette délibération. Par un jugement du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette délibération, en tant qu'elle identifie une zone humide sur la parcelle cadastrée section AE n° 129, et rejeté le surplus de la demande. La SCI les clos de la Noue relève appel de ce jugement, en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande.
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. "
3. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce PLU, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
4. Il ressort des pièces du dossier que les deux parcelles cadastrées section AE n° 129 et 249 ont été classées en zone agricole Ap correspondant à un secteur où aucune construction, même agricole, n'est autorisée compte tenu de ses caractéristiques paysagères et agronomiques. Elles sont non bâties et d'une vaste superficie de près de 13 000 m2. En l'état de prairies, et utilisées pour la pâture des bovins, ainsi qu'il ressort de la photographie produite, elles ne sont pas dépourvues de potentiel agricole, quand bien même elles sont en pente. Si elles sont situées entre deux zones urbanisées, elles ouvrent largement au nord et l'ouest sur de vastes zones dépourvues d'urbanisation et largement boisées, auxquelles elle se rattachent. Alors même que les auteurs du PLU ont entendu renforcer le rôle de centralité du secteur du couvent, situé à l'ouest et composé de quelques constructions, ce qui a justifié la création d'une zone à urbaniser sur des terrains peu pentus situés dans ce secteur, le classement en zone agricole des parcelles en litige répond aussi à l'objectif des auteurs du PLU de limiter le développement de l'urbanisation sur cette commune de petite taille en privilégiant l'urbanisation des espaces résiduels au sein de l'enveloppe urbaine, notamment au sein du secteur de la grande reine bordant les parcelles. Par suite, le classement en zone agricole des parcelles en litige ne procède d'aucune erreur manifeste d'appréciation.
5. En seconde lieu, aux termes de l'article R. 151-31 du code de l'urbanisme : " Dans les zones U, AU, A et N, les documents graphiques du règlement font apparaître, s'il y a lieu (...) 2° (...) Les secteurs où l'existence de risques naturels (...) justifient que soient interdites les constructions et installations de toute nature, permanentes ou non, les plantations, dépôts, affouillements, forages et exhaussements des sols. ".
6. Il ressort du document graphique du PLU qu'ont été identifiées sur les deux parcelles en litige, conformément à une carte des aléas établie suite à une étude réalisée en 2016 et annexée au PLU, une zone inconstructible sauf exceptions, correspondant pour partie à une zone G2 d'aléa moyen de glissement de terrain, et pour partie à une zone V3 d'aléa fort de ruissellement de versant et de ravinement, ainsi qu'une zone constructible avec prescriptions, correspondant à des zones d'aléa faible de glissement de terrain ou de ruissellement de versant. Il ressort de l'étude géotechnique réalisée en 2016 que le classement d'une partie des terrains en zone d'aléa pour glissement de terrains est justifié par la pente du terrain, d'environ 20 à 25%, la nature des terrains, constitués de moraines et éboulis mixtes, ainsi que la présence d'une humidité élevée dans les sols, laquelle ne concerne pas que la partie basse des terrains, affectée par une fuite de canalisations publiques d'eau potable. Ces éléments ne sont pas utilement contredits par l'étude géotechnique datant de 2004 produite par la requérante, réalisée à l'occasion d'un projet de construction ancien, qui n'identifie pas précisément les parties de parcelles ayant fait l'objet de sondages et dont l'objet est limité, aucune analyse de risque au niveau du secteur n'étant réalisée. Par ailleurs, s'il est constant que la présence d'une zone humide en partie basse de la parcelle cadastrée AE n° 249 résulte d'une fuite d'une canalisation du réseau public d'eau potable, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause l'identification de la partie des terrains longeant ces ouvrages en zone d'aléa fort de ruissellement de versant, le risque étant identifié en amont de la fuite, le long de la descente d'eau alimentant le réseau d'eau potable, sur une bande de terrain susceptible de concentrer les eaux de ruissellement de ce versant. Par suite, l'identification d'une partie des parcelles en litige dans des zones de risques naturels justifiant des interdictions ou limitations des possibilités de construire n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Il résulte de ce qui précède que la SCI les clos de la Noue n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de la commune de La Morte, qui n'est pas partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI les clos de la Noue la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la commune de La Morte.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI les clos de la Noue est rejetée.
Article 2 : La SCI les clos de la Noue versera à la commune de La Morte la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI les clos de la Noue et à la commune de La Morte.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.
Le rapporteur,
Thierry BesseLa présidente,
Danièle Déal
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la ministre de la transition écologique, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY00462