Par un jugement n° 1701332 du 19 octobre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 31 janvier 2018, M. B... E... A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 octobre 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 10 avril 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de trente jours, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal a fondé sa décision sur des éléments qui n'ont pas été soumis à la procédure contradictoire ;
- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande alors qu'il incombait au préfet d'établir l'absence de bien-fondé des avis favorables rendus par le médecin de l'agence régionale de santé quant à la disponibilité d'un traitement ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnait le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour entache d'illégalité la mesure d'éloignement prise sur son fondement, qui méconnaît également les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français entache d'illégalité la décision fixant le pays de renvoi, qui viole également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par décision du 19 décembre 2017, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 juin 2018, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant de la République démocratique du Congo né en 1981, est entré au mois d'avril 2012 en France, où sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 10 juillet 2013 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 février suivant. Par arrêté du 10 avril 2017, le préfet du Puy-de-Dôme a rejeté la demande de titre de séjour que M. A... a formée à raison de son état de santé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office. M. A... relève appel du jugement du 19 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si le tribunal administratif s'est mépris sur l'origine et la nature de la "fiche pays" dont son jugement fait état, cette seule circonstance ne suffit pas pour considérer que les premiers juges ont méconnu le caractère contradictoire de la procédure en se fondant sur un élément dont le requérant, qui a produit ses observations critiques sur les pièces effectivement produites par le préfet du Puy-de-Dôme, n'aurait pas eu communication.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...). " ;
4. Pour refuser d'autoriser M. A... à séjourner en France, le préfet du Puy-de-Dôme s'est fondé sur la circonstance que l'état de santé de celui-ci pouvait faire l'objet d'une prise en charge appropriée dans son pays d'origine. Ce faisant, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas fait sien l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 4 avril 2016 réitérant un avis du 12 février 2015 rendu après examen de l'intéressé par la commission médicale régionale et selon lequel les soins requis par l'état de santé de l'intéressé ne pouvaient lui être prodigués en République démocratique du Congo. Toutefois, le préfet du Puy-de-Dôme, qui n'était pas lié par cet avis, a produit devant le tribunal administratif et la cour des éléments circonstanciés relatifs à l'offre médicale en République démocratique du Congo, en particulier les informations communiquées le 5 septembre 2013 par le médecin conseil auprès de l'ambassade de France exerçant à la polyclinique de Kinshasa, faisant apparaître les possibilités de suivi médical et pharmacologique des pathologies, en particulier de l'affection psychiatrique, dont souffre M. A.... Les circonstances dont fait état le requérant, qui évoque en particulier l'hypertension dont il souffre également et l'absence des médicaments qui lui sont administrés de la liste des médicaments essentiels disponibles en République démocratique du Congo, ne suffisent pas pour considérer que, contrairement à ce qu'a retenu l'autorité préfectorale, aucun suivi approprié de l'état de santé de M. A...ne serait disponible dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Puy-de-Dôme aurait sur ce point entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Pour les motifs exposés au point 4, M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, ni à invoquer la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vertu desquelles un étranger remplissant les conditions pour obtenir une carte de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 de ce code ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
6. Pour contester la décision désignant la République démocratique du Congo comme pays de renvoi, M. A... excipe de l'illégalité des décisions sur le fondement desquelles elle a été prise, et invoque la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Eu égard à ce qui a été dit aux points 4 et 5 du présent arrêt et alors que M. A... n'assortit d'aucune précision le moyen selon lequel il serait exposé à des persécutions en cas de retour dans son pays d'origine, ces moyens ne peuvent qu'être écartés.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 10 avril 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de M. A... à fin d'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions que M. A... présente à cette fin doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Christine Psilakis, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 octobre 2018.
1
2
N° 18LY00396
dm