M. C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du préfet de la Drôme :
- du 13 février 2015 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
- du 18 mars 2015 l'assignant à résidence.
Par un jugement nos 1501711-1501712 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions du 13 février 2015 mentionnées ci-dessus, refusant un titre de séjour à M. et MmeC..., enjoint au préfet de la Drôme de réexaminer leur situation et mis à la charge de l'Etat le paiement à Me Lantheaume, avocat, de la somme de 800 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 juillet 2015 sous le n° 15LY02419, présentée pour M. et MmeC..., il est demandé à la Cour :
1°) de réformer l'article 3 de ce jugement nos 1501711-1501712 du tribunal administratif de Grenoble du 25 juin 2015 en tant qu'il a limité à 800 euros la somme mise à la charge de l'Etat au bénéfice de Me Lantheaume au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
2°) de porter cette somme à 1 800 euros.
Ils soutiennent que :
- hors taxe sur la valeur ajoutée, la somme allouée par le tribunal administratif n'est que de 640 euros, ce qui est inférieur à l'aide juridictionnelle et hors de proportion avec les frais exposés ;
- le tribunal administratif a méconnu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 selon lequel la somme allouée ne peut être inférieure à l'aide juridictionnelle ;
- la somme à accorder doit être fixée à 1 800 euros.
En application de l'article R. 811-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par lettres du 3 décembre 2015, de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité de la requête, M. et Mme C...n'ayant pas intérêt à faire appel du jugement attaqué en tant que, par son article 3, le tribunal administratif a statué sur des conclusions présentées non par eux, mais par leur conseil. Si la requête d'appel devait être regardée comme étant, en réalité, présentée par Me Lantheaume, elle serait irrecevable, faute d'être signée par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 811-7 du code de justice administrative, cet avocat ne pouvant se représenter lui-même. Cette dernière irrecevabilité est toutefois susceptible d'être régularisée, dans un délai de quinze jours.
Par un mémoire enregistré le 15 décembre 2015, Me Lantheaume déclare être l'auteur de la requête susvisée et par des mémoires enregistrés les 15 décembre 2015 et 15 janvier 2016, Me Petit, avocat, déclare représenter Me Lantheaume.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 28 décembre 2006 fixant la majoration des unités de valeur pour les missions d'aide juridictionnelle totale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Clot, président,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me Petit, avocat de Me Lantheaume.
1. Considérant que le 13 février 2015, le préfet de la Drôme a refusé de délivrer un titre de séjour à M. et MmeC..., qui possèdent la nationalité albanaise, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que le 18 mars 2015, ledit préfet les a assignés à résidence ; que par jugement du 25 mars 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé les décisions du 13 février 2015 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et les décisions du 18 mars 2015 portant assignation à résidence ; que le 9 avril 2015, les intéressés ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et Me Lantheaume, alors avocat au barreau de Grenoble, a été désigné pour les assister ; que par un jugement du 25 juin 2015, le tribunal administratif a annulé les décisions du 13 février 2015 portant refus de titre de séjour, enjoint au préfet de réexaminer la situation de M. et Mme C...et mis à la charge de l'Etat le paiement à Me Lantheaume de la somme de 800 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que Me Lantheaume relève appel de ce jugement en demandant que la somme ainsi allouée soit portée à 1 800 euros ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 27 de la loi du 10 juillet 1991 : " L'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle perçoit une rétribution. /L'Etat affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau. /Le montant de cette dotation résulte, d'une part, du nombre de missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d'autre part, du produit d'un coefficient par type de procédure et d'une unité de valeur de référence. /Pour les aides juridictionnelles totales, l'unité de valeur de référence est majorée en fonction du volume des missions effectuées au titre de l'aide juridictionnelle au cours de l'année précédente au regard du nombre d'avocats inscrits au barreau. /La loi de finances détermine annuellement l'unité de valeur mentionnée au troisième alinéa du présent article. " ;
4. Considérant que l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dispose que : " (...) Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. /Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. /Si, à l'issue du délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci. (...). " ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 116 du décret du 19 décembre 1991 : " Pour l'application du quatrième alinéa de l'article 27 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, l'unité de valeur est majorée dans la limite maximum de 30 % du montant fixé par la loi de finances. /L'ensemble des majorations possibles donne lieu à l'établissement de dix tranches égales. /Un arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé du budget fixe annuellement le montant de ces tranches et classe chacun des barreaux dans l'une de ces tranches en fonction du rapport du volume des missions d'aide juridictionnelle effectuées l'année précédente et du nombre d'avocats inscrits au barreau. " ;
6. Considérant qu'aux termes du III de l'article 128 de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 : " L'unité de valeur mentionnée au troisième alinéa de l'article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique est fixée, pour les missions achevées à compter du 1er janvier 2015, à 22,84 . " ;
7. Considérant que l'arrêté du 28 décembre 2006 fixe la majoration des unités de valeur pour les missions d'aide juridictionnelle totale pour le barreau de Grenoble (groupe 3) à 1,02 et qu'ainsi, à compter du 1er janvier 2015, l'unité de valeur s'élevait à 23,86 euros hors taxes ;
8. Considérant que l'article R. 776-1 du code de justice administrative prévoit que : " Sont présentées, instruites et jugées selon les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du présent code, sous réserve des dispositions du présent chapitre, les requêtes dirigées contre : /1° Les décisions portant obligation de quitter le territoire français, prévues au I de l'article L. 511-1 et à l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les décisions relatives au séjour notifiées avec les décisions portant obligation de quitter le territoire français ; 2° Les décisions relatives au délai de départ volontaire prévues au II de l'article L. 511-1 du même code ; /3° Les interdictions de retour sur le territoire français prévues au III du même article ; 4° Les décisions fixant le pays de renvoi prévues à l'article L. 513-3 du même code (...) " ;
9. Considérant que selon l'article 90 du décret du 19 décembre 1991, s'agissant des recours contre les décisions mentionnées à l'article R. 776-1 du code de justice administrative, lorsque l'étranger est placé en rétention ou assigné à résidence (XIV.6), la contribution de l'Etat à la rémunération des avocats prêtant leur concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle correspond à 8 unités de valeur ;
10. Considérant qu'il résulte des dispositions rappelées ci-dessus que pour chacune des instances n° 1501711 et n° 1501712 devant le tribunal administratif de Grenoble, ayant pour objet l'annulation des refus de titre de séjour opposés à M. et MmeC..., qui avaient été assignés à résidence, la rétribution de l'avocat désigné pour les assister était de 229 euros toutes taxes comprises, soit au total 458 euros ; que, dès lors, en mettant à la charge de l'Etat le paiement à cet avocat de la somme de totale de 800 euros, le tribunal administratif n'a pas méconnu les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 selon lesquelles la somme mise à la charge de la partie perdante ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat ; que, dans les circonstances de l'espèce, le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation insuffisante de cette somme ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Me Lantheaume n'est pas fondé à demander la réformation du jugement attaqué ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Me Lantheaume est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B...Lantheaume et au ministre de l'intérieur. Il en sera adressé copie au préfet de la Drôme.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 février 2016.
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N° 15LY02419
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