Procédure devant la cour
I) Par une requête enregistrée le 6 décembre 2018 sous le n° 18LY04369, Mme B...C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble du 3 octobre 2018 ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Grenoble ou, à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 avril 2018 et d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que sa demande a été rejetée comme tardive dès lors que sa demande d'aide juridictionnelle a interrompu le délai de recours contentieux et qu'eu égard aux conditions dans lesquelles la décision lui accordant l'aide juridictionnelle lui a été adressée, le délai de recours n'expirait au plus tôt que le 31 août 2018 ;
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé, est entaché d'un défaut d'examen de sa situation particulière, a été prononcé à l'issue d'une procédure irrégulière faute de recueil préalable d'un avis du collège de médecins de l'Ofii régulièrement composé au vu d'un rapport médical régulièrement transmis, est intervenu en violation du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle remplissait les conditions, porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant en violation de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, viole le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de son état de santé et de l'ancienneté de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 27 mai 2016, porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant en violation de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, procède d'une erreur manifeste d'appréciation et est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour sur le fondement duquel elle a été prononcée ;
- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée, est intervenue en violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant en violation de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire sur le fondement desquels elle a été prise.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 31 octobre 2018.
II) Par une requête enregistrée le 6 décembre 2018 sous le n° 18LY04370, Mme B...C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble du 3 octobre 2018 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'exécution de l'ordonnance en litige risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables et que c'est à tort que sa demande a été rejetée comme tardive dès lors que le dépôt de sa demande d'aide juridictionnelle dans le délai de recours contentieux a interrompu celui-ci et qu'eu égard aux conditions dans lesquelles la décision lui accordant l'aide juridictionnelle lui a été adressée, le délai de recours expirait au plus tôt le 31 août 2018.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. Les deux requêtes visées ci-dessus de Mme C... tendent respectivement à l'annulation et au sursis à exécution de la même ordonnance. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.
Sur les conclusions de la requête n° 18LY04369 tendant à l'annulation de l'ordonnance du 3 octobre 2008 :
2. Ressortissante de la République démocratique du Congo, Mme C... a formé une demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture de l'Isère. Par arrêté du 30 avril 2018, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office. Mme C... relève appel de l'ordonnance du 3 octobre 2018 par laquelle le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté comme tardive sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
3. Aux termes du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation (...) ". Aux termes de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter : / a) De la notification de la décision d'admission provisoire ; / b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ; / c) De la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 et de l'article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ; / d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné (...) ".
4. En présentant une demande d'aide juridictionnelle le 29 mai 2018 en vue de contester l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 avril précédent refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, Mme C... a interrompu en temps utile le délai de recours de trente jours prévu par les dispositions du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si cette demande d'aide juridictionnelle a fait l'objet d'une décision en date du 10 juillet 2018, Mme C... soutient toutefois, sans que les pièces du dossier transmis à la cour ne permettent de la contredire, en l'absence notamment d'un document opposable attestant de sa réception, qu'elle n'a été destinataire de cette décision que moins de trente jours avant le 20 septembre 2018, date à laquelle sa demande a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Grenoble. Dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance dont elle demande l'annulation, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande comme étant, du fait de sa tardiveté, entachée d'une irrecevabilité manifeste. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, comme le demande la requérante à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Grenoble.
Sur les conclusions de la requête n° 18LY04370 à fin de sursis à exécution :
5. Le présent arrêt statue sur les conclusions de la requête de Mme C... tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance.
Sur les frais liés au litige :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la requérante tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble du 3 octobre 2018 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Grenoble.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18LY04370 à fin de sursis à exécution de l'ordonnance du 3 octobre 2018.
Article 4 : Les conclusions des requêtes de Mme C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 avril 2019.
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N° 18LY04369-18LY04370
md