Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 septembre 2017, M. C... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 juin 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de la Loire du 25 juillet 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, dans le délai d'un mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de statuer à nouveau sur sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que sa compagne ne bénéficiait pas de la protection de l'OFPRA ;
- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé entache d'illégalité les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation de son pays de destination.
Par un mémoire enregistré le 9 mars 2018, le préfet de la Loire informe la cour que la requête n'appelle pas d'observations particulières de sa part.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 8 août 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
1. Considérant que M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né en 1989, est entré au mois de décembre 2005 en France, où il a été pris en charge par les services du département de la Loire en qualité de mineur isolé ; que, par arrêté du 25 juillet 2016, le préfet de la Loire a rejeté une nouvelle demande de titre de séjour formée par M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé ; que M. B... relève appel du jugement du 27 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Loire du 25 juillet 2016 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté par le préfet de la Loire, qui n'a pas présenté de conclusions ni d'observations en défense devant le tribunal administratif ou la cour, que M. B... était présent en France depuis près de onze ans à la date de la décision critiquée et père d'un enfant âgé de quelques mois né de sa relation avec une compatriote bénéficiant de la protection subsidiaire et avec laquelle il vit en concubinage ; que, dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir que le refus de titre de séjour que le préfet de la Loire lui a opposé après avoir pris en considération sa situation personnelle et familiale au regard des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales porte, au regard des buts en vue desquels il a été pris, une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, M. B... est fondé à soutenir que cette décision a été prise en méconnaissance de ces stipulations ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à demander, outre l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 juin 2017, celle de l'arrêté du préfet de la Loire du 25 juillet 2016 rejetant sa demande de titre de séjour et, sur le fondement de ce refus, prescrivant son éloignement ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif qui fonde l'annulation prononcée par le présent arrêt et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans la situation de droit ou de fait du requérant y fasse obstacle, cette annulation implique que le préfet de la Loire délivre à M. B... une carte de séjour temporaire au titre de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu dès lors d'enjoindre au préfet de la Loire de procéder à cette délivrance dans un délai de deux mois ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les frais liés au litige :
6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce et alors que M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 8 août 2017, il y a lieu de faire application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à ce titre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me A..., sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1700592 du tribunal administratif de Lyon du 27 juin 2017 et l'arrêté du préfet de la Loire du 25 juillet 2016 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire de délivrer à M. B... la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me D... A... la somme de 1 000 euros (mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me D...A....
Copie en sera adressée :
- au préfet de la Loire,
- au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Etienne.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2018, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 avril 2018.
1
2
N° 17LY03345
md