Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 20 février 2015 et 9 mars 2016, l'association foncière urbaine libre de Leyriat, représentée par la SELARL Levanti, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 décembre 2014 ;
2°) d'annuler la décision du maire d'Allinges du 11 décembre 2013 ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Allinges une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable, dès lors qu'elle a été introduite dans le délai requis de deux mois et que son président représente l'association en justice, l'assemblée générale ayant décidé d'engager la procédure ;
- la décision critiquée méconnaît les droits qu'elle tire, en vertu de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, du certificat d'urbanisme qui lui a été délivré le 5 novembre 2012 alors que son projet est raccordable au réseau d'assainissement séparatif existant ;
- la décision critiquée méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que son projet ne porte pas atteinte à la salubrité publique, la zone accueillant à la fois un réseau d'assainissement unitaire et un réseau séparatif qui relèvent tous deux de l'assainissement collectif, l'information relative à l'impossibilité de se raccorder au réseau unitaire n'ayant pas été donnée en temps utile et le raccordement au réseau séparatif étant possible.
Par des mémoires en défense enregistrés les 24 novembre 2015 et 26 septembre 2016, la commune d'Allinges, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que l'appel est tardif, qu'il n'est pas justifié d'une décision de l'assemblée générale de l'association décidant de former appel et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gille, président-assesseur ;
- et les observations de Me B...pour la commune d'Allinges ;
1. Considérant qu'au mois de juin 2013, l'association foncière urbaine libre (AFUL) de Leyriat a présenté une demande de permis d'aménager en vue de la création d'un lotissement sur un terrain situé sur le territoire de la commune d'Allinges, au lieu-dit Leyriat ; que, par un arrêté du 11 décembre 2013, le maire d'Allinges a retiré le permis tacite né du silence conservé sur cette demande et a rejeté celle-ci ; que l'AFUL de Leyriat relève appel du jugement du 18 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du maire d'Allinges du 11 décembre 2013 ;
2. Considérant que, pour prendre la décision critiquée, le maire d'Allinges s'est fondé sur l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et la circonstance que le projet de lotissement de l'AFUL était de nature à porter atteinte à la salubrité publique dès lors que ce projet, situé dans une zone inapte à l'assainissement autonome, était desservi par un réseau d'assainissement unitaire ne pouvant accueillir de nouveaux branchements ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété (...) applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme (...) ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ;
4. Considérant que, si, comme l'expose la requérante et comme elle en justifie, le terrain d'assiette du projet en litige est desservi par un réseau d'assainissement séparatif auquel il lui est possible de se raccorder, il ressort des écritures mêmes de l'AFUL de Leyriat et des pièces qu'elle produit, en particulier du programme d'aménagement du lotissement Le Clos Leyriat joint à sa demande de permis d'aménager, que les modalités envisagées pour assurer l'assainissement de celui-ci consistaient exclusivement en un raccordement au réseau unitaire situé sous le chemin de Leyriat ; qu'il est constant que, comme l'a indiqué la communauté de communes des collines du Léman dans son avis du 25 juillet 2013, ce réseau unitaire n'est pas en mesure d'accueillir de nouveaux branchements ; qu'ainsi et au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le permis d'aménager tacite dont était initialement titulaire la requérante doit être regardé comme procédant d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, dans ces conditions, le maire d'Allinges a pu légalement, comme il l'a fait le 11 décembre 2013, retirer ce permis puis, faisant une exacte application de l'article R. 111-2 précité, refuser de délivrer l'autorisation sollicitée par l'AFUL de Leyriat ; que le moyen tiré par la requérante de ce que son projet n'est pas de nature à porter atteinte à la salubrité publique doit être écarté ;
5. Considérant que, pour contester l'arrêté du 11 décembre 2013, l'AFUL de Leyriat fait également valoir qu'elle a obtenu un certificat d'urbanisme du 5 novembre 2012 pris sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme et faisant état de ce que l'opération envisagée pouvait être réalisée ; que, si, sous la condition de délai qu'elles fixent, les dispositions précitées de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme confèrent à la personne à laquelle un certificat d'urbanisme a été délivré un droit à voir sa demande d'autorisation examinée au regard des dispositions d'urbanisme qu'il mentionne, elles ne sauraient toutefois avoir pour effet de justifier la délivrance par l'autorité administrative d'un permis d'aménager pour un projet méconnaissant les dispositions d'urbanisme qui lui sont applicables, en l'espèce celles de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ; que le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;
6. Considérant que, si l'AFUL de Leyriat expose qu'elle a été destinataire d'avis, de courriers ou de schémas contradictoires ou ambigus émanant en particulier de la communauté de communes des collines du Léman et l'ayant empêchée de présenter en temps utile un projet alternatif d'assainissement de son lotissement par un raccordement au réseau séparatif qui dessert également son terrain, cette circonstance est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, prise par l'autorité administrative au vu du dossier qui lui était soumis et prévoyant un raccordement au réseau unitaire ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune d'Allinges, que l'AFUL de Leyriat n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que la requérante présente sur leur fondement à l'encontre la commune d'Allinges, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de l'AFUL de Leyriat le versement à la commune d'Allinges d'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association foncière urbaine libre de Leyriat est rejetée.
Article 2 : L'association foncière urbaine libre de Leyriat versera une somme de 1 500 euros à la commune d'Allinges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association foncière urbaine libre de Leyriat et à la commune d'Allinges.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
M. Fraisse, président de la cour ;
M. Gille, président-assesseur ;
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 novembre 2016.
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N° 15LY00592
mg