Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 avril 2018 et un mémoire de production de pièces enregistré le 30 juillet 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 mars 2018 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet de l'Isère du 27 octobre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer, dans le délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, un tire de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas fait droit au moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission du titre de séjour du 12 juin 2017, qui ne mentionne pas le nom et la qualité de ses membres ;
- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, l'arrêté critiqué procède d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 avril 2018 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant angolais né en 1972, a sollicité le bénéfice d'une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 27 octobre 2017, le préfet de l'Isère a rejeté la demande de M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office et a prononcé à son égard une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 15 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de l'Isère du 27 octobre 2017 :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée (...) à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...). / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;
3. Contrairement à ce que soutient M. B..., la circonstance que seul le président a signé le procès-verbal de la réunion de la commission du titre de séjour du 12 juin 2017 au cours de laquelle il a été entendu, ne permet pas de considérer que l'avis de cette commission, qui fait mention du nom et de la qualité de ses membres, a été recueilli dans des conditions irrégulières.
4. Pour demander l'annulation du refus de titre de séjour et des décisions subséquentes qui lui ont été opposés, M. B... fait également valoir sa présence en France depuis 2002, son absence d'attaches familiales en Angola et ses efforts d'intégration qui se sont en particulier traduits par l'exercice d'une activité professionnelle ou le suivi de formations en vue d'en exercer une. Il est toutefois constant que M. B... est dépourvu d'attaches familiales en France, où il s'est maintenu malgré le rejet de précédentes demandes de titre de séjour. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, les décisions en litige ne portent pas au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et ne méconnaissent ainsi pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les circonstances dont le requérant fait état, tirées notamment de sa bonne insertion dans la société française et de ses projets professionnels, ne permettent pas davantage de considérer que le préfet de l'Isère a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'admission exceptionnelle au séjour ou des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de l'intéressé.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble, dont le jugement est suffisamment motivé, a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 27 octobre 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
6. Le présent arrêt, qui confirme le rejet par le tribunal administratif des conclusions de M. B... dirigées contre les décisions préfectorales du 27 octobre 2017, n'appelle aucune mesure d'exécution.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 octobre 2018.
Le rapporteur,
Antoine GilleLe président,
Yves Boucher
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et au préfet de l'Isère en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 18LY01270
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