Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 janvier 2021 et le 2 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Paquet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt, sous la même astreinte ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la décision attaquée méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet aurait dû faire usage de son pouvoir de régularisation ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision attaquée se fonde sur un refus de titre de séjour illégal ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :
- la décision attaquée se fonde sur des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français illégales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
- la décision attaquée se fonde sur des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français illégales.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure,
- et les observations de M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant kosovar né le 12 septembre 2001, est entré en France le 1er octobre 2015, selon ses déclarations, en compagnie de sa mère et de sa sœur. Par un courrier du 5 septembre 2019, M. B... a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et sur celui de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 février 2020, le préfet de l'Ain a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que M. B..., entré en France alors qu'il était mineur, s'est maintenu sur le territoire national avec ses parents qui n'ont pas été admis au séjour à l'exception de la période durant laquelle leur demande d'asile a été examinée et qui font également l'objet de mesures d'éloignement. Si le requérant a été régulièrement scolarisé en France et a obtenu le certificat d'aptitude professionnelle " agent polyvalent de restauration " le 30 juin 2020, et s'il bénéficie d'attestations encourageantes de ses professeurs, l'intéressé, qui s'est inscrit, au titre de l'année scolaire 2020-2021, dans une préparation au certificat d'aptitude professionnelle " commercialisation et services en hôtel-café-restaurant ", ne démontrait, à la date de la décision attaquée, aucune progression réelle dans sa formation. La seule circonstance qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche en qualité de cuisinier établie par le gérant du restaurant Le Zest à Belley (Ain), à une date au demeurant non précisée, et qu'il ait conclu le 10 mai 2021 une convention avec l'entreprise Le Restaurant des amis à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie) en vue de la réalisation d'un stage de trois semaines n'est pas de nature à lui conférer un droit au séjour. Le requérant n'est pas dépourvu de toute attache privée et familiale au Kosovo, où il a vécu jusqu'à l'âge de quatorze ans, où ses parents et ses frères et sœurs ont vocation à retourner vivre et où il pourra lui-même poursuivre sa formation. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée ne porte pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, elle n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".
5. Si M. B... fait valoir qu'il séjourne en France depuis plus de quatre ans, qu'il a été régulièrement scolarisé, qu'il a obtenu le certificat d'aptitude professionnelle " agent polyvalent de restauration " et qu'il est titulaire d'une promesse d'embauche, ces éléments ne suffisent pas, dans les circonstances de l'espèce, à caractériser des considérations humanitaires ni des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de l'Ain n'a pas entaché la décision de refus de titre de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.
6. En troisième lieu, le préfet de l'Ain, dans les circonstances de l'espèce, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne régularisant pas, à titre exceptionnel, la situation de M. B....
7. En dernier lieu, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour, le requérant reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance tiré de ce que le préfet a omis de procéder à un examen particulier de sa situation. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour les motifs exposés au point 3, les moyens de M. B... tirés de ce que le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ne peuvent qu'être écartés.
10. En dernier lieu, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, le requérant reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance tiré de ce que le préfet a omis de procéder à un examen particulier de sa situation. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon.
Sur la légalité de la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
12. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction qu'en lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours, le préfet de l'Ain aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
13. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
14. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.
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N° 21LY00045