Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 5 février 2021, M. C... A..., représenté par Me Couderc, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 30 avril 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet, en cas d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois ou subsidiairement de réexaminer sa situation, ou en cas d'annulation de la seule décision portant obligation de quitter le territoire français de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à réinstruction de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 1 200 euros, sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant refus de délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour et de l'illégalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
M. C... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux, premier conseiller,
- et les observations de Me Lulé, représentant M. C... A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A..., ressortissant angolais né en 1982, est entré en France le 30 novembre 2014 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 21 octobre 2015 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 11 mai 2016. L'intéressé a néanmoins obtenu la délivrance d'un titre de séjour, renouvelé jusqu'au 17 février 2019, sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, en raison de son état de santé. Par un arrêté du 30 avril 2020, le préfet du Rhône lui en a refusé le renouvellement. Il a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours, prise sur le fondement des 3° et 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a fixé le pays de destination. M. C... A... relève appel du jugement du 30 septembre 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 11°A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article L. 511-4 de ce code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
3. Par son avis du 6 février 2020, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. C... A..., qui souffre d'une psychose schizophrénique, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour contester le refus de renouvellement de son titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français pris par le préfet du Rhône au vu de cet avis, M. C... A... soutient qu'il ne pourra pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé en Angola compte tenu des traumatismes qu'il y a vécu et qu'un seul des quatre médicaments qui lui ont été prescrits apparaît sur la fiche MedCoi produite par le préfet en première instance. Toutefois, les certificats médicaux qu'il produit, rédigés sur la foi de ses déclarations, ne permettent pas de démontrer que la pathologie dont il souffre serait en lien direct avec les évènements traumatisants qu'il allègue avoir subis dans son pays d'origine et qui n'ont d'ailleurs pas été tenus pour établis par le directeur général de l'OFPRA puis par la CNDA. Par ailleurs, en se bornant à soutenir qu'un seul des quatre médicaments prescrits en France serait disponible en Angola, l'intéressé ne démontre pas qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement médicamenteux, alors que la fiche MedCoi produite par le préfet en première instance fait état de la disponibilité d'antipsychotique, d'anxiolytique, d'antidépresseur et d'hypnotique, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils ne seraient pas adaptés à son état de santé. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur version alors en vigueur, dirigés respectivement contre la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français doivent être écartés.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. C... A... fait valoir la durée de sa présence régulière en France ainsi que la nécessité pour lui d'y poursuivre les soins dont il bénéficie. Cependant, l'intéressé, entré irrégulièrement en France à l'âge de 32 ans, ne justifie d'aucune intégration ni d'aucun lien personnel ou familial sur le territoire et n'établit pas qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Dès lors, en refusant le renouvellement de son titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de M. C... A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Le préfet du Rhône n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. En troisième lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que M. C... A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français. Il n'est pas non plus fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour ni de celle l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de lui accorder un délai de départ volontaire de quatre-vingt-dix jours et celle fixant le pays de destination.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
8. M. C... A... soutient qu'il existe un risque de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine où il a été accusé de sorcellerie suite au décès de son frère et de sa sœur, puis de ses parents, a échappé à une tentative d'assassinat de la part de ses proches puis a été interpellé en possession de matériel de protestation contre les expulsions des ressortissants congolais et placé en détention trois jours avant de s'évader et de quitter le pays. Il n'apporte toutefois à la cour aucun élément de nature à établir l'existence de risques personnels et actuels en cas de retour dans son pays d'origine et ce alors, ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, que l'OFPRA puis la CNDA ont rejeté sa demande d'asile fondée sur le même récit. En outre, l'intéressé ne démontre pas que sa pathologie ne pourrait pas être effectivement prise en charge en Angola. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que M. C... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. En conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais du litige doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evrard, président de la formation de jugement,
Mme Caraës, première conseillère,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 février 2022.
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N° 21LY00397