Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 avril 2019 et le 7 novembre 2019, M. F..., représenté par Me H..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 mars 2019 ;
2°) de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011, ainsi que des majorations correspondantes, à hauteur de 5 358 euros.
Il soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors que l'administration fiscale aurait dû mettre en oeuvre, pour identifier le bénéficiaire des revenus distribués, la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts ;
- c'est à tort que l'administration fiscale a considéré qu'il était le bénéficiaire d'un avantage occulte, sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts, à raison de la livraison d'un spa par la SNC MCF Gedimat dès lors qu'il n'a aucune relation d'intérêt avec cette société et que le bénéficiaire de cet avantage est en réalité son frère, M. A... F....
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme J..., rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SARL F..., qui a pour objet l'exécution de travaux de maçonnerie et de gros oeuvre en bâtiment et a pour associés M. G... F... et son frère, M. A... F..., qui en assure la gérance, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, au cours de laquelle l'administration a été informée, dans le cadre du droit de communication prévu à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de l'ouverture d'une procédure judiciaire à l'encontre de l'un des fournisseurs de la SARL F..., la SNC MCF Gedimat. Ayant constaté que cette société avait livré quatre spas, respectivement, à MM. Frédéric et José F..., à M. E... F..., père de ces derniers, ainsi qu'à un tiers, sans que ces avantages ne soient comptabilisés, l'administration a réintégré dans le résultat de l'exercice clos en 2011 de la SARL F... la valeur de ces avantages. Parallèlement à cette vérification de comptabilité, l'administration a procédé à un contrôle sur pièces de M. G... F... au titre de l'année 2011, à l'issue duquel elle a imposé entre ses mains, sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts, la somme de 6 912 euros correspondant à la valeur de l'un des spas. M. F... a, en conséquence, été assujetti à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assortis de majorations, au titre de l'année 2011. Il relève appel du jugement du 19 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à hauteur du dégrèvement de la majoration de 25 % apportée à ses revenus, a rejeté le surplus de ses conclusions à fin de décharge de ces impositions et majorations.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ".
3. Il résulte de ces dispositions que, si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à l'amende prévue par ces dispositions mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier. Il résulte de l'instruction que le service, qui a recueilli au cours de la vérification de comptabilité différents éléments démontrant que l'équipement en litige avait été installé au domicile de M. G... F..., était en mesure d'identifier ce dernier comme bénéficiaire des revenus regardés comme distribués par la SARL F.... Il suit de là que, contrairement à ce que soutient le requérant, la circonstance que le service n'a pas demandé à cette dernière de désigner le bénéficiaire des distributions est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ".
5. Il est constant qu'au cours de la vérification de comptabilité de la SARL F..., l'administration a constaté que, dans le cadre d'un système occulte de fidélisation de la clientèle en application duquel des cadeaux, dits " challenges ", étaient remis par la SNC MCF Gedimat à ses clients en contrepartie de leurs commandes, la SNC MCF Gedimat a adressé à la SARL F... un " bon de commande ", daté du 21 avril 2011, portant sur la livraison à cette dernière de quatre spas, pour un montant total de 27 648 euros, soit 6 912 euros unitaire, et indiquant expressément que l'un de ces spas devait être déposé chez M. G... F.... L'administration soutient que la SARL F... a ainsi consenti une libéralité à son associé. A cet égard, elle fait valoir, sans être contredite, que, lors de son audition par les services de police, M. A... F... a reconnu que cet équipement avait été livré à titre gratuit chez son frère Fréderic, ce qu'a confirmé le chauffeur de la SNC MCF Gedimat. M. F... soutient que le bon de commande du 21 avril 2011 n'est pas signé et que l'avantage dont il a bénéficié présente un caractère indirect, dès lors qu'il était destiné initialement à son frère, M. A... F.... Le requérant ne conteste toutefois pas qu'il a été le seul bénéficiaire du bien en question, qui a été installé à son domicile. L'administration, qui fait état des relations d'intérêts entre M. G... F..., associé de la SARL F..., et des relations familiales liant le requérant au gérant et aux autres associés de cette société, établit l'intention de la SARL F..., qui a fait procéder à la livraison du spa en cause au domicile du requérant, d'octroyer à ce dernier, et celle du requérant de recevoir, une telle libéralité. Dans ces circonstances, cette opération, qui n'a pas été portée en comptabilité par la SARL F..., relève d'un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices, au sens et pour l'application du c. de l'article 111 du code général des impôts, imposable entre les mains de son bénéficiaire, M. F....
6. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. F... la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme D..., présidente-assesseure,
Mme C..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 18 mars 2021.
N° 19LY01546