Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2016, la SARL Mami, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'exercice de son droit de réméré en 2011 conduisait nécessairement à rétablir à l'actif de son bilan le terrain et la construction tels qu'ils étaient comptabilisés en 2001 et, du fait de la destruction accidentelle de l'immeuble en 2003, au constat de la perte correspondant, à hauteur de la valeur comptable résiduelle de l'immeuble détruit ;
- la réintégration de la provision pour risque de réméré devenue sans objet en 2011 doit être compensée par la constatation de la perte, constatée au titre de l'année de résolution de la vente, résultant de la destruction de l'immeuble cédé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente assesseure,
- et les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat de vente à réméré du 27 décembre 2001, la société civile immobilière La Bourne a cédé un ensemble immobilier composé d'un bâtiment à usage de scierie et de terrains situés sur le territoire de la commune de Lans-en-Vercors, pour lequel elle se réservait la faculté de rachat prévu par l'article 1659 du code civil. Elle a constitué, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2001, une provision de 120 711 euros pour risque de réméré. Le 4 août 2006, elle a notifié à l'acquéreur sa volonté d'exercer sa faculté de réméré prévue dans l'acte de vente. Un litige s'étant alors élevé entre la SCI La Bourne et son acquéreur concernant le montant de la somme due au titre de l'exercice du réméré, c'est en octobre 2011 que la SCI La Bourne est rentrée en possession du bien initialement cédé, le contrat initial se trouvant alors résolu. L'administration a, dans le cadre d'un contrôle sur pièces, considéré que la provision pour risque de réméré se trouvait du fait de cette résolution, dépourvue d'objet, et l'a réintégrée dans les résultats sociaux de l'année 2011. Elle a, par proposition de rectification du 23 avril 2013, notifié les conséquences de cette rectification à la SARL Mami, qui détient 98,65 % du capital de la SCI La Bourne. La SARL Mami relève appel du jugement du 31 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, refusant de faire droit à sa demande de compensation, a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011 à raison des rectifications ainsi apportées aux résultats de la SCI La Bourne.
2. D'une part, aux termes de l'article de l'article 1659 du code civil : " La faculté de rachat est un pacte par lequel le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal et le remboursement dont il est parlé à l'article 1673 ". Selon l'article 1673 du même code : " Le vendeur qui use du pacte de rachat doit rembourser non seulement le prix principal, mais encore les frais et loyaux coûts de la vente les réparations nécessaires, et celles qui ont augmenté la valeur du fonds, jusqu'à concurrence de cette augmentation. Il ne peut entrer en possession qu'après avoir satisfait à toutes ces obligations (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande ". Aux termes de l'article L. 205 du même livre : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition " ;
4. Il résulte de l'instruction que si le bâtiment objet de la vente a été totalement détruit par un incendie en 2003, l'acquéreur a fait reconstruire, entre 2004 et 2006, à l'aide d'une indemnité d'assurance de 506 164 euros, sur la même parcelle, un bâtiment d'une surface comparable. Au moment où la SCI La Bourne a exercé son droit de réméré, le bien disparu avait, ainsi, été remplacé, de sorte que c'est un ensemble immobilier complet, comprenant à la fois des terrains et une construction, qui est revenu dans le patrimoine de la SCI La Bourne en 2011. Les biens reconstruits objet du rachat et réputés n'avoir jamais quitté son patrimoine ont, ainsi, été inscrits à l'actif immobilisé de son bilan au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011 pour le prix de 556 216 euros, qu'elle a versé à l'acquéreur en octobre 2011 et ont donné lieu à des amortissements calculés sur la base de cette valeur d'inscription à l'actif du bilan, comptabilisés dès la clôture de l'exercice 2011. Il en résulte que, si la vente conclue en 2001 s'est trouvé rétroactivement résolue en 2011 du fait de l'exercice par la SCI La Bourne de son droit de rachat, la destruction du bien initialement vendu n'a pas été à l'origine d'une perte susceptible de venir en diminution de l'actif de cette société. En l'absence de perte susceptible d'être constatée au moment de l'exercice par la SCI La Bourne de son droit de réméré, aucune surtaxe n'a été commise à son préjudice. Dès lors qu'aucune surtaxe n'a été commise au préjudice de la SCI La Bourne, la SARL Mami, qui ne conteste pas le bien-fondé de la réintégration dans les résultats sociaux de la provision pour risque de réméré devenue sans objet, n'est pas fondée à revendiquer le bénéfice de la compensation prévue par les dispositions précitées de l'article L. 205 du livre des procédures fiscales.
5. Il résulte de ce qui précède que la SARL Mami n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Mami est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Mami et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 2 mai 2018, à laquelle siégeaient :
Mme Menasseyre, présidente assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
MmeA..., première conseillère,
Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 22 mai 2018.
N° 16LY03844 2