Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 janvier 2015, le préfet du Rhône demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 de ce jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon du 19 décembre 2014 ;
2°) de mettre à la charge de M. C... le versement d'une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le préfet du Rhône soutient :
- à titre principal, qu'il remplit parfaitement ses obligations en matière de droit à l'information des demandeurs d'une protection internationale prévu à l'article 4 du règlement (UE) du 26 juin 2013 ; que les parties A et B prévues à l'annexe X audit règlement sont communiquées aux demandeurs d'asile dès leur première convocation dans ses services ; en l'espèce le formulaire de demande d'admission au séjour au titre de l'asile comprend expressément une mention selon laquelle M. A... " certifie sur l'honneur que [...] le guide du demandeur d'asile et l'information sur les règlements communautaires [lui] ont été remis " ; cette information est constituée des deux brochures précitées ; contrairement à l'inversion de la charge de la preuve opérée par le juge de première instance, il appartient à l'étranger de démontrer qu'il n'a pas reçu les brochures précitées, alors qu'il a certifié sur l'honneur en avoir eu communication ; en estimant que l'information devant être apportée à M. C... l'a été tardivement, le juge de première instance a commis une erreur de fait ; que le vice allégué ne l'a pas privé d'une garantie ; que le droit à l'information dont M. C...soutient avoir été privé a été parfaitement respecté en l'espèce ;
- à titre subsidiaire, que l'exposé du déroulé des différentes étapes de cette procédure met en exergue l'absence de privation effective d'une garantie pour les demandeurs d'asile ; qu'à supposer que M. C...n'ait pas été rendu destinataire des brochures d'information " Partie A " et " Partie B ", les informations délivrées à l'intéressé ne l'ont pas privé de son droit à l'information ; le " guide du demandeur d'asile " qui lui a été communiqué dès sa première convocation comprend une information sur la procédure dite " Dublin " en annexe 2, conformément aux objectifs assignés par les textes réglementaires ; les critères d'appréciation de sa demande devant être portés à sa connaissance en vertu de l'article 4-1 b du règlement, sont énumérés en page 41 du document (" documents en votre possession, déclarations et consultation de la base de données européenne EURODAC "), tout comme les motifs entraînant la responsabilité d'un autres Etat membre pour l'examen d'une demande d'asile (p.41 §2) ; si les dispositions communautaires prévoient la délivrance d'une information " dès qu'une demande de protection internationale est introduite ", en l'espèce M. C... s'est vu remettre une nouvelle fois la brochure B lors du refus d'admission provisoire au séjour et a pu disposer des ressources juridiques de la plate-forme de Forum Réfugiés dont l'une des principales missions est l'information des demandeurs d'asile ;
- il est fondé à demander au nom de l'Etat la condamnation de M. C... au versement d'une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 juillet 2015, M. C..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande incidemment à la cour :
1°) d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile dans un délai de 48 heures à compter de la décision à intervenir, et de lui remettre le dossier de demande d'asile à transmettre à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sous le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous les mêmes conditions, en sa qualité de demandeur d'asile ;
3°) dans tous les cas de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers frais et dépens de la présente instance.
M. C... soutient que :
- il n'a pas été mis en possession du formulaire " A ", seuls le " guide des demandeurs d'asile 2013 " et le formulaire " B " lui ont été délivrés à l'issue de son rendez-vous en préfecture le 3 septembre 2014, postérieurement à l'introduction de sa demande d'asile, de sorte qu'il n'a pas reçu les informations nécessaires lui permettant de faire valoir des éléments pertinents lors de l'entretien individuel ; son information n'a été que partielle et à tout le moins tardive ; dans ces conditions, il est fondé à soutenir que la décision contestée a été rendue au terme d'une procédure irrégulière en méconnaissance de ses droits ; il n'a pas reçu dès l'introduction de sa demande d'asile le 13 août 2014, ni lors de l'enregistrement de celle-ci le 20 août 2014 les informations obligatoires prévues aux articles 4 et 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; le guide du demandeur d'asile 2013 qui reprend les informations relatives au règlement Dublin II n'est pas à jour et ne fait pas mention de l'ensemble des informations prévues par l'article 4 du règlement n° 604/2013 ;
- l'exposé des faits par le préfet du Rhône n'est justifié par aucune pièce ; il se borne à produire la copie des formulaires exigés ce qui n'est pas de nature à remettre en cause ses allégations, alors que dès la première instance le préfet n'a produit que le formulaire " B " contresigné par ses soins le 3 septembre 2014 ; il ne ressort ainsi pas des pièces communiquées qu'il se serait vu remettre lesdits formulaires d'information A et B préalablement lui permettant de faire valoir des éléments pertinents lors de l'entretien ;
- l'association Forum Réfugiés n'est pas chargée de remettre les brochures " A " et " B " mentionnant les informations prévues à l'article 4 du règlement n° 604/2013 et reprises en annexe X ; le livret d'accueil du demandeur d'asile d'avril 2009 n'est pas à jour et ne comporte que des informations succinctes ; il n'est pas de nature à remplir l'obligation d'information de l'intéressé conforme par écrit et dans une langue qu'il comprend dès l'introduction de sa demande d'asile en application du règlement n °604/2013 ;
- la France n'a pas introduit de voie de recours suspensif de l'exécution de la mesure de réadmission conforme à l'une des trois options possibles prévues par l'article 27 du règlement n°604/2013, d'où l'incomplétude des brochures A et B sur ce point ; par ailleurs le règlement en vigueur Dublin III modifie les droits et garanties des demandeurs d'asile, les délais de mise en oeuvre de la procédure par les états membres, l'ordre des critères, les voies et délais de recours du règlement Dublin II ;
- qu'en l'absence de délivrance des informations prévues à l'article 4 du règlement n°604/2013, il a été privé d'une garantie substantielle en violation du droit fondamental de solliciter l'asile ;
Sur la décision de réadmission du 24 novembre 2014 :
- elle est entachée d'erreur d'appréciation des faits et d'un défaut d'examen particulier et complet de sa situation ;
- elle est entachée d'erreurs factuelles qui démontre l'absence d'examen complet de sa situation ; il n'a pas été tenu compte de ses observations pourtant réceptionnées à la préfecture le 22 octobre 2014, soit dans le délai de 15 jours qui lui était imparti ; il n'a pas été pris en compte la circonstance qu'il a indiqué avoir fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire allemand à destination du Nigéria, ni été procédé à la vérification de ce fait auprès des autorités allemandes ;
- l'article 5 du règlement Dublin III a été méconnu, en l'absence de confidentialité de l'entretien, de remise du résumé de l'entretien en temps utile, de l'absence de remise des formulaires A et B préalablement à l'entretien ;
- l'article 4 du règlement n° 604/2013 a été méconnu en l'absence de remise des informations prévues à cet article par écrit lors de l'introduction de sa demande d'asile ; l'article 18 du règlement n°2725/2000 du conseil du 11 décembre 2000 et de l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 sur le système EURODAC pour la comparaison des empreintes ont été méconnus en l'absence de remise du formulaire concernant l'application du règlement " Eurodac " ce qui l'a privé d'une garantie substantielle ;
- la décision, qui se borne à relever des éléments vagues et stéréotypés sans mentionner aucun élément pertinent tenant à sa situation ni aucun motif justifiant l'application des articles 17-1 et 17-2 du règlement n° 604/2013, est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier au regard des articles 17-1 et 17-2 du règlement n° 604/2013 ;
- cette décision est entachée d'une méconnaissance du droit d'asile et de l'article 17 du règlement n° 604/2013, le préfet devant statuer sur la clause discrétionnaire avant de mettre en oeuvre une réadmission alors que M. C... justifie d'une situation particulière puisqu'il a déjà fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire allemand à destination de son pays d'origine ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation pour ce même motif, dès lors qu'il n'est pas établi que l'Allemagne n'exécutera pas l'obligation de quitter le territoire allemand à son arrivée ;
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CE) n° 2725/2000 du conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Terrade, premier conseiller.
1. Considérant que M. C..., ressortissant congolais (République démocratique du Congo) né le 17 avril 1986 à Kinshasa, a déclaré être entré en France le 13 août 2014, depuis la Turquie, pour solliciter l'asile ; qu'il a présenté une demande d'asile le 3 septembre 2014 ; que, par une décision en date du 3 octobre 2014, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre provisoirement au séjour en qualité de demandeur d'asile et l'a invité à rejoindre l'Allemagne, Etat membre responsable de sa demande d'asile ; que, par une décision en date du 24 novembre 2014, dont il demande l'annulation, le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités allemandes en application des dispositions du règlement (CE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; que M. C... a demandé au magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon l'annulation de cette décision, ensemble l'annulation de la décision du 16 décembre 2014 par laquelle le préfet du Rhône a décidé de l'assigner à résidence ; que, par la présente requête que le préfet du Rhône relève appel du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon en date du 19 décembre 2014 en tant qu'il a annulé ces deux arrêtés, enjoint au préfet de délivrer, sans délai, par écrit à M. C... dans une langue qu'il est susceptible de comprendre, l'information exigée aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, et de procéder au réexamen de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et condamné l'Etat à verser à son conseil la somme de 400 (quatre cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, sous réserve que M. C... obtienne le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
Sur la requête du préfet du Rhône :
2. Considérant que pour annuler les décisions du 24 novembre 2014 et du 16 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a ordonné la remise de M. C... aux autorités allemandes et prononcé son assignation à résidence dans le département du Rhône, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur la circonstance que la seule brochure B avait été communiquée à M. C...en annexe de la décision portant refus d'admission provisoire au séjour en date du 3 octobre 2014, soit postérieurement au dépôt de sa demande au sens de l'article 20 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; qu'il n'a ainsi pu bénéficié des garanties prévues par l'article 4 de ce même règlement (UE) de sorte que l'arrêté prononçant sa remise aux autorités allemandes est intervenu aux termes d'une procédure irrégulière ;
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 4. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...), contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 20 de ce règlement : " ( ...) 2. Une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur (...) est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. 2. L'entretien individuel peut ne pas avoir lieu lorsque: a) le demandeur a pris la fuite; ou b) après avoir reçu les informations visées à l'article 4, le demandeur a déjà fourni par d'autres moyens les informations pertinentes pour déterminer l'État membre responsable. L'État membre qui se dispense de mener cet entretien donne au demandeur la possibilité de fournir toutes les autres informations pertinentes pour déterminer correctement l'État membre responsable avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. "
5. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie ; que la délivrance par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constituant pour le demandeur d'asile une garantie, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi du moyen tiré de l'omission ou de l'insuffisance d'une telle information à l'appui de conclusions dirigées contre un refus d'admission au séjour ou une décision de remise, d'apprécier si l'intéressé a été, en l'espèce, privé de cette garantie ou, à défaut, si cette irrégularité a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ;
6. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention de l'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'administration a satisfait à l'obligation qui lui incombe en application des dispositions précitées ; que, dans un premier temps, seul le préfet est en mesure d'apporter les éléments relatifs à la délivrance d'une information écrite au demandeur ;
7. Considérant qu'il est constant que M. C... s'est présenté à la préfecture du Rhône le 13 août 2014, afin d'y solliciter l'asile ; que le 20 août 2014, lors du dépôt de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, il a été mis en possession de la version 2013 du " guide du demandeur d'asile ", et s'est vu délivré, à la suite de l'entretien individuel prévu à l'article 5 précité du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, la brochure d'information B intitulée " Je suis sous procédure Dublin - qu'est ce que cela signifie ' " ; que M. C... soutient ne pas avoir été mis en possession de la brochure d'information A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union Européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " prévue en annexe X du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; que le préfet du Rhône se borne à soutenir, d'une part, que les parties A et B prévues par le règlement n° 604/2013 sont communiquées aux demandeurs d'asile dès leur première convocation dans ses services, avant que les intéressés ne soient orientés vers la " plateforme Forum Réfugiés " afin d'obtenir une domiciliation postale et une assistance administrative, juridique et matérielle dans leurs démarches et, d'autre part, que le formulaire de demande d'admission au séjour au titre de l'asile comprend expressément une mention selon laquelle l'étranger " certifie sur l'honneur que [...] Le guide du demandeur d'asile et l'information sur les règlements communautaires [lui] ont été remis " ; qu'à défaut de toute précision sur la nature des informations délivrées par la Plateforme Forum Réfugiés, le préfet du Rhône n'établit, ni même n'allègue que M. C... se serait vu remettre la brochure A ; que, dans ces conditions, les documents remis à M. C...ne comportant pas l'ensemble des mentions exigées par les articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'intéressé a été privé de la garantie prévue par les dispositions précitées ; que, par suite, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a pu à bon droit considérer que l'arrêté du 24 novembre 2014 ordonnant la remise de M. C...aux autorités allemandes était intervenu au terme d'une procédure irrégulière et était, pour ce motif, entaché d'illégalité ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a accueilli la demande de M. C...en prononçant notamment l'annulation de la décision du 24 novembre 2014 par laquelle il a ordonné la remise de M. C... aux autorités allemandes, ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation de sa décision du 16 décembre 2014 par laquelle il a ordonné l'assignation à résidence de M. C... ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
Sur la demande tendant à l'exécution du jugement attaqué :
9. Considérant que M. C... n'est pas recevable à demander, à titre reconventionnel, que la cour enjoigne au préfet du Rhône d'exécuter le jugement rendu à son profit dans le cadre de l'appel introduit par cette autorité contre les décisions litigieuses ; qu'il lui appartient seulement, s'il s'y croit fondé, de saisir le président de la cour d'une demande d'exécution de ce jugement sur le fondement des dispositions des articles L. 911-4 et R. 921-5 du code de justice administrative ; qu'ainsi lesdites conclusions ne peuvent être accueillies dans la présente instance ;
Sur les conclusions à fin de condamnation aux dépens :
10. Considérant que la présente instance ne comporte aucun dépens ; que, dès lors, les conclusions de M. C... tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des entiers dépens de l'instance ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. " ;
12. Considérant que M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à MeB..., conseil de M. C..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Rhône est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me B... la somme de 1 000 (mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. C... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2016, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Terrade, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2016.
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N° 15LY00018