Par une requête enregistrée le 20 janvier 2017, M. A... B..., représenté par Me Sabatier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 9 janvier 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté susmentionné ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.
Il soutient qu'en sa qualité de ressortissant français il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2017.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2017 le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête. Le préfet fait valoir que M. B...n'apporte pas la preuve de sa nationalité française, qu'il s'en rapporte aux pièces produites en première instance et qu'aucun des autres moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bourrachot, président.
1. Considérant que M. A...B..., de nationalité albanaise, est entré en France en 2012 ou en 2013 selon ses dires ; que par l'arrêté du 6 janvier 2017, le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas de renvoi et lui a interdit tout retour sur le territoire national pour une durée d'un an ; que M. B...relève appel de du jugement du 9 janvier 2017 par lequel le magistrat " délégué " par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 26-4 du code civil : " A défaut de refus d'enregistrement dans les délais légaux, copie de la déclaration est remise au déclarant revêtue de la mention de l'enregistrement. Dans le délai de deux ans suivant la date à laquelle il a été effectué, l'enregistrement peut être contesté par le ministère public si les conditions légales ne sont pas satisfaites. L'enregistrement peut encore être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte. La cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration prévue à l'article 21-2 constitue une présomption de fraude. " ; qu'aux termes de l'article 26-5 du même code : " (...) les déclarations de nationalité, dès lors qu'elles ont été enregistrées, prennent effet à la date à laquelle elles ont été souscrites." ; qu'aux termes de l'article 30 du même code : " La charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants. " ;
4. Considérant qu'une décision administrative peut être annulée par la voie du recours pour excès de pouvoir sur la base des faits invoqués par le requérant devant le juge et ce alors même que le demandeur n'aurait pas porté à la connaissance de l'administration sa situation réelle à la date de la décision attaquée ; que si les moyens invoquant des faits postérieurs à la date de la décision attaquée sont en principe inopérants dès lors qu'il ne révèlent pas une situation qui lui était antérieure, un requérant reste recevable à invoquer et à établir postérieurement à la décision attaquée, même pour la première fois devant le juge d'appel, toute circonstance de droit ou de fait antérieure à cette décision ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que M. B...a souscrit auprès du tribunal d'instance de Lyon, en vue d'acquérir la nationalité française, une déclaration dont il lui a été donné récépissé le 12 novembre 2016 ; que cette déclaration a été enregistrée le 19 janvier 2017 ; qu'ainsi, en application des dispositions de l'article 26-5 du code civil, elle a pris effet à la date à laquelle elle avait été souscrite ; que, par suite, le 6 janvier 2017, date de l'arrêté du préfet du Rhône décidant son éloignement, M. B...était français ; que, par suite, le préfet du Rhône du Rhône ne pouvait légalement lui faire obligation de quitter le territoire français ; que, par voie de conséquence, les décisions subséquentes privant M. B...d'un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination en cas de renvoi forcé et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an sont illégales ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
7. Considérant que M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Sabatier, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au profit de Me Sabatier, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1700051 du 9 janvier 2017 du magistrat " délégué " par le président du tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet du Rhône, en date du 6 janvier 2017, faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination en cas de renvoi et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à Me Sabatier, conseil de M.B..., une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Sabatier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône. Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lyon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2017 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Terrade, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 août 2017.
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N° 17LY00256