Par une requête enregistrée le 17 décembre 2019, M. C..., représenté par Me Cans, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 juillet 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler la décision du préfet de la Savoie du 26 janvier 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Savoie de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de 48 heures à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de la Savoie de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.
5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 mai 2020, le préfet de la Savoie a conclu au rejet de la requête.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 23 avril 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 mai 2020.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme D... F..., première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant marocain né le 25 décembre 1970, déclare être entré en France au mois de février 2010. Par une décision du 26 janvier 2017, le préfet de la Savoie a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour. M. C... relève appel du jugement du 18 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".
3. Si M. C..., de nationalité marocaine, prétend être entré sur le territoire français au mois de février 2010, il n'établit pas y avoir résidé habituellement avant le mois de novembre 2012, au vu des fiches de paie établies jusqu'à cette date par une société espagnole, de la date qu'il a mentionnée dans sa demande de titre de séjour du 14 septembre 2012 et de son passeport, qui fait état de nombreux trajets entre le Maroc et l'Espagne jusqu'au mois d'août 2012. A la date de la décision en litige, il résidait ainsi en France depuis moins de cinq ans, après s'y être maintenu en dépit d'une première mesure d'éloignement adoptée à son encontre le 26 avril 2013 et après avoir vécu jusqu'à l'âge de 41 ans au Maroc ou en Espagne, où il dispose d'un titre de séjour en cours de validité. Son épouse et leurs trois enfants, qui l'auraient rejoint en France en juillet 2012, sont également titulaires d'un tel titre de séjour, qui leur permet de se rendre régulièrement en France pour y voir les autres membres de leur famille. A cet égard, compte tenu de la présence en France de trois autres membres de sa fratrie, M. C... n'établit pas la nécessité de sa présence aux côtés de ses parents, titulaires de cartes de résident. Enfin, il ne démontre pas que son dernier fils, seul encore mineur à la date du refus de titre de séjour litigieux, ne pourrait poursuivre une scolarité normale en Espagne, pays où il a résidé jusqu'à l'âge de 5 ans. Dans ces circonstances, et nonobstant l'intégration, notamment dans la vie associative, dont il se prévaut, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Savoie aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations précitées.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
5. Ainsi qu'il a été dit au point 3, M. C... ne démontre pas qu'il existerait un obstacle à ce que son dernier enfant poursuive une scolarité normale et à ce que sa cellule familiale puisse se reconstituer hors de France, notamment en Espagne. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
6. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux indiqués aux points 3 et 5 du présent arrêt, le préfet de la Savoie n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. C....
7. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
8. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
Mme E... A..., présidente de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme D... F..., première conseillère.
Lu en audience publique le 17 novembre 2020.
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N° 19LY04646