3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1903747 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du préfet de l'Ain du 8 février 2019, a enjoint à celui-ci de délivrer à Mme D... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de Mme D..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 27 janvier 2020 et un mémoire enregistré le 21 juillet 2020, le préfet de l'Ain demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de rejeter la demande de Mme D....
Il soutient que :
- son arrêté ne méconnaît pas le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme D... pouvant avoir accès à un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine ;
- les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en défense enregistrés le 4 mai 2020 et le 22 juillet 2020, Mme D..., représentée par Me C..., avocat, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 février 2020.
Par une ordonnance du 23 juillet 2020, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 21 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... I..., première conseillère,
- et les observations de Me C..., avocate, représentant Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante marocaine née le 24 janvier 1971, est entrée en France en décembre 2016. Par des décisions du 8 février 2019, le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'elle avait sollicité en raison de son état de santé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Le préfet de l'Ain relève appel du jugement du 31 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mme D....
Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants marocains en vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. Il ressort des pièces du dossier que le préfet s'est approprié le sens de l'avis médical du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 17 décembre 2018, selon lequel si l'état de santé de Mme D... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il résulte, tout d'abord, du certificat médical soumis à l'OFII daté du 17 octobre 2018 et de l'attestation du praticien hospitalier qui la suit, datée du 14 févier 2018, que Mme D... souffre de la maladie de Parkinson, pour le traitement de laquelle lui est prescrit du Stalevo, ainsi qu'une consultation spécialisée tous les neuf mois. Mme D... ne produit aucune pièce propre à établir que cette spécialité médicamenteuse ne serait pas disponible au Maroc. En particulier, le certificat médical établi le 20 mars 2019 par le Dr Gouttard se borne à indiquer que ce médicament " paraît difficile à obtenir " au Maroc. En outre, les " autorisations spécifiques pour l'importation d'un médicament " qui lui ont été délivrées le 5 avril 2019 par les autorités marocaines, portent sur des spécialités distinctes, la Rasagiline et le Pentasa, et pour lesquelles elle ne produit aucune prescription. Il ne peut être déduit de ces seules autorisations que l'ensemble des autres traitements des maladies que traitent les médicaments qu'elles visent, notamment le Stavelo prescrit à Mme D..., est indisponible au Maroc. Par ailleurs, le risque de rupture d'approvisionnement, évoqué de façon générale dans des articles de presse qu'elle produit, ne saurait suffire à établir qu'elle ne pourrait effectivement accéder à son traitement. Il ne ressort pas davantage de ces articles de presse, pour certains anciens, ni de ceux versés au dossier par le préfet de l'Ain, que le Maroc ne disposerait pas de spécialistes susceptibles d'assurer le suivi ponctuel dont elle a besoin. Enfin, elle n'apporte aucune pièce établissant qu'un traitement particulier lui est prescrit pour la maladie de Crohn dont elle souffre par ailleurs. Dans ces circonstances, il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet de l'Ain en se fondant sur l'avis du collège des médecins de l'OFII, le traitement requis par l'état de santé de Mme D... ne serait pas effectivement accessible au Maroc.
5. Il suit de là que le préfet de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a, pour annuler ses décisions du 8 février 2019, retenu le moyen tiré la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les parties tant devant le tribunal administratif de Lyon que devant la cour.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :
7. Les décisions attaquées ont été signées par M. G... B..., directeur de la citoyenneté et de l'intégration de la préfecture de l'Ain, qui disposait d'une délégation de signature consentie à cet effet par un arrêté du préfet de l'Ain en date du 7 novembre 2018 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, accessible tant au juge qu'aux parties. Le moyen tiré de l'incompétence de l'autorité signataire de l'acte attaqué doit donc être écarté.
En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour :
8. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016 : : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport (...) ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) ".
9. Il résulte des dispositions précitées que l'avis médical destiné à éclairer la décision du préfet doit être pris au vu d'un rapport médical spécialement établi par un médecin ne siégeant pas au sein du collège de médecins de l'OFII qui rendra l'avis final, auquel il incombe d'instruire le dossier et à qui ledit collège de médecins pourra, en tant que de besoin, demander toute précision complémentaire utile à son appréciation. La régularité de l'avis émis, et par suite de la décision préfectorale, est dès lors subordonnée à ce que cet avis ait pu être rendu après que le dossier ait été régulièrement instruit par le rapporteur et éclairé par son rapport.
10. D'une part, ni les dispositions précitées ni aucune autre disposition ou aucun principe général du droit n'imposent que l'avis émis par le collège de médecins mentionne le nom du médecin ayant préalablement établi le rapport médical prévu par les dispositions législatives et réglementaires susmentionnées. Par ailleurs, l'avis médical émis par l'OFII le 17 décembre 2018 a été produit par le préfet de l'Ain.
11. D'autre part, la requérante soutient que le préfet doit justifier de l'existence du rapport préalable établi par le médecin rapporteur de l'OFII sur le fondement duquel le collège de médecins a rendu son avis. Toutefois, en respect du secret médical, le préfet n'a pas eu communication du rapport médical établi par le médecin de l'OFII et ne peut en demander la production. En revanche, en application des dispositions du 2ème alinéa de l'article R. 313-23 précité, l'autorité administrative est informée de la transmission de ce rapport. En l'espèce, il ressort de l'attestation du directeur territorial de l'OFII, datée du 17 décembre 2018, versée au débat, qu'un rapport médical a été établi le 28 novembre 2018 par le Dr Cireno, régulièrement désigné par la décision du 24 juillet 2018 modifiant la décision du 17 janvier 2017 portant désignation au collège de médecins à compétence nationale de l'OFII. Ce médecin n'a pas siégé au sein du collège qui a rendu l'avis sur l'état de santé de la requérante.
12. Nonobstant l'absence de production du rapport rédigé par le médecin instructeur, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis émis par l'OFII doit en conséquence être écarté.
13. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision de refus de titre de litigieuse qu'outre l'avis émis par l'OFII, le préfet a pris en considération les éléments médicaux que Mme D... avait porté à sa connaissance, ainsi que sa situation privée et familiale. Ainsi, le préfet de l'Ain a, contrairement à ce que prétend Mme D..., préalablement procédé à un examen de sa situation particulière. Le moyen tiré du défaut d'un tel examen doit, par suite, être écarté.
14. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".
15. Mme D... est entrée en France, en dernier lieu, au mois de décembre 2016. Ainsi, à la date du refus de titre de séjour en litige, elle ne résidait que depuis deux ans sur le territoire français, après avoir vécu pendant plus de quarante-quatre ans dans son pays d'origine et en Italie. Comme indiqué précédemment, elle ne démontre pas que son état de santé nécessite qu'elle demeure en France. Par ailleurs, il ressort du certificat médical établi le 14 février 2018 que le traitement reçu par Mme D... permet de limiter presque totalement les symptômes de la maladie de Parkinson dont elle est atteinte. Dès lors, s'il est constant qu'elle est, en France, aidée par sa soeur, de nationalité française, le seul certificat médical en date du 19 septembre 2019 qu'elle produit ne saurait suffire à établir que la présence de celle-ci à ses côtés serait indispensable. Enfin, il est constant qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine où demeurent sa mère, son frère et sa demi-soeur. Dans ces circonstances, Mme D... n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de l'Ain a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations et dispositions précitées.
16. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ".
17. Mme D... ne démontrant pas avoir présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'a pas été examiné d'office par le préfet de l'Ain, elle ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions. En tout état de cause, le préfet de l'Ain n'a pas manifestement méconnu ces dispositions en refusant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " pour les mêmes motifs que ceux indiqués aux points 4 et 15 du présent arrêt.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
18. En premier lieu, comme indiqué ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme D... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus de titre doit être écarté.
19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
20. Il résulte de ce qui a été indiqué au point 4 que Mme D... n'établit pas que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet de l'Ain en se fondant sur l'avis du collège des médecins de l'OFII, elle ne pourrait effectivement bénéficier du traitement requis par son état de santé au Maroc. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
21. En troisième lieu, indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne peut légalement prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Toutefois, il résulte, en l'espèce, de ce qui a été indiqué au point 4 du présent arrêt que Mme D... ne peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce moyen doit, par suite, être écarté.
22. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus mentionnés, Mme D..., qui n'a pas développé d'autres arguments, n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette même décision ne peut, pour les mêmes motifs, être regardée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
23. En cinquième lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ". Aux termes de l'article L. 531-1 du même code : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1 et L. 311-1 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne, en vigueur au 13 janvier 2009 (...). ".
24. Le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre. Lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 531-1, elle peut ainsi légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 531-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1. Toutefois, si l'étranger demande à être éloigné vers l'État membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, ou s'il est résident de longue durée dans un État membre ou titulaire d'une " carte bleue européenne " délivrée par un tel État, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet État ou de le réadmettre dans cet État.
25. Mme D... reproche au préfet de n'avoir " tiré aucune conséquence " du titre portant la mention "résident longue durée CE" qui lui a été délivré par les autorités italiennes et de s'être abstenu de saisir ces mêmes autorités d'une demande de réadmission. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point précédent que la circonstance, relevée par le préfet dans sa décision, que Mme D... était titulaire de tel titre ne faisait pas obstacle à l'édiction d'une obligation de quitter le territoire français à son encontre. Dans ces conditions, doivent être écartés les moyens tirés du vice de procédure et de l'erreur de droit qui entacheraient la décision en litige, au regard des dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision désignant le pays de destination :
26. En premier lieu, comme il a été indiqué ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme D... et celle lui faisant obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ces décisions doit, en tout état de cause, être écarté.
27. En second lieu, comme indiqué au point 4 du présent arrêt, il n'est pas établi que Mme D... ne pourrait effectivement recevoir un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine. Par ailleurs, la seule circonstance que Mme D... soit légalement admissible en Italie n'est pas de nature à entacher d'erreur manifeste d'appréciation la décision litigieuse en tant qu'elle fixe également le pays dont elle a la nationalité comme pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
28. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 8 février 2019 et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mme D....
Sur les frais liés au litige :
29. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme D....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1903747 du tribunal administratif de Lyon du 31 décembre 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme H... A..., présidente de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme E... I..., première conseillère.
Lu en audience publique le 17 novembre 2020.
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N° 20LY00393