Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 19 février 2019, M. B... C..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Mions a refusé la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et a rejeté sa demande indemnitaire préalable ;
3°) d'enjoindre au maire de Mions de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de condamner la commune de Mions à lui verser la somme de 24 224 euros, correspondant à la totalité de la rémunération qu'il estime lui être due du 28 octobre 2015 à la date de sa mutation, outre intérêts de droit au taux légal à compter du 16 avril 2017, et capitalisation de ceux-ci ;
5°) de condamner la commune de Mions à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi ;
6°) de condamner la commune de Mions à réparer le préjudice corporel et extra corporel qu'il estime avoir subi, après évaluation par un expert désigné par la juridiction ;
7°) de mettre à la charge de la commune de Mions la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularité, le tribunal ayant dénaturé les pièces du dossier ;
- l'absence de reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie dont il est atteint constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;
- il a subi un préjudice matériel estimé à la somme de 24 224 euros, il demande la réparation du préjudice moral subi à hauteur de 10 000 euros et l'indemnisation de son préjudice corporel et extra corporel après évaluation par un expert à désigner avant-dire-droit par la cour.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2020, la commune de Mions, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. C... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement n'est pas fondé ;
- les demandes du requérant sont irrecevables et subsidiairement non fondées.
Vu la demande préalable de M. C... et les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Tallec, président,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., avocat, représentant M. C..., et de Me D..., avocat, représentant la commune de Mions.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... C..., alors agent de maîtrise au service jeunesse et sports de la commune de Mions, a été placé le 28 octobre 2015 en arrêt de travail pour une " réaction anxio-dépressive " par son médecin traitant, vers lequel l'avait orienté le médecin du travail, qu'il avait consulté le même jour. Le requérant n'a pas repris son activité au sein de la commune et le 24 mai 2016, la commission de réforme des agents des collectivités territoriales du département du Rhône a émis un avis favorable à la qualification de " maladie contractée en service " de l'affection dont il était atteint. Par décision du 4 novembre 2016, le maire de Mions a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette affection. A compter du 17 janvier 2017, M. C... a été recruté par la ville de Lyon, en qualité d'adjoint au responsable d'établissement, à temps plein, au sein de la direction des sports. Par lettre datée du 13 avril 2017, reçue par son destinataire le 18 avril 2017, M. C... a présenté une demande indemnitaire préalable au maire de Mions, et a sollicité le versement de la somme totale de 34 224 euros en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'illégalité du refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de son affection. En l'absence de réponse de l'administration, M. C... a saisi le tribunal administratif de Lyon, qui, par jugement du 19 décembre 2018, a refusé de faire droit à ses demandes. M. C... relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. M. C... fait valoir que les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier en se fondant à tort sur un seul rapport d'expertise, au surplus mal interprété, sans prendre en compte les autres éléments fournis, pour estimer que sa pathologie n'était pas imputable au service. Toutefois, un tel moyen, qui se rattache au bien-fondé de la décision juridictionnelle, ne constitue pas un moyen d'irrégularité du jugement et doit, par suite, être écarté.
Sur la demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'affection de M. C... :
3. Il résulte de la combinaison des dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires et de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction alors en vigueur, qu'un fonctionnaire qui souffre d'une maladie contractée ou aggravée en service a droit à un congé de maladie à plein traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite, sauf s'il entre dans les cas prévus pour l'octroi d'un congé de longue maladie ou de longue durée limitant la période de maintien de cette rémunération. L'imputabilité au service de cette maladie est appréciée par la commission de réforme qui rend un avis ne liant pas l'autorité territoriale.
4. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée.
5. M. C... soutient que l'état anxio-dépressif dont il souffre est la conséquence des agissements à son égard de son supérieur hiérarchique depuis le début de l'année 2011, aggravés par l'absence de soutien du maire élu en 2014, auquel il reproche également un " traitement discriminatoire ".
6. Toutefois, dans son rapport du 3 mai 2016, le docteur Sabatini, psychiatre agréé ayant procédé à l'examen de M. C..., précise : " On ne relève pas de signe patent de dépression, tant dans le registre de l'inhibition (l'intéressé ne manque pas d'énergie) que dans celui de la tristesse. M. C... exprime en revanche un fort sentiment d'humiliation et de dévalorisation (qui est peut-être à hauteur des exigences narcissiques), qui s'accompagne d'une combativité ". L'expert ajoute ensuite qu'il " est très difficile d'intégrer tous les tenants et aboutissants de la situation ", " qu'il est plus difficile encore d'apprécier si les allégations de M. C... d'agissements délibérés, d'acharnement et de conduites vexatoires sont fondées, ou bien si les changements qui l'ont concerné sont vécus par lui comme des atteintes à sa propre volonté. ". Il conclut son rapport en indiquant : " Il est nécessaire, pour se faire une opinion éclairée, que son dossier de maladie professionnelle ou d'accident du travail soit documenté, d'autant qu'il met en cause non seulement son directeur, mais aussi un élu et le maire ".
7. Ni l'arrêt de travail du médecin généraliste du 28 octobre 2015, mentionnant une " réaction anxio dépressive avec inaptitude au poste consécutif aux difficultés sur les lieux de travail selon l'avis du médecin du travail ", ni les attestations en date des 26 janvier et 2 mai 2016 du psychiatre du requérant, le docteur Gontier, mentionnant pour le premier " un état dépressif réactionnel à une grande difficulté dans son travail ", " une perte d'élan vital ", des ruminations obsédantes ", " des idées de dévalorisation " et se terminant par la nécessité " de revoir la position de travail de cet agent ", le second affirmant, en se fondant sur les déclarations du patient, que les troubles en cause ont pour origine son activité professionnelle, ne sont pas suffisants pour remettre en cause l'analyse du médecin agréé. Si M. C... se prévaut également de l'avis rendu par la commission de réforme, celui-ci ne comporte aucune motivation et s'il fait valoir que le maire n'a pas sollicité, comme il l'avait indiqué dans son courrier du 4 novembre 2016, une nouvelle expertise, la commune de Mions a précisé dans ses écritures, sans être contestée, que cette expertise n'a pas eu lieu en raison du recrutement de M. C... par une autre collectivité à compter du 17 janvier 2017.
8. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges, qui n'ont pas dénaturé les pièces du dossier, ont estimé que l'affection dont souffrait M. C... n'était pas imputable au service. Il en résulte, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense et d'ordonner une expertise, que les conclusions aux fins d'annulation, d'injonction et d'indemnisation présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mions, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. C.... Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de ladite commune présentées au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Mions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la commune de Mions.
Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
M. Pierre Thierry, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe 25 février 2021.
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N° 19LY00651