Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 27 avril 2017 et un mémoire, enregistré le 26 février 2019, le SDIS de l'Isère, représenté par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 28 février 2017 ;
2°) de mettre à la charge de Mme C...la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
seules les lésions directement imputables à l'accident de service doivent être prises en charge à ce titre, ce qui n'est pas le cas de la fibromyalgie diagnostiquée, qui n'a pas de lien direct et certain avec l'accident de service du 27 février 2007, ni avec la rechute du 21 janvier 2008 ; Mme C...n'a produit aucun nouvel élément médical de nature à remettre en cause les deux expertises ;
le tribunal administratif de Grenoble a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant qu'aucun élément médical ne permet de rattacher objectivement les troubles de Mme C...à des événements extérieurs au service en dépit des deux expertises qu'il a produit.
Par deux mémoires en défense enregistrés le 3 août et le 12 décembre 2017, Mme C... représentée par Me B... conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
la loi n° 91-1389 du 31 décembre 1991 relative à la protection sociale des sapeurs-pompiers volontaires en cas d'accident survenu ou de maladie contractée en service ;
le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,
les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
* et les observations de Me I... substituant Me E..., représentant le SDIS de l'Isère ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...C..., sapeur pompier volontaire a été victime d'une chute d'une hauteur de 2,5 mètres au cours d'une opération de secours le 27 février 2007. Les suites de cet accident, reconnu imputable au service, ont été considérées comme guéries le 16 mai 2007. Toutefois, des douleurs s'étant manifestées à partir du 30 août 2007, une lombo-sciatique a été diagnostiquée et reconnue comme une rechute à la suite, d'une part, d'un certificat médical du 21 janvier 2008, puis d'une expertise menée par le Dr F...le 14 mars 2008. Mme C...ayant bénéficié d'arrêt de travail à compter du 6 septembre 2011 jusqu'en février 2013, son état de santé a fait l'objet, à la demande du SDIS de l'Isère et de la commission de réforme, de nouvelles expertises par le DrJ..., le 11 février 2013, et par le DrH..., le 2 octobre 2013. En outre, Mme C...a, de sa propre initiative, été examinée par le Dr D...le 20 mars 2013. A la suite de l'avis du 19 décembre 2013 de la commission de réforme, rendu au vu de ces expertises, le directeur du SDIS de l'Isère a décidé, le 17 janvier 2014, que les arrêts de travail et soins prescrits au titre de l'accident du 27 février 2007, devaient à compter du 1er février 2013, relever de la maladie ordinaire et qu'un taux d'incapacité permanente partielle fixé à 8 % devait être reconnu à MmeC....
2. Aux termes de l'article 1er de la loi n° 91-1389 du 31 décembre 1991 : " Le sapeur-pompier volontaire victime d'un accident survenu ou atteint d'une maladie contractée en service ou à l'occasion du service a droit, dans les conditions prévues par la présente loi : 1° Sa vie durant, à la gratuité des frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires ainsi que des frais de transport, d'hospitalisation et d'appareillage et, d'une façon générale, des frais de traitement, de réadaptation fonctionnelle et de rééducation professionnelle directement entraînés par cet accident ou cette maladie ; 2° A une indemnité journalière compensant la perte de revenus qu'il subit pendant la période d'incapacité temporaire de travail ; 3° A une allocation ou une rente en cas d'invalidité permanente ".
3. Les droits prévus par ces dispositions sont soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. Par ailleurs, l'existence d'une maladie ou un syndrome distinct des suites de l'accident et évoluant pour son propre compte, fût-il évolutif, ne permet d'écarter l'imputabilité au service de l'état d'un agent que lorsqu'il apparaît que cet état a déterminé, à lui seul, l'incapacité professionnelle de l'intéressé.
4. Ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal administratif de Grenoble, la date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent, ce qui permet alors d'apprécier un taux d'incapacité permanente partielle qui a résulté d'une pathologie ou d'un accident. La consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident.
5. Les docteurs J...et H...ont considéré dans leurs rapports d'expertise respectifs que les séquelles de l'accident et de la rechute de Mme C...étaient consolidées, que sa lombalgie sciatique était à l'origine d'une incapacité permanente partielle de 8 % et que les symptômes douloureux de l'intéressée étaient en liens essentiels avec une fibromyalgie et une lombarthrose. Si l'existence d'un syndrome fibromyalgique chez Mme C... est contestée par le Dr D...dans son expertise du 20 mars 2013, un certificat médical antérieur du DrG..., daté du 12 décembre 2012 diagnostique un tel syndrome et l'explique par une " hypersensibilisation du système nerveux central dans les suites de ce traumatisme " causé par l'accident de service de l'intéressée. Le DrH..., quant à elle, sans faire de lien entre le syndrome fibromyalgique et l'accident de service a toutefois décrit ce syndrome comme pouvant résulter de diverses causes dont une part due " à la décompensation d'un traumatisme ancien ".
6. Contrairement à ce que soutient le SDIS de l'Isère, les divers examens médicaux auxquels Mme C...a été soumise permettent de considérer qu'elle n'est pas guérie des séquelles de l'accident de service, en raison duquel lui a été reconnu un taux d'incapacité permanente partielle de 8 % en lien avec l'accident de service et la rechute. Son état de santé actuel ne pouvant, dès lors, être considéré comme exclusivement lié à une fibromyalgie dont le lien avec l'accident ne peut, en outre, être écarté, le directeur du SDIS de l'Isère ne pouvait lui refuser, par la décision attaquée, le bénéfice des droits ouverts par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le SDIS de l'Isère n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à la demande dont l'avait saisi MmeC....
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à charge la MmeC..., qui n'est pas partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de SDIS de l'Isère en ce sens doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du SDIS de l'Isère est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au SDIS de l'Isère et à Mme A...C....
Délibéré après l'audience du 19 mars 2019 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
Mme Virginie Chevalier-Aubert, présidente assesseure,
M. Pierre Thierry premier conseiller,
Lu en audience publique, le 9 avril 2019.
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N° 17LY01766