Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 mars 2021, M. B..., représenté par Me Huard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Savoie de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer, dans un délai de huit jours, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
M. B... soutient que :
- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé ;
- en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, au motif qu'il n'avait pas pu présenter de contrat de travail, alors qu'il avait été involontairement privé d'emploi, le préfet a méconnu l'article R. 5221-33 du code du travail ;
- le préfet aurait pu lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de sa situation personnelle ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire enregistré le 9 septembre 2021, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Par décision du 12 février 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant guinéen né le 18 septembre 1999, déclare être entré en France irrégulièrement le 2 août 2016 alors qu'il était âgé de dix-sept ans. Il a fait l'objet d'un placement provisoire auprès du département de la Savoie, puis d'une mesure d'assistance éducative le confiant au service de l'aide sociale à l'enfance du département de la Savoie jusqu'à sa majorité. Il a suivi une formation en lycée professionnel et a obtenu un baccalauréat dans la filière " gestion-administration " en juin 2018, puis s'est inscrit en BTS " management des unités commerciales ". Dans le cadre de sa scolarité, il a bénéficié de deux contrats d'apprentissage, du 1er décembre 2017 au 31 août 2018, puis du 8 octobre 2018 au 11 juillet 2020. A sa majorité, un titre de séjour portant la mention " travailleur temporaire " valable du 11 décembre 2017 au 10 décembre 2018 lui a été délivré sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, puis a été renouvelé jusqu'au 14 janvier 2020. Le 6 janvier 2020, il a sollicité un changement de statut en vue de l'obtention d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un jugement du 31 décembre 2020 dont il relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 août 2020 par lequel le préfet de la Savoie a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
2. En premier lieu, les dispositions de l'article R. 5221-33 du code du travail, qui prévoyaient, dans leur version alors en vigueur, que la validité de l'autorisation de travail est prorogée d'un an lorsque l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi à la date de la première demande de renouvellement, ne trouvaient à s'appliquer, ainsi qu'elles le précisaient, qu'aux autorisations de travail visées au 8° de l'article R. 5221-3 du code du travail, c'est-à-dire à celles constituées par la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". M. B..., qui n'a pas, préalablement à la décision en litige, bénéficié d'une carte de séjour portant la mention " salarié " mais de celle portant la mention " travailleur temporaire " visée au 9° de ce même article, ne peut en conséquence utilement faire valoir que le préfet a méconnu l'article R. 5221-33 du code du travail en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié au motif qu'il n'a pas présenté de contrat de travail, et même si sa période d'essai a été rompue selon lui, en raison de la crise sanitaire.
3. En deuxième lieu, ainsi que l'a indiqué le tribunal, si M. B... est entré en France à l'âge de dix-sept ans, il n'y réside que depuis quatre années. Il est célibataire et sans enfants. A... n'a pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident, notamment, sa mère et ses frères et sœurs. S'il soutient avoir rompu toute relation avec sa famille, il ne l'établit pas alors que son passeport démontre qu'il s'est rendu en Guinée en octobre 2018 et lui-même a indiqué dans un courrier adressé au préfet le 7 août 2020 avoir des contacts téléphoniques avec sa famille, en particulier sa mère. Les trois attestations qu'il produit ne suffisent pas à démontrer qu'il aurait noué en France des relations personnelles d'une particulière intensité. Il ne justifie pas davantage de perspectives précises d'intégration professionnelle sur le territoire français. Le dernier contrat de travail dont il se prévaut, au demeurant postérieur à l'arrêté litigieux, est un contrat à durée déterminée d'une durée inférieure à un mois. Dans ces circonstances, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France et alors même que M. B... y a suivi une partie de sa scolarité, le préfet de la Savoie a pu légalement refuser de lui délivrer un titre de séjour et lui faire obligation de quitter le territoire français sans porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il suit de là que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues. Pour les mêmes motifs, le préfet de la Savoie n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait pu lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, sans qu'il remplisse les conditions légales compte tenu de sa situation personnelle doit, pour les mêmes raisons, être écarté.
4. En troisième lieu, M. B... reprend en appel, sans l'assortir d'aucune précision supplémentaire ni d'aucun élément pertinent par rapport à l'argumentation déjà développée en première instance, le moyen tiré de ce que l'arrêt du préfet est insuffisamment motivé. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs justement retenus par les premiers juges.
5. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa demande doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.
Délibéré après l'audience du 16 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, présidente assesseure,
Mme Duguit-Larcher, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 octobre 2021.
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N° 21LY00756