2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours compter de la notification du jugement à intervenir, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours compter de la notification du jugement à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil, à charge pour celui-ci de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.
Par un jugement n° 2005424 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 5 avril 2021, Mme B..., représentée par Me Rodrigues, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susmentionné du 31 décembre 2020 du tribunal administratif de Lyon et l'arrêté précité du 11 mai 2020 du préfet de l'Ain ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil, à charge pour celui-ci de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.
Elle soutient que :
- en ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
. elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;
. elle est entachée d'une erreur de fait pour indiquer qu'elle a quitté son pays à l'âge de 54 ans, alors qu'elle a quitté l'Arménie en 2008 pour séjourner en Ukraine jusqu'à son entrée en France ;
. elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
. elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
. elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
. elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
. elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
. elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 décembre 2021, le préfet de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une décision du 10 mars 2021, Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Rivière.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 11 mai 2020, le préfet de l'Ain a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme B..., ressortissante arménienne, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. L'intéressée a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de ces décisions. Par un jugement n° 2005424 du 31 décembre 2020, dont elle relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée n'aurait pas été précédée d'un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée.
3. En deuxième lieu, si la requérante soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait car elle mentionne qu'elle a quitté son pays à l'âge de 54 ans, alors qu'elle a quitté l'Arménie en 2008 pour séjourner en Ukraine jusqu'à son entrée en France, elle n'établit pas, par les pièces produites, la réalité de ce séjour en Ukraine. En tout état de cause, une telle erreur ne serait pas déterminante du sens de la décision.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... est entrée en France le 10 décembre 2014 selon ses déclarations, accompagnée de son fils alors mineur, qui a obtenu la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " valable du 27 avril 2019 au 28 avril 2020. La décision contestée ne fait pas obstacle au maintien d'un lien entre l'intéressée et son fils, bien que la délivrance d'un passeport arménien aurait été refusé à ce dernier pour des raisons tenant à son statut militaire. Mme B... ne démontre pas que la présence de son fils à ses côtés serait indispensable. Elle se maintient en France en dépit de trois précédents refus de séjour assortis d'obligations de quitter le territoire français prononcés à son encontre les 10 novembre 2015, 11 octobre 2016 et 6 août 2018 et confirmés pour les deux premiers par des jugements du 22 mars 2016 et du 23 mai 2017 du tribunal administratif de Lyon. Elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, ni être dans l'impossibilité d'y mener une vie privée et familiale normale. Elle ne justifie pas d'une intégration particulière en France bien qu'elle ait suivi des cours de français et obtenu des promesses d'embauche en qualité d'aide cuisinier et d'agent d'entretien. Ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de Mme B..., la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Elle ne méconnait dès lors pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale.
6. En quatrième lieu, si Mme B... soutient que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-10 et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'assortit ce moyen d'aucune critique utile ou pertinente des motifs du jugement. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.
7. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. ".
8. En se prévalant, d'une part, de sa situation personnelle et familiale, d'autre part, d'une promesse d'embauche en qualité d'agent d'entretien, en soutenant qu'elle a occupé en Arménie et en Ukraine de tels emplois, sans justifier au demeurant d'une qualification et expérience pour occuper un tel poste, la requérante ne démontre pas, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de la décision portant refus de séjour, Mme B... n'est pas fondée à exciper d'une telle illégalité à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
10. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux développés au point 5.
Sur la légalité de la décision portant fixation du pays de destination :
11. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette mesure d'éloignement.
12. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
13. Si Mme B... soutient qu'elle craint pour sa vie en cas de retour en Arménie en raison de l'engagement politique de son mari et de son fils aîné au sein du parti " Héritage ", elle ne démontre pas le caractère réel, actuel et personnel d'un tel risque, alors d'ailleurs que celui-ci n'a pas été tenu pour établi par la cour nationale du droit d'asile dans sa décision du 11 décembre 2015 rejetant son recours contre la décision du 30 juin 2015 lui refusant le bénéfice de l'asile.
14. Il résulte de tout de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
15. Ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent par suite qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 10 février 2022, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
M. Rivière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mars 2022.
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N° 21LY01041