Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 5 avril 2019, M. C..., représenté par la SCP Audard et associés, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Dijon du 5 mars 2019 ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 2 octobre 2018 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à tout le moins de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;
- elle méconnaît le 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de séjour ;
- en outre, cette décision méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par lettre du 11 octobre 2019, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office tiré de l'incompétence du président du tribunal administratif de Dijon pour statuer seul sur la demande de première instance de M. C....
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2019, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par M. C... n'est fondé.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 30 avril 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né en 1976, est entré en France le 17 octobre 2011, sous couvert d'un visa de court séjour. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français malgré le rejet de sa demande de titre de séjour le 26 mars 2012, confirmé par le tribunal administratif de Dijon le 6 juillet 2012 puis par la cour administrative d'appel de Lyon le 6 août suivant ainsi que la confirmation par le préfet de la Côte-d'Or, le 22 janvier 2014, de l'obligation de quitter le territoire français qui lui avait été faite. Le 22 janvier 2015, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'un an sur le fondement du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié en se prévalant de la nationalité française de l'un de ses enfants, né le 29 novembre 2013. Par un arrêté du 2 octobre 2018, le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par un jugement du 5 mars 2019, le président du tribunal administratif de Dijon a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et a rejeté le surplus des conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande de première instance.
2. Aux termes du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) ". Le jugement des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français, d'une décision fixant le pays de renvoi et d'une interdiction de retour sur le territoire français, relève, devant le tribunal administratif, de la formation collégiale.
3. Il ressort des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français en litige a été prise, après examen de la demande de titre de séjour de M. C... au titre du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En application des dispositions précitées du I de l'article L. 512-1 du même code, le président du tribunal administratif de Dijon n'était pas compétent pour statuer seul sur la demande de M. C.... Par suite, le jugement est irrégulier et doit être annulé.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Dijon pour qu'il soit statué sur la demande de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 octobre 2018 du préfet de la Côte-d'Or et de rejeter les conclusions de l'appelant présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1803420 du président du tribunal administratif de Dijon du 5 mars 2019 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Dijon.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. C... sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.
Le rapporteur,
S. B...Le président,
J.-L. d'Hervé
Le greffier,
J. Billot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
2
N° 19LY01408