Procédure devant la cour
Par une requête et une mémoire enregistrés les 28 février et 7 mai 2018, M.A..., représenté par Me Faure Cromarias, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à défaut, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour valant autorisation de travail ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à son profit au titre des frais du litige dont la somme de 13 euros correspondant au droit de plaidoirie, ainsi que la somme de 3 000 euros au profit de son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente ;
- le préfet a commis une erreur de droit en se fondant sur les conditions prévues par la circulaire du 28 novembre 2012 pour rejeter la demande de titre de séjour portant la mention "salarié" qu'il avait présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- il a méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2018, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Par une décision du 13 août 2018, l'instruction a été close au 13 septembre 2018.
Par une décision du 16 janvier 2018, M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Michel ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant guinéen, est entré irrégulièrement en France le 25 septembre 2012. Après le rejet définitif de sa demande d'asile, il a vainement sollicité un titre de séjour pour raison de santé. Il a demandé en dernier lieu au préfet du Puy-de-Dôme de régulariser sa situation administrative par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 12 avril 2017, le préfet a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de la Guinée.
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ".
3. Il ressort de l'arrêté contesté que, pour rejeter la demande de régularisation en tant que salarié de M.A..., qui se prévalait d'une promesse d'embauche en qualité de plâtrier-plaquiste, au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Puy-de-Dôme, après avoir cité la circulaire du 28 novembre 2012 relative à l'admission au séjour en qualité des salarié, a indiqué tout d'abord que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Auvergne avait émis un avis défavorable sur sa demande d'admission exceptionnelle par le travail aux motifs, d'une part, qu'il ne remplissait pas les conditions de durée de séjour et de périodes travaillées dans le cadre de la circulaire dite Valls et, d'autre part, que l'entreprise n'avait pas été identifiée par l'inspecteur du travail à l'adresse indiquée sur la demande d'autorisation de travail remplie par l'employeur. Le préfet s'est ensuite approprié ces motifs en précisant qu'effectivement au moment de sa demande, l'intéressé était présent en France depuis plus de trois ans et six mois et bénéficiait donc d'une ancienneté de séjour inférieure à cinq ans. Il a ajouté que rien n'indiquait dans son dossier qu'il aurait suivi une formation ou obtenu un diplôme en lien avec l'emploi visé, ou qu'il aurait exercé antérieurement une activité salariée. Le préfet, qui s'est borné ainsi à relever qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par la circulaire du 28 novembre 2012, sans examiner sur ce point sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a entaché sa décision d'une erreur de droit. La décision de refus de titre de séjour doit donc être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de renvoi.
4. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
5. L'annulation prononcée par le présent arrêt, eu égard au motif sur lequel elle se fonde, implique seulement que l'administration prenne une nouvelle décision sur la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il ya ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
6. Il appartient également au préfet, conformément à ce que prévoient les dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de délivrer à M.A..., dans le délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait été à nouveau statué sur son cas.
7. Les droits de plaidoirie ne sont pas au nombre des dépens énumérés par l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées à ce titre ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
8. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Faure Cromarias, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de celui-ci la somme de 800 euros au titre des frais du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701670 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 23 novembre 2017 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 12 avril 2017 du préfet du Puy-de-Dôme est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer la situation de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours.
Article 4: L'Etat versera à Me Faure Cromarias une somme de 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qu'il lui a confiée.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président rapporteur,
Mme Lesieux, premier conseiller.
Lu en audience publique le 11 avril 2019.
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N° 18LY00793