Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 11 mars 2020, Mme A... B..., représentée par Me C..., doit être regardée comme demandant à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement n°2000341 du 11 février 2020 ainsi que les décisions du 5 février 2020 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi, lui interdisant tout retour en France pour une durée d'un an et portant assignation à résidence ;
2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la mesure d'éloignement est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité du refus de séjour lequel méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le 7° de l'article L. 313-11 du même code ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la mesure d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'interdiction de retour est insuffisamment motivée et méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code précité ;
- l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement entachent d'illégalité les décisions refusant tout délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi, portant interdiction de retour et assignation à résidence.
Le préfet de Saône-et-Loire, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme D..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B... relève appel de l'article 3 du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation des décisions prises le 5 février 2020 par le préfet de Saône-et-Loire l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, prononçant une interdiction de retour d'un an, fixant l'Ukraine comme pays de renvoi et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Sur la mesure d'éloignement :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 31310 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...). " Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...)".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... B..., ressortissante ukrainienne née le 15 septembre 1990 et entrée irrégulièrement en France le 10 novembre 2015, a vu sa demande d'asile définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 avril 2017. Elle a fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire par arrêté du 9 août 2017 pris par le préfet de Saône-et-Loire qu'elle n'a pas exécutée. Si elle se prévaut de l'ancienneté de son séjour à la date des décisions litigieuses du 5 février 2020, elle s'est maintenue sur le territoire national en situation irrégulière à la suite du rejet de sa demande d'asile et en raison de l'absence d'exécution de cette mesure d'éloignement. Elle est célibataire et sans enfant et elle n'établit pas, comme elle l'allègue, que sa mère résiderait en France et sous couvert d'un titre de séjour régulier, alors que sa soeur jumelle et son frère se trouvent dans la même situation administrative qu'elle sur le territoire national. Elle a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans dans son pays d'origine et y a nécessairement conservé des attaches privées et familiales qu'elle n'a pas en France. Si elle suit actuellement des études à l'université de Bourgogne et a été admise en juin 2020 en licence 2 droit après avoir réussi une capacité en droit, elle ne justifie d'aucune intégration particulière en France et rien ne s'oppose à ce qu'elle poursuive ses études ou suive d'autres formations supérieures dans son pays d'origine où elle a terminé en 2012 une formation de juriste. Compte tenu de ces éléments, Mme A... B... ne justifie pas en outre de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires qui permettraient de regarder l'arrêté contesté comme méconnaissant les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que les moyens tirés, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour contenue dans l'arrêté du 5 février 2020 en ce qu'elle méconnaîtrait l'article L. 313-14 du code précité ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Il en va de même, et pour les mêmes motifs, du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention précitée par la mesure d'éloignement contestée.
4. L'appelante se prévaut également, par voie d'exception, de la violation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par le refus de séjour. S'il ressort des pièces du dossier de première instance que l'intéressée n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur ce fondement, le préfet de Saône-et-Loire a néanmoins vérifié que la situation de Mme A... B... n'entrait dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui aurait été de nature à faire obstacle au prononcé d'une mesure d'éloignement et a visé les dispositions litigieuses. Si l'appelante peut, dans ces conditions, utilement invoquer, par exception, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point précédent.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
5. Mme A... B... reprend en cause d'appel, et sans les assortir d'éléments nouveaux de fait ou de droit, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre par le préfet de Saône-et-Loire et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'il aurait commise dans la fixation à un an de la durée de cette interdiction. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge, d'écarter ces moyens.
6. Compte tenu de la légalité de la mesure d'éloignement édictée le 5 février 2020 à l'encontre de l'appelante, celle-ci n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre des décisions portant refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de renvoi, interdiction de retour sur le territoire national et assignation à résidence.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation des décisions prises le 5 février 2020 à son encontre par le préfet de Saône-et-Loire portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi, lui interdisant tout retour en France pour une durée d'un an et portant assignation à résidence. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er avril 2021.
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N° 20LY01052
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